12. LES MIGRANTS ROMS SONT SOUMIS À DES TRAITEMENTS INHUMAINS ETDÉGRADANTS
C.S., 24 ans, est une rom de Roumanie. A l’âge de douze ans, elle est venue en France demander l’asile politique avec sa mère, son père et ses trois soeurs. Au début, la famille était accueillie dans un centre de réception de demandeurs d’asile à Franconville en banlieue parisienne. On donnait de la nourriture à la famille et les enfants allaient à l’école dans le centre de réception. Toutefois, d’après C.S., un jour, après que la famille ait passé environ six mois dans le centre de réception, un employé leur a dit : « On ne veut pas de roms ici. On vous a gardé pour l’hiver. Maintenant vous devez partir. » Depuis ce jour, C.S. a vécu dans une vieille caravane, allant constamment d’un endroit à l’autre, chaque fois que la famille était expulsée par les autorités locales. Elle a vécu dans 90 campements non autorisés depuis qu’elle est en France, à chaque fois dans des conditions digne des bidonvilles, sans eau, sans électricité, ni toilettes ou ramassage des ordures. Du fait de leurs conditions de vie précaires, elle n’a pu retourner à l’école.
Comme la famille n’a reçu aucune aide de l’Etat depuis le jour où ils ont quitté le centre de réception et n’avait pas le droit de travailler, C.S, a passé son enfance à mendier dans les rues de Paris. Elle a dit à l’ERRC qu’elle avait vécu une période particulièrement difficile vers 14 ans. Son père était parti et elle vivait avec sa mère, T.S., ses deux jeunes soeurs (A.S. 10 ans et I.S. 8 ans) et son jeune frère, V.S. (alors bébé) sur un site de Pontoise, là ou environ 60 autres familles vivaient aussi.554 Un jour, à 6h du matin, la police a fait une descente dans le site. Ils ont tapé sur les caravanes avec leurs poings et leurs matraques, et, si les familles ne sortaient pas, ils cassaient les portes. Ils sont entrés dans toutes les caravanes. Les policiers ont vu que C.S. parlait bien français (qu’elle avait appris par elle-même). Ils lui ont dit de venir avec eux pour remplir les papiers de tout le monde. Ils ont emmené au moins 40 autres personnes au commissariat. Elle a demandé ce qu’elle y gagnerait et on lui a dit qu’elle serait ensuite autorisée à repartir librement. Après avoir fait les traductions pour tout le monde, ils l’ont laissée repartir, elle et sa soeur âgée de dix ans. Mais ils ont renvoyé sa mère et son petit frère en Roumanie. Elle a dit aux policiers : « C’est ma mère ». Ils ont dit que ça ne les intéressait pas de savoir si c’était ou non sa mère. Elle a dit qu’elle voulait partir avec sa mère, mais ils lui ont dit de s’en aller et l’ont mise dehors par la force. Son autre petite soeur était encore dans la caravane. C.S. s’est retrouvée toute seule dans Paris, avec ses deux soeurs.
554 La plus âgée de ses soeurs était partie en Espagne. 272
Cabanes construites à partir de matériaux de récupération par des Roms vivant dans le camp non autorisé de la rue Surville, près de Lyon, entre autoroute et voies de chemin de fer. Environ 550 Roms vivaient dans le camp quand l’ERRC l’a visité en mars 2004.
PHOTO: LANNA YAEL HOLLO273
Des ordures en décomposition parsèment le camp de Surville. Les services municipaux, ordures municipales y compris, ont négligé de s’en occuper.
PHOTO: LANNA YAEL HOLLO
Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
274
Les filles ont survécu en mendiant sur les Champs-Élysées chaque nuit jusqu’à 5 heures du matin. Les trois soeurs arrivaient à gagner 200 à 300 francs par nuit (de 30 à 45rivaient à gagner 200 à 300 francs par nuit (de 30 à 45rivaient à gagner 200 à 300 francs par nuit (de 30 à 45rivaient à gagner 200 à 300 francs par nuit (de 30 à 45rivaient à gagner 200 à 300 francs par nuit (de 30 à 45ut celle des organisations caritatives. La mère de C.S. a réussi à revenir en France mais ne quitte pas sa caravane de 8 mètres carrés de peur d’être de nouveau envoyée en Roumanie. C.S a vécu de nombreuses descentes de police là où elle a vécu et chaque fois que sa famille a été expulsée, ce fut à l’occasion d’une descente, parfois violente. Elle estime qu’elle a dû être arrêtée une quinzaine de fois pour mendicité. Parfois elle a été détenue pendant deux ou trois jours, parfois elle a été relâchée après quelques heures. La police l’a aussi soumise à diverses formes de traitements humiliants, tel que lui couper les cheveux, ou la mettre torse nu en lui arrachant ses vêtements et l’envoyer dans la rue ainsi, torse nu.
La demande d’asile politique de la famille fut rejetée et C.S a alors demandé l’asile territorial, une forme de protection subsidiaire qu’il était possible d’obtenir jusqu’à ce que des réformes entrent en application le 1er janvier 2004. Ceci aussi fut refusé en juillet 2004 lorsqu’elle reçut un ordre de quitter le territoire français. Elle fit appel de la décision, mais la procédure d’appel ne suspend pas l’ordre de quitter le territoire. Normalement, une personne ayant passé 10 ans en France est éligible à un permis de résidence. Toutefois, C.S n’est pas en mesure de faire preuve de manière suffisante de ses premières années en France. Sa famille ne savait pas, au début, qu’ils devaient réunir de telles preuves. De plus, ils ont perdu leurs documents personnels lorsque leur caravane a été détruite par un incendie. C.S a aussi dit à l’ERRC que le centre de réception ou sa famille était restée au début refusait de donner des preuves de leur séjour, apparemment du fait d’un arrangement avec les autorités qui ont financé le séjour de la famille. C.S vit maintenant illégalement en France, toujours dans un campement non autorisé sans commodités de base. Elle espère qu’elle gagnera sa procédure en appel et qu’elle pourra finalement vivre une vie normale.555
Les migrants roms non citoyens français actuellement en France sont arrivés dans les années 90 après la chute des régimes communistes en Europe centrale et en Europe de l’est. Leur population totale en France est estimée à plusieurs milliers. Une majorité d’entre eux vient de Roumanie, toutefois il y a aussi un certain nombre de gens venant de l’ex-Yougoslavie, un peu moins venant d’autres pays d’Europe
555 Entretien de l’ERRC avec Mlle C.S., le 27 septembre 2004, à Aubervilliers. 275 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
centrale et de l’est. La plupart d’entre eux fuient les hauts niveaux de racisme « anti-tsiganes » qui a émergé avec l’instabilité politique, les rigueurs économiques et les montées du nationalisme qui ont suivi la chute des régimes communistes dans leurs pays d’origine. Ce climat anti-tsiganes s’est souvent traduit par de violentes attaques contre les communautés roms, la destruction de leurs biens et une discrimination tellement répandue que la survie est devenue quasi impossible.556
L’Etat français a adopté une politique incohérente et inhumaine vis-à-vis de ces roms migrants. Son but principal semble avoir été de forcer les roms migrants à quitter le pays sans faire une déportation collective de l’ensemble d’entre eux, ce qui aurait été une violation trop flagrante des droits de l’homme. Ainsi, au lieu de cela, les migrants roms sont sujets à diverses formes de violences, d’abus, de harcèlement et de mépris qui résultent en d’extrêmes violations de leurs droits dans pratiquement tous les aspects de leur vie.557 L’effet cumulé de ces violations persistantes des droits de l’homme est si sérieux qu’il s’apparente à un traitement inhumain et dégradant.
12.1 Des conditions de vie misérables : les bidonvilles français
Les migrants roms vivent dans des conditions rappelant bien plus les bidonvilles que les banlieues des villes françaises dans lesquelles ils se trouvent. Pour la plupart, leur « foyer » est un campement non autorisé, dans lequel des familles
556 La Roumanie constitue un exemple significatif de violences de masse déchaînées contre des communautés roms en temps de paix, sous le regard souvent bienveillant des autorités locales. Juste après la chute du régime de Ceaucescu, une vague de pogroms déferla sur plus de 30 communautés roms. Des émeutiers attaquèrent les communautés, brûlant des villages entiers et lynchant les roms au son d’insultes racistes. Au moins cinq roms moururent, et beaucoup furent grièvement blessés. Gadjo Dilo, le film français renommé de Tony Gatlif, est librement adapté du récit de l’un de ces pogroms. Pour plus de détails sur ces évènements et la situation générale des roms en Roumanie, voir State of Impunity : Human Rights Abuse of Roma in Romania, A Report by European Roma Rights Centre, September 2001. Disponible sur le site de l’ERRC à l’adresse suivante : www.errc.org.
Voir Cahn, Claude et Lanna Hollo. « Poursuivis par le spectre du racisme : les roms en Europe après 1989 ». Humanitaire, N° 11, automne 2004, pp. 42-51.
557 En dépit des efforts des autorités françaises pour forcer directement ou indirectement les roms à partir, leur nombre est resté stable ces dernières années. Ceux qui sont déportés reviennent souvent dans les trois à six mois. Voir, Collectif national des droits de l’homme Romeurope. Note de Synthese sur l’Accueil des Roms Migrants en France, 09 novembre 2004, distribué par email à la mailing list de Romeurope.276 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
vivent dans de vieilles caravanes ou dans des cabanes branlantes faites de matériaux de récupération. Certains vivent dans des conditions misérables, dans des squats, des bâtiments en ruine ou en construction. Bien entendu, les infrastructures de base telles que l’eau courante, l’électricité, le tout à l’égout et le ramassage des ordures manquent totalement.
A Aubervilliers se trouve un camp qui illustre dramatiquement le contraste entre les conditions de vie des roms et celles des résidents du voisinage. De la rue, on ne voit qu’une fine clôture de métal blanc. Mais lorsque l’on entre par un trou dans la clôture, on peut voir des douzaines de cabanes en piteux état, faites de matériaux de récupération (généralement du bois et du carton, avec des toits de tôle). Certaines ont des fenêtres en verre, pour d’autres ce ne sont que des feuilles de plastique scotchées sur les murs. La source d’eau courante la plus proche est une borne d’incendie, située à un kilomètre du camp. La ville n’a pas alimenté le camp en électricité mais les habitants ont réalisé un branchement de fortune au réseau électrique et se sont construit des toilettes. Il n’y a pas non plus de collecte des ordures, aussi les habitants transportent leurs ordures jusqu’aux poubelles publiques. La nuit, la fumée et les flammes de braseros (du bois dans des bidons vides) s’échappant des tubes de métal sortant des toits et faisant office de cheminées. Juste derrière se profilent les immeubles d’appartements de plusieurs étages d’une ville moderne, avec leurs balcons surplombant le camp, leurs lumières électriques et leurs postes de TV que l’on aperçoit au travers des fenêtres.558
A quelques minutes de voiture de là, plus bas sur la route, il y a deux campements non autorisés dans une zone industrielle. Dans l’un d’eux, le campement du quai Jean-Marie Tjibaou, environ 15 caravanes sont garées en rangées bien alignées de chaque côté d’un étroit terrain rectangulaire. Le RER (métro/train qui dessert la banlieue parisienne) passe à une fréquence élevée sur le pont juste au-dessus. A plus longs intervalles, le train passe sur un autre pont, lui aussi juste au-dessus. En avril 2005, les roms résidents ont été autorisés à rester là pour 18 mois, mais on ne leur a fourni ni toilettes ni électricité, ni eau. Ils ont réussi à se raccorder à l’électricité en se branchant sur l’éclairage public. Ils ont donc de l’électricité du soir jusqu’au matin quand l’éclairage public s’éteint, toutefois cela est insuffisant pour de nombreuses tâches ménagères telles que le repassage. Ils ont aussi créé de dangereux systèmes de chauffage maison et doivent voler de l’eau depuis les bornes d’incendie. Le coin
558 Visite de l’ERRC au campement d’ Aubervilliers le 28 novembre 2004. 277 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
d’un champ vide peu éloigné du camp sert de toilettes. A la nuit tombée, des douzaines de rats grouillent autour des caravanes.559
L’autre camp, quelques centaines de mètres plus bas sur la route, se trouve juste sous une autoroute, entre le RER et des usines. Lors d’une visite de l’ERRC le 28 novembre 2004, une vingtaine de caravanes cabossées, avec des bosses récentes et des vitres cassées suite à la dernière expulsion, étaient garées sur cet terrain boueux entre les piles d’ordures. Les résidents roms étaient là depuis 3 semaines. Ils n’avaient pas d’eau, pas d’électricité ou de tout à l’égout et les services de la ville ne venaient pas ramasser les ordures. Mme Maria C. une rom de 70 ans en France depuis trois ans, répétait sans cesse à l’ERRC qu’elle ne pouvait plus supporter les rats qui entraient dans sa caravanes par les trous laissés par les matraques de la police.560
Quelques kilomètres plus loin, dans la ville voisine de Villetaneuse, il y a un squat qui illustre de façon frappante les conditions déplorables dans lesquelles vivent généralement les roms migrants en France. Environ 30 familles vivent dans 25 appartements bricolés dans un immeuble de quatre étages à moitié construit et sans toit. Un courant d’air traversait l’appartement de la famille C. qui a accueilli l’ERRC le 28 novembre 2004. En effet, l’appartement n’était pas isolé et les ouvertures des fenêtres au bout des pièces n’étaient couvertes que d’un fin tissu blanc. La pièce était chauffée par un feu de bois qui brûlait dans un coin de la pièce, dans un brasero, qu’ils avaient fait eux-mêmes. La famille a essayé de rendre l’appartement aussi confortable que possible en couvrant de
559 Visite de l’ERRC à Aubervilliers, le 2 mai 2004. Mi-février 2005, les habitants craignaient qu’ils n’aient à quitter leur campement. Un jour la police est arrivée et leur a dit que s’ils ne partaient pas d’ici une semaine, on détruirait leurs caravanes. Mme R.S., agissant en tant que représentante des habitants a dit à la police qu’ils ne pouvaient pas partir car ils n’avaient pas de voitures pour remorquer leurs caravanes et n’avaient nulle part où aller. Elle a aussi dit que le maire de la ville leur avait promis un endroit où vivre. Elle a donné à la police le nom d’un élu. La police est revenue les jours suivants en répétant leurs menaces. La menace d’expulsion venait en fait d’un ordre, semble-t-il venu d’assez haut dans l’administration, de nettoyer les campements de roms à Aubervilliers, lesquels étaient sur le passage de la visite du Comité International Olympique prévue pour début mars. La sous-préfète de Saint-Denis, Mme Le Mouel est venu sur les lieux quelques jours plus tard avec le chef de la police et M. Roland Tess, directeur du cabinet du maire. Quelques jours plus tard, elle a appelé R.S. pour lui dire qu’ils pouvaient rester dans ce camp pour le moment. Entretien de l’ERRC avec Mme. R.S., 27 mars 2005. Des emails ont circulé sur la mailing liste de Romeurope.
560 Entretien de l’ERRC avec Mme Maria C., le 28 novembre 2004 ; visite de l’ERRC à Aubervilliers, le 28 novembre 2004.278 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
de récupérer leurs affaires et leurs papiers.tapis les murs et le sol. La source d’eau courante la plus proche pour les résidents est une borne d’incendie qui se trouve à 50 mètres. Toutefois, Mme Mariana C. a dit à l’ERRC qu’ils avaient peur d’aller y chercher de l’eau car alors des officiers de police les arrêtent parfois et les emmènent au commissariat. Ils les détiennent pendant des heures tard dans la nuit, accusés de voler de l’eau.561 Les familles sont venues dans ce bâtiment après avoir été violemment expulsées d’un autre campement, dans la ville voisine de Pierrefitte-sur-Seine, où ils vivaient dans des cabanes qu’ils avaient construits avec des matériaux de récupération. Les cabanes furent détruites par la police durant leur expulsion. De nombreux résidents dirent à l’ERRC qu’ils craignaient d’être bientôt expulsés de nouveau.562 Le propriétaire du bâtiment a lancé une procédure d’expulsion et un jugement a été rendu en sa faveur fin novembre 2004. L’ERRC a appris que les résidents ont expulsés en juin 2005. Apparemment, la police a envahi le bâtiment vers 5 heures du matin. Les résidents se sont vus ordonner de quitter le bâtiment immédiatement et n’ont même pas eu le temps 563
Le 24 mars 2004, l’ERRC a visité l’un des plus gros campements non autorisés de France situé rue de Surville, à Lyon (Surville).564 Environ 550 roms vivent là. Parmi eux, on compte 253 enfants dont 53 ans âgés de moins de trois ans. Ils viennent de Roumanie et de Yougoslavie et vivent dans ce bidonville entre l’autoroute et le chemin de fer. 77% des roms venant de pays de l’ex-Yougoslavie (33 familles) sont des demandeurs d’asile selon les termes de la Convention de Genève.565 Les résidents vivent soit dans de vieilles caravanes, la plupart n’ayant plus de roues et étant pleines de bosses et de trous, soit dans des cabanes construites avec des matériaux de récupération, du bois, du carton et des morceaux de vieux meubles. La plupart de ces matériaux sont des débris provenant de bâtiments démolis que des sociétés ont abandonné sur le site, ce qui est bien plus pratique pour eux que d’utiliser la décharge officielle. Les familles utilisent aussi ces débris comme combustible pour le chauffage. Des morceaux de carton servent à faire
561 Entretien de l’ERRC avec Mme. Mariana C., le 28 novembre 2004 à Villetaneuse.
562 Visite de l’ERRC au squat de Villetaneuse, le 28 novembre 2004.
563 Entretien de l’ERRC avec Mme. R.S., le 16 août 2005 à Paris.
564 Visite de l’ERRC à Surville, le 2 mars 2004.
565 Les personnes qui recherchent une protection en tant que réfugiés selon les standards définis par la Convention de Genève sur le statut des réfugiés et son protocole de 1967. Statistiques d’après : Alpil, Médecins du Monde et Secours Populaire. Sortir du bidonville...Enquête auprès des familles du bidonville de Surville. Rapport, 15 janvier 2004, p.6.279 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
« l’isolation ».566 Il n’y a ni eau courante ni toilettes et l’électricité vient de branchements de fortune au réseau électrique. La seule eau disponible est celle d’une borne d’incendie à quelques kilomètres de là. Les services de la ville ne daignent pas ramasser les ordures du camp, ce qui contribue à l’odeur nauséabonde de déchets en train de pourrir qui imprègne le campement, émanant de piles d’ordures éparpillées sur le site. Les rats sont également nombreux dans le camp, grouillant entre les ordures et les caravanes, ce qui présente de sérieux risques sanitaires pour les résidents. Il semblerait qu’un certain nombre d’enfants jouant dehors aient été mordus.
Dans un rapport sur les conditions de vie dans ce bidonville, un certain nombre d’associations non gouvernementales567 ont fait les commentaires suivants :
La présence d’enfants en bas âge dans un bidonville constitue un fait particulièrement choquant. Elle participe à la banalisation du sans-abrisme familial qui doit être combattue. Pour notre ville, cette banalisation est directement liée à la présence des roms dans l’agglomération lyonnaise. Avant 1995 il était impensable de trouver des enfants à la rue, sans-abri, dans notre ville. C’est seulement à partir du moment où il a été possible de dire : « Les tsiganes, c’est différent ! » que les faits ont été, sinon acceptés, tout au moins admis au titre de l’impuissance collective à agir. Il y a là une réelle régression de nos valeurs fondamentales de civilisations qui reposent sur l’égale dignité de tout être humain.568
Deux semaines après la visite de l’ERRC à Surville, les autorités locales ont pris conscience de l’existence du camp après que des petites filles ayant brûlé dans leur caravane aient fait les gros titres de la presse locale. Marianna et Simona, âgées respectivement de 14 et 17 ans ont été asphyxiées et brûlées vives par le système de chauffage improvisé qu’elles utilisaient. Les funérailles auraient été présidées par le cardinal de Lyon et des élus de différents partis politiques y auraient assisté.569 On a alors promis
566 Ibid, p. 10.
567 Alpil, Médecins du Monde, Secours Populaire.
568 Alpil, Médecins du Monde, Secours Populaire, Bidonville, p.8.
569 Des systèmes de chauffage improvisés similaires sont utilisés par de nombreux roms migrants . See Vanderlick, Benjamin. Une mondialisation par le Ban : Etude auprès des Roms en bidonvilles sur l’agglomération lyonnaise depuis 2001. Institut Lyonnais d’Urbanisme – Université Lumière Lyon 2 juin 2004. 280 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
de rendre les conditions de vie dans le camp plus humaines pour les familles y résidant. Les autorités du grand Lyon ont nettoyé une partie du site (700 tonnes d’ordures ont été enlevées) et installé deux robinets d’eau. Des logements ont été donnés à trois familles. Depuis, rien d’autre n’a été fait. Au lieu de cela les familles ont été soumises à un harcèlement policier constant, y compris des descentes régulières et fréquentes, des confiscations de véhicules et des destructions de caravanes. Conscientes qu’un arrêté d’expulsion serait bientôt exécuté contre elles, les familles qui le pouvaient se sont trouvé de nouveaux endroits où habiter – construisant de nouveaux bidonvilles ou trouvant refuge en squattant des bâtiments désaffectés. Les familles les moins mobiles sont restées : celles qui ont des enfants, des membres de leur familles âgés, malades, ou handicapés.570 Il reste environ 60 enfants sur les lieux. Ces familles ont été expulsées le 19 juillet 2004 au matin. Des hébergements d’urgence ont été donnés à certaines familles expulsées. Les autres, ensuite, se sont disséminées dans des squats ou ont créé de nouveaux campements autour de la région de Lyon.571
12.2 Une politique d’expulsions forcées incohérente
Selon toute probabilité, quand ce rapport sortira, la plupart des camps visités par l’ERRC auront disparu. Les résidents auront été expulsés et erreront jusqu’à ce qu’ils trouvent un nouvel endroit où camper ou squatter jusqu’à la prochaine expulsion. Beaucoup de roms migrants ont dit à l’ERRC que leur existence quotidienne était considérablement dégradée par le stress constant des expulsions à venir. Ils savent qu’à tout moment, la police peut venir les chasser et qu’ils risquent ainsi de perdre le peu de biens qu’ils possèdent et être sujets à des insultes et à des violences.
Au niveau national, les autorités françaises ont jusqu’à présent refusé de trouver une solution nationale humaine et cohérente à la question de l’hébergement de roms migrants sur le territoire français. Au lieu de cela, on laisse chaque préfet572 se débrouiller comme
570 Patrick ODIARD. « Bidonvilles a Lyon : un moment d’émotion est si vite passé ! », Alpil, 29 juin 2004, disponible à l’adresse suivante : http://www.gauches.net/article1288.html. M. Odiard était adjoint au Maire du 8ème arrondissement de Lyon, délégué à l’action sociale au moment de l’écriture de cet article.
571 E-mail au forum internet Romeurope de la part de l’ONG Alpil, « Fin du bidonville de Surville », 19 juillet 2004.
572 Le Préfet est le représentant du 1er ministre et de tous les ministres dans le département et agit donc comme une courroie de transmission entre l’Etat, le gouvernement et le département. 281 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
il l’entend avec un problème qui est surtout perçu comme devant être certes repoussé mais jamais résolu.573 Du fait du racisme anti-tsiganes qui se développe localement, la solution la plus souvent appliquée par les autorités locales est l’expulsion rapide des roms migrants installés sans autorisation dans des camps ou des squats. Les autorités chassent donc les roms de là où ils sont, les forçant à errer d’un lieu à un autre, chaque fois de plus en plus délabré, jusqu’à ce qu’ils trouvent un nouvel endroit où résider pour une courte période.574 De même, la grande majorité des communes ont adopté une politique à courte vue du « où vous voulez mais pas chez moi » : elles réagissent aux conditions de vie indécentes des roms migrants sur leur territoire en les expulsant.
Quelques communes (telles qu’Achères, Saint-Denis, Choisy-le-Roi, Vitry-sur-Seine, Bonneuil et Saint-Michel-sur-Orge) ont accepté d’accueillir un certain nombre de familles sur leur territoire. En Ile-de-France,575 où on estime le nombre de roms migrants à 3 000 personnes, de tels projets de logements ont bénéficié au maximum à 250 personnes. De plus, dans la Ville de Lieusaint les autorités locales et nationales coopèrent afin de mettre en place un projet d’intégration dont 35 familles (soit environ 150 personnes) devraient bénéficier.576 Toutefois, ce sont là des situations exceptionnelles qui ne concernent qu’une petite minorité de roms migrants en France.577
M. Albert Lévy, un magistrat du Parquet de Lyon, a fait les commentaires suivants : « La logique à court terme qu’ils appliquent tous, c’est : chez les autres mais pas chez moi ! Cette logique est celle du serpent qui se mord la queue, parce que les gens qui ont été expulsés à Grenoble le seront ensuite de Lyon, et ainsi de suite. »578
573 Collectif national droits de l’homme Romeurope. Compte rendu rencontre Monsieur Jean de L’Hermitte au Ministère de l’intérieur le 16 Juillet 2004. November 9, 2004, distribuée par e-mail à la mailing liste de Romeurope.
574 Voir collectif national droits de l’homme Romeurope. Les Rroms Migrants : La répression et la précarité continuent malgré les discours ministériels. September 6, 2004, distribuée par e-mail à la mailing liste de Romeurope
575 Les villes citées ci-dessus font toutes partie de la région Ile-de-France qui inclut les départements entourant Paris.
576 Entretien de l’ERRC avec M. Michel Févre, représentant du comité de soutien des roms du Val-de-Marne, le 6 avril 2005, à Paris.
577 Voir Collectif national droits de l’homme Romeurope. Note de Synthèse sur l’Accueil des roms Migrants en France. 9 novembre 2004, distribuée par e-mail à la mailing liste de Romeurope.
578 Entretien de l’ERRC avec M. Albert Lévy, le 26 mars 2004 à Lyon. 282 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
La plupart des roms migrants se trouvent donc pris dans un cycle d’expulsions, chassés d’une commune à l’autre, pour finir par retourner d’où ils ont été chassés en premier lieu car ils n’ont pas d’autre endroit où aller. La majorité des roms migrants rencontrés par l’ERRC subissent environ sept ou huit expulsions par an, parfois plus. Par exemple, Mme C.S., 24 ans, a dit à l’ERRC qu’en 2003, elle avait vécu en 14 endroits différents. « Parfois les expulsions ont lieu tous les jours », a-t-elle dit. « On était chassés si souvent que l’on n’en dormait plus »579 M. Niku C. a dit à l’ERRC qu’il avait été expulsé 50 ou 60 fois depuis 1999. La plus longue période pendant laquelle il a pu rester au même endroit a été de huit ou neuf mois.580 Mme. Loredana B. a vécu avec ses parents en 12 ou 13 lieux différents ces deux dernières années. Elle a dit à l’ERRC que ça avait été particulièrement stressant pour son père, qui est cardiaque.581
12.3 La police se conduit de manière abusive lors des expulsions
Les recherches de l’ERRC indiquent que lors des expulsions de roms migrants, les autorités de maintien de l’ordre françaises se comportent fréquemment de manière abusive. De manière typique, les descentes de police ont lieu tôt le matin et sont conduites par un grand nombre de policiers armés et en tenue de combat. Les policiers réveillent les habitants en tapant sur les caravanes, les cabanes ou les portes des appartements. Ils contrôlent en général les identités des habitants et procèdent à des arrestations collectives. On ordonne alors à ceux qui restent de quitter les lieux, leur laissant très peu de temps pour rassembler quelques affaires. Ceci signifie généralement que ces familles laissent sur les lieux un certain nombre d’objets personnels. Parfois le campement est très rapidement rasé, détruisant ainsi les caravanes, les cabanes et tout ce qui se trouvait dedans.
Peu après 6 h du matin, le 14 avril 2003, des centaines d’agents de police ont fait une descente dans le squat de la rue Paul Doumer à Montreuil où vivaient depuis un an environ 150 roms migrants.582 Mme Lali Gheorlan, membre du Comité de Soutien
579 Entretien de l’ERRC avec Mme. C.S., le 15 février 2004 à Paris.
580 Entretien de l’ERRC avec M. Niku C., le 28 novembre 2004 à Villetaneuse.
581 Entretien de l’ERRC avec Mme. Loredana B., le 11 avril 2004, Le Bourget. Initial du nom de famille mise par l’ERRC afin de protéger l’anonymat de la personne interrogée.
582 Les premiers habitants sont arrives dans le squat en septembre 2001. 283 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
des Roms de Montreuil, a dit à l’ERRC qu’il y avait cinq ou six policiers pour chaque rom vivant là. Ils ont ordonné à tous les habitants de sortir de l’immeuble, ont séparé les hommes, les femmes et les enfants et les ont alignés contre le mur. Ils ont fait des fouilles au corps complètes de tous les habitants, jeunes enfants y compris. Mme Argentina Anguel a raconté au Comité de Soutien des Roms de Montreuil que la police a même fouillé les couches de son petit-fils, âgé d’à peine quelques semaines. On a juste laissé aux habitants le temps de rassembler quelques affaires, généralement des vêtements ; ils ont laissé derrière eux couvertures, tapis, meubles, appareils électroménagers et tout ce qu’ils ne pouvaient transporter. A 10 h du matin, tous les habitants du squat étaient partis. A la fin de la matinée, les bulldozers ont détruit l’immeuble ainsi que les petites cabanes dans lesquels avaient vécu les roms migrants, détruisant par la même les biens abandonnés.583
Après vérification de l’identité de tous les habitants, la police a procédé à une arrestation collective, arrêtant 52 personnes afin de les expulser vers la Roumanie, certains d’entre eux étant encore dans la période de validité de leur visa de trois mois. Finalement, neuf personnes ont été déportées, six adultes et trois enfants, y compris deux femmes enceintes et un homme dont la femme gravement malade est restée en France.584 Différentes cours françaises ont ordonné que les 43 personnes détenues soient relâchées pour des raisons diverses.585 Mme. Lali Gheorlan a informé l’ERRC qu’elle avait ensuite rencontré Mme. Stava – l’une des femmes expulsée vers la Roumanie qui était alors enceinte – à Sepreus, en Roumanie. A son retour en Roumanie, Mme Stava s’est vue interdire de quitter le territoire pendant cinq ans.586
Une autre descente de police très médiatisée a eu lieu le 3 décembre 2002 dans la ville de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne), juste au sud de Paris. M. Nicolas Sarkozy, alors Ministre de l’Intérieur, a visité la ville en octobre 2002 et a entrepris « l’engagement de traiter l’ensemble de la question des campements sauvages de
583 Entretien de l’ERRC avec Mme. Lali Gheorlan, le 31 mars 2005 à Paris.
584 Le Collectif de soutien aux Rroms de Montreuil. « Situation le 20 avril ». Disponible sur Internet à l’adresse : http://montreuil.rrom.org.
585 Le Collectif de soutien aux Rroms de Montreuil. « Lundi le 21 avril 2003 Roms expulsés de Montreuil : 8ème jour a la Maison ouverte, 17 rue Hoche (Métro Mairie de Montreuil) ». Disponible sur Internet à l’adresse suivante : http://montreuil.rrom.org.
586 Entretien de l’ERRC avec Mme. Lali Gheorlan, le 31 mars 2005 à Paris. 284 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
roms dans le Val-de-Marne d’ici à la fin novembre. »587 Le 4 novembre 2002, le célèbre Abbé Pierre a à son tour choisi le bidonville rom de la « Voie des Roses » à Choisy pour y faire une déclaration dénonçant la Loi pour la Sécurité Intérieure588 et pour demander des conditions de vie et d’accueil décentes pour les roms.589
Vers 6 h du matin, le 3 décembre 2002 aux moins 450 agents de police (gendarmes et CRS) en tenue de combat ont fait une descente au campement de fortune de la Voie des Roses, foyer d’environ 200 personnes, ainsi que dans le squat et le campement de fortune voisin de la rue de Sébastopol, où vivaient environ 60 personnes.590 Ces deux descentes de police étaient clairement des démonstrations de la volonté de M. Sarkozy de chasser les migrants roms du territoire français.
Le voisinage fut complètement bouclé durant cette descente et l’accès fut interdit aux associations non gouvernementales et aux journalistes, y compris aux médecins de l’ONG Médecins Du Monde qui souhaitaient porter secours à des individus malades. D’après MDM : « Les agents de Police sont arrivés en criant et ont tapé sur les caravanes avec leurs matraques ; les enfants ont été tirés de leur lit pendant leur sommeil et les habitants n’ont été autorisés qu’à prendre un ou deux sacs poubelles avec leurs affaires dedans ; les caravanes ont été comptées, marquées, puis détruites… »591
M. Michel Fevre, membre du Comité de soutien des roms du Val-de-Marne, a dit à l’ERRC que la Police avait trié les habitants, distinguant ceux qu’ils pensaient être en situation régulière et les autres. Ceux qui étaient suspectés d’être en situation irrégulière ont immédiatement été arrêtés. « Parfois, dans une famille, les parents et les enfants étaient séparés par ce procédé » a dit M. Fevre. Il a souligné que ce n’était pas qu’une expulsion mais aussi une arrestation collective.592
587 Libération « Sarkozy chasse les roms de Choisy-le-Roi ».le 04 décembre 2002.
588 Loi du 18 March 2003 pour la Sécurité Intérieure.
589 Weisberger, Laura et Annabelle Quenet. « Objet : expulsion de Roms à Choisy le Roi. » Le 03 décembre 2002, disponible sur Internet à l’adresse suivante : http://montreuil.rrom.org.
590 Entretien de l’ERRC avec M. Michel Fèvre, le 06 avril 2005 à Paris
591 Médecins du Monde. Mission Banlieue, Rapport d’activité. 2002, p. 48.
592 Entretien de l’ERRC avec M. Michel Fèvre, le 6 avril 2005 à Paris285 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
Le même jour, les forces de police ont aussi expulsé environ 60 personnes d’un autre site, près de Rungis.593 Environ 71 habitants ont été détenus et se sont vus intimer l’ordre de quitter le territoire français. Quatre personnes ont été renvoyées par avion en Roumanie le jour suivant dans un charter franco-espagnol. Les autres expulsions du territoire français n’ont pas eu lieu, ayant été invalidées par les tribunaux français.594
Fin novembre 2004, l’ERRC a rencontré un groupe de roms à Aubervilliers qui avaient été récemment expulsés d’un campement de fortune au Bourget où ils avaient habité pendant un mois et demi. Mme. P.L., 30 ans, a dit à l’ERRC qu’à 5 h du matin début novembre 2004, environ 200 policiers armés étaient arrivés dans le campement avec des chiens policiers. Il y avait environ 100 personnes à ce moment-là dans le campement, y compris une cinquantaine d’enfants. La police les a encerclés et a réveillé les habitants en tapant à coups de poings et de matraques sur les caravanes. Ils ont ordonné à tous les habitants de quitter immédiatement les lieux et sont restés là jusqu’à ce que tous les habitants soient partis. Mme P.L. a montré à l’ERRC de nombreuses caravanes arrêtées à Aubervilliers qui avaient des trous, des bosses et des vitres brisées, ce qui d’après elle résulte du comportement de la police pendant cette expulsion. Mme. P.L. a aussi dit à l’ERRC qu’elle croit que sa belle-mère est morte du fait du stress induit par cette expulsion. Certains enfants allaient à l’école au Bourget, l’expulsion a mis fin à leur scolarité.595
Ces exemples ne sont qu’une sélection de ce qui apparaît comme étant des pratiques policières fréquentes, vu qu’il paraît des rapports d’expulsion abusive tous les deux ou trios mois.
12.4 Un harcèlement policier visant à expulser les roms
En plus de ces expulsions, la Police applique régulièrement une méthode plus indirecte afin de forcer les migrants roms à quitter les lieux où ils résident. Ceci consiste
593 Médecins du Monde. Mission Banlieue, Rapport d’activité. 2002, p. 48. Médecins du Monde – Ligue des Droits de l’Homme. Les Roms Dossier Presse. May 2003, pp. 18-19.
594 Damiens, Caroline. «Sarkozy, les médias et l’invention de la mafia roumaine.» 17 mars 2005, publié en deux parties sur Internet, sur le site « Les Mots sont importants » à l’adresse suivante : http://lmsi.net/article.php3?id_article=356 et http://lmsi.net/article.php3?id_article=357. Voir aussi Médecins du Monde, Ibid., p. 48.
595 Entretien de l’ERRC avec Mme. P.L, le 28 novembre 2004, à Aubervilliers. 286 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
à soumettre les habitants roms à de constantes menaces, fouilles, destructions de propriété et autres formes de harcèlement.596
Par exemple, les migrants roms qui vivent dans un squat de Villetaneuse connaissent un harcèlement policier régulier. Les policiers entrent dans les appartements des habitants plusieurs fois par semaine pour les fouiller. Les habitants ont dit à l’ERRC que la police vient dans le squat deux à trois fois par semaine, parfois durant la journée et parfois la nuit. Mme. Mariana C. a dit : « La police vient même à 1 h du matin. Elle frappe aux portes, nous réveille, vient dans nos chambres et fouillent tout… Parfois, lorsque nous allons mendier ou vendre des objets, nous ne sommes pas là. Et alors, lorsque l’on revient, on découvre que les portes de nos appartements ont été fracturées. La police vient souvent. On ne verrouille plus nos portes car la police les fracture. »597 M. Dumitru C. a ajouté que quand les policiers voient qu’il n’y a personne, ils entrent et cherchent tout de même. Le téléphone mobile de Dimitru C. a récemment été confisqué par la police durant une fouille en sa présence. Les policiers lui ont demandé une facture prouvant qu’il avait bien acheté son téléphone, facture qu’il n’avait plus.598 D’après un autre habitant, M. Niku C., lorsque les habitants sont là, la police les fait parfois sortir pendant les fouilles. Il a aussi dit : « Parfois ils nous menottent. Une fois ils m‘ont emmené au poste de police, m’ont gardé deux heures puis m’ont laissé sortir. »599
La Police harcèle aussi les habitants lorsqu’ils vont chercher de l’eau à la borne d’incendie. Mme. Mariana C. a dit à l’ERRC : « Lorsque l’on va chercher de l’eau, si la police nous voit, on est emmenés au poste de Police. Ils nous gardent plusieurs
596 Le collectif national des droits de l’homme Romeurope, fédérant un grand nombre d’associations non gouvernementales et de comités de soutiens locaux qui suivent la situation des migrants roms en France depuis de nombreuses années, a publié les commentaires suivants en novembre 2004 : « Il existe une autre manière assez régulièrement employée pour faire partir les roms d’un terrain ou d’un squat sans avoir recours aux procédures légales : les forces de l’ordre viennent tous les jours, parfois plusieurs fois, sur les terrains, leur font savoir qu’elles doivent quitter les lieux, procèdent à d’innombrables contrôles de papiers, voire à des fouilles. Les roms n’ont pas les moyens de distinguer ces « intimidations » des véritables expulsions. Devant ces harcèlements et ces ultimatums menaçants, les familles finissent par quitter les lieux.» Collectif national droits de l’homme Romeurope. Note de Synthese sur l’accueil des Roms migrants en France. November 9, 2004. .
597 Entretien de l’ERRC avec Mme. Mariana C, le 28 novembre 2004, à Villetaneuse.
598 Entretien de l’ERRC avec M. Dumitru C., le 28 novembre 2004 à Villetaneuse.
599 Entretien de l’ERRC avec M. Niku C., le 28 novembre 2004 à Villetaneuse.287 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
heures, parfois jusqu’à minuit… Ils nous demandent : « Pourquoi volez-vous de l’eau ? L’eau, ça se paye. »600 C’est apparemment là une pratique régulière. Une semaine avant une visite de l’ERRC au squat, mi-novembre 2004, les filles de Mariana C, âgées de 13 et 15 ans, ont été placées en détention vers 16 h et libérées vers 23 h. Quand les filles ont demandé à rentrer chez elles, disant à la police que leur mère ne savait pas où elles étaient et allait s’inquiéter, les policiers auraient répondu : « Non, vous ne pouvez pas rentrer chez vous, parce que vous avez volé de l’eau ». Les filles ont aussi dit que le policier aurait fait cette remarque : « Vous êtes des gitans – rentrez chez vous. »601
Lorsque l’ERRC a visité le squat de Surville à Lyon le 24 mars 2004, les associations non gouvernementales Alpil602 et MDM ont dit à l’ERRC que, ces trois derniers mois, la police avait fait une descente par semaine dans le camp, confisquant et détruisant voitures et caravanes.603 Des descentes ont eu lieu les 3, 11 et 18 mars 2004. A chaque fois, plus de 100 policiers sont venus. Tout véhicule non proprement immatriculé en France était soit détruit sur les lieux à l’aide d’explosifs, soit saisi. Les habitants du camp ont dit à l’ERRC que les policiers ont contrôlé tout le monde, qu’ils ont contrôlé les papiers d’identité et ceux des véhicules. Si un document manquait, où n’était pas exactement comme il aurait dû l’être, le véhicule était saisi ou détruit. De nombreuses personnes ont perdu leur voiture et certains leurs foyers durant ces descentes. En fait, un certain nombre de vieilles caravanes qui n’avaient plus de roues et qui donc servaient uniquement de logement ont été également détruites, sous prétexte qu’elles n’auraient pas eu de plaques d’immatriculation.
Un journaliste du journal Le Progrès, qui a assisté à la descente de police du 11 mars a rapporté que 17 véhicules auraient été détruits et que la police a procédé à des vérifications sur 7 autres qui auraient été saisis.604 Cinq personnes ont également été arrêtées puis libérées. Un des véhicules détruit était le camion d’une famille bosniaque qui était arrivée là la nuit même. Leur moyen de transport détruit, ils se sont
600 Entretien de l’ERRC avec Mme. Mariana C., le 28 novembre 2004 à Villetaneuse.
601 Entretien de l’ERRC avec Mme. L.C. et Mme. B.C., le 28 novembre 2004 à Villetaneuse. Première initiale attribuée par l’ERRC de manière à préserver l’anonymat des familles.
602 Action pour l’insertion sociale par le logement.
603 Entretien de l’ERRC avec M. Nicolas Molle, coordinateur de projet à l’ Alpil, le 24 mars 2002 à Lyon.
604 « Lyon 7e : 17 véhicules détruits dans le squat de Surville ». Le Progrès, March 13, 2004. 288 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
trouvés coincés à Lyon.605 Lors de la descente du 18 mars, la police aurait arrêté une femme avec un bébé de 4 mois et saisi sa caravane. En plus de perdre son abri, cette femme ne pu allaiter au sein son bébé pendant sa détention, le bébé étant resté au camp avec sa jeune soeur. Ces descentes abusives et cruelles qui ont dépossédé ces gens du peu de biens qu’il leur restait étaient spécifiquement destinées à les intimider afin de leur faire quitter le bidonville. Considérant le statut de demandeur d’asile des gens vivant là, ces actions constituent une sévère violation de la Convention de Genève relative au Statut des réfugiés.
Dans un autre exemple particulièrement significatif, des agents de la Surveillance Générale (SUGE) de la police de la Société Nationale des Chemins de fer Français (SNCF) ont harcelé des habitants d’un squat de Saint Denis, pour la plupart des Algériens et des roms, et ce à plusieurs reprises pendant une période de six mois, en 2003. Environ 200 personnes vivaient dans divers bâtiments inoccupés et des wagons abandonnés sur un terrain non utilisé appartenant à la SNCF.606 A plusieurs reprises, un groupe de cinq agents sont venus dans le squat, ont commis des actes de vandalisme sur les biens des habitants, les ont maltraités et les ont menacé de violences plus graves s’ils ne quittaient pas les lieux.
M. Dan Eugen Utu, 32 ans, a raconté ce qu’il a vécu lors de plusieurs de ces exactions. A 3 h 30 du matin, une nuit de fin juin ou de début juillet 2003, cinq agents de la police du rail sont venus dans le bâtiment dans lequel il vivait. Il a raconté qu’« ils ont cassé les portes et versé de l’eau et du café dans les lits. Ils nous ont menacé et nous ont dit de partir. Ils ont fait sortir tout le monde. Ils ont frappé un Arabe après lui avoir dit qu’ils le connaissaient de la Gare du Nord. Lorsqu’ils ont quitté le squat, ils l’ont gazé… L’agent qui l’a gazé a menacé de kidnapper la fille de ma soeur. » Il a décrit un autre incident qui s’est produit une nuit de septembre ou d’octobre 2003 : « Un agent de la police ferroviaire inconnu, costaud, gros, enveloppé, châtin blond, à moitié chauve est rentré chez moi. Il a cassé une table. Il m’a poussé dehors avec violence. Un autre policier attendait dehors. Il m’a obligé de rester, les mains derrière le dos debout. » M. Utu est unijambiste.
M. Utu a dit que les mêmes cinq policiers qui étaient venus au squat fin juin étaient revenus durant la nuit du 30 novembre 2003 :
605 Bertrand, Olivier. „Roms en stationnement gênant à Lyon« . Libération, le 16 mars, 2004.
606 Commission Nationale de Déontologie de la Securité, procès-verbal d’audition M. Didier Inowlocki, 23 Novembre 2004, Paris. 289 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
J’entends une porte cassée. J’ouvre la porte de ma chambre. Je dis « bonsoir vous ici, il fait froid la nuit et je suis malade. » Un policier barbu répond « Ca ne m’intéresse pas, je sais tout » Trois d’entre eux sont devant ma chambre, avec des matraques. Le policier barbu en premier, un agent blond en deuxième, et le troisième portait des lunettes. L’agent barbu casse la porte et casse une table avec la cuisinière, lacère le papier peint avec un couteau. Il arrache aussi le papier qui bouche la fenêtre. Les deux autres regardent. Ils disent qu’ils vont mettre une bombe ici si on ne part pas. Puis ils sortent. En tout cela dure 3 minutes.
Les policiers sont aussi revenus le lendemain soir, le 1er décembre. M. Utu a dit qu’il dormait quand il a entendu quelqu’un crier : « Police ! ». Il a ouvert la porte et a donné son passeport aux policiers ainsi qu’un certificat médical indiquant qu’il avait un rendez-vous pour se faire mettre une prothèse. L’agent barbu lui a dit : « Caca, fils de pute. » M. Utu décrit ainsi ce qui s’est passé ensuite : « L’agent barbu fait tomber le poêle par terre. Il fait tourner sa matraque. Il met du café et de la nourriture par terre dans la pièce. La pièce est comme une poubelle. Je sors dans la rue avec ma femme… Quand je sors, l’agent barbu ouvre la bouteille de gaz. Nasser607 aussi est sorti. Le comité de soutien arrive à ce moment-là. »608
M. Didier Inowlocki du Comité de Soutien des Roms de Saint Denis est l’un des quatre membres du Comité de Soutien arrivé sur les lieux vers environ 2 h 15 du matin la nuit du 1er décembre 2003. Il a dit à l’ERRC : « Lorsque on est arrivé au squat on a vu des gens apeurés, des hommes et des femmes en larmes. On a vu des portes cassées, des matelas imprégnés de lait ou de café, des meubles renversés. Et on a vu les agents de la police ferroviaire, ils étaient cinq. Ils étaient toujours cinq lors de ces incidents et ils étaient en service. Les membres du Comité de Soutien ont appelé la Police Nationale. Des agents sont arrivés, avec un responsable de la SNCF.609 Mme Gwenaëlle Cavaro, un autre membre du Comité de Soutien a dit que le responsable de la SNCF avait reconnu la nature illégale des actes de ses collègues et a dit que des mesures seraient prises.610
607 Un autre habitant.
608 Témoignage de Dan Eugèn Utu devant le Comité de Soutien des Roms de Saint-Denis destiné à être utilisé dans le cadre de procédures judiciaires, le 7 décembre 2003.
609 Entretien de l’ERRC avec M. Didier Inowlocki, le 2 avril 2005, à Paris.
610 Témoignage de Mme Gwanaëlle Cavaro. 290 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
M. Inowlocki a informé l’ERRC qu’en avril 2005, les agents impliqués dans ces actes avaient été démis de leurs fonctions mais qu’aucune sanction n’avait été prise contre eux. Il pense qu’ils ont dû être mutés vers d’autres postes au sein de la SNCF. Il a fait observer qu’une plainte avait été déposée et qu’une enquête avait été ouverte.611
Quelques mois plus tard le 05 mai 2004, une descente de Police a eu lieu dans le squat vers 6h du matin. Une centaine d’agents de police armés (CRS) sont venus expulser les habitants.612
12.5 On refuse aux migrants roms les moyens nécessaires à leur survie
Les migrants roms qui sont en France, quelque soit leur statut administratif, n’ont pas le droit de travailler. De plus la grande majorité des roms migrants ne reçoit pas d’aide de l’Etat. Ils doivent donc trouver des moyens de survie alternatifs. Seules les personnes officiellement reconnues comme demandeurs d’asiles reçoivent une aide financière minimale durant un temps limité. Toutefois étant donné qu’il y a des périodes durant lesquelles ces demandeurs d’asile ne reçoivent aucune aide, ou durant lesquelles cette aide est insuffisante, les demandeurs d’asile aussi doivent trouver d’autres sources de revenu pour survivre.
Très peu de roms migrants semblent arriver à trouver du travail au noir. Quelques-uns essayent de gagner un minimum d’argent afin de répondre à leurs besoins de base en vendant des fleurs, des journaux, en lavant les voitures ou en jouant de la musique. Une majorité semble mendier.613 Les autorités françaises, toutefois, soumettent les migrants roms qui se livrent à ces différentes activités à des abus réguliers et à un harcèlement qui remet en cause leur capacité à gagner leur vie, même de manière minimale.
Tous les migrants roms avec lesquels l’ERRC a parlé et qui ont mendié, à l’exception d’une femme d’environ 70 ans, ont témoigné que lorsqu’ils mendient,
611 Entretien téléphonique de l’ERRC avec M. Didier Inowlocki, le 2 avril 2005 à Paris.
612 Entretien téléphonique de l’ERRC avec M. Didier Inowlocki, le 2 avril 2005 à Paris.
613 Voir Médecins du Monde – Ligue des Droits de l’Homme. Les Roms Dossier Presse. May 2003. Voir aussi Collectif national droits de l’homme Romeurope. Note de Synthese sur l’accueil des Rroms Migrants en France. 9 novembre 2004, distribuée par email à la mailing liste de Romeurope.291 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
ils sont la proie d’abus et de harcèlements réguliers de la part de la police. L’ERRC a reçu des rapports détaillant différents types de conduites abusives à l’encontre des migrants roms, y compris insultes racistes, vol ou séquestration de leur argent, destruction de leurs papiers d’identité, violences physiques et détentions abusives. Les migrants roms qui mendient courent également le risque d’être arrêtés et déportés sous prétexte qu’ils n’ont pas de ressources suffisantes pour rester en France qu’ils soient ou non en situation régulière.614
Mme. A.S., 28 ans, a décrit des cas d’abus physique dont elle a souffert lorsqu’un groupe de policiers l’a prise en train de mendier à la station de métro parisienne Invalides en décembre 2003. Elle a été emmenée dans une petite pièce par les quatre ou cinq agents. Elle a dit à l’ERRC qu’elle ne savait pas si les agents étaient des agents de la police municipale ou des agents de sécurité de la RATP615 (privés). A.S. était enceinte à l’époque. Deux agents l’ont frappée aux chevilles et au ventre. Elle a dit qu’elle avait tenté d’arrêter le passage à tabac en disant : « pourquoi vous me frappez ? Vous n’avez pas le droit, je suis enceinte ». Les agents auraient répondu en la frappant encore plus fort. Au bout de quelques minutes, ils ont cessé de la battre et les agents l’ont jetée dehors.616
Un autre cas de conduite policière abusive a eu lieu à Créteil, près de Paris, en avril 2004. Mlle. A.V., 617 14 ans, mendiait devant un magasin Carrefour quand deux agents l’ont approchée. Elle a dit que les agents lui ont montré leurs cartes, lui ont dit qu’elle ne devrait pas mendier et lui ont ordonné de leur donner son argent. Les policiers l’ont ensuite frappée au dos et au visage avec leurs matraques. Quand l’ERRC a rencontré A.V., elle n’était en France que depuis trois mois et avait déjà été mise en détention sept fois. Elle était arrêtée parfois parce qu’elle n’était en France que depuis trois mois et avait déjà été mise en détention sept fois, parfois parce qu’elle n’avait pas de ticket de métro, d’autres fois parce qu’elle mendiait.618
614 Voir plus bas, la section 12.10, Les roms migrants, cibles privilégiées des déportations.
615 La société qui gère le Métro Parisien.
616 Entretien de l’ERRC avec Mme. A.S., le 02 mai 2004, à Aubervilliers.
617 Les initiales ont été attribuées par l’ERRC afin de respectée la volonté de la personne interrogée de rester anonyme.
618 Entretien de l’ERRC avec Mme. A.V, le 02 mai 2004, Le Bourget. 292 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
En juillet 2004, la police a gardé en détention trois adolescents roms qui mendiaient ensemble sur la ligne 10 du métro parisien. Mlle Veta K., quinze ans, a dit à l’ERRC qu’elle avait été gardée 24 heures en détention et que pendant ce temps on ne lui avait rien donné à manger. Elle a dit qu’elle avait été frappée à coups de matraque aux pieds, aux épaules et au dos. Mlle. L.C., 14 ans, a dit qu’elle avait littéralement été traînée dans la voiture de police puis au commissariat. Elle a dit que durant sa détention, deux agents de police l’ont frappée. L’un d’eux lui a dit : « Arrête de mendier, si je te revois mendier je te frapperai plus fort. » L.C. et Veta K. ont toutes deux dit à l’ERRC que pendant qu’ils les frappaient l’un des agents leur a dit : « Vous êtes de sales gitans ».619
Voici un autre exemple significatif : M. D.K.620 est un rom de 18 ans, il mendie souvent près du canal du Midi, à Toulouse. Il a raconté à l’ERRC que des agents de Police passaient fréquemment, lui ordonnaient de leur donner son argent et le jetait dans l’eau. En trois occasions, quelques jours avant une visite de l’ERRC le 09 mars 2004, des policiers l’ont emmené dans leur voiture, l’ont conduit assez loin puis l’ont jeté dehors, le laissant retrouver son chemin pour rentrer chez lui. Il a dit que lors d’une occasion plus récente, il avait été emmené ainsi à 50 kilomètres avant d’être jeté dehors. Il a dû rentrer à pieds car il n’avait ni argent ni téléphone ni moyen de transport. D.K a aussi dit à l’ERRC qu’une autre fois, quelqu’un de gentil lui avait donné des vêtements neufs. Les policiers ont vu les vêtements, l’on accusé de les avoir volés et les ont pris. Le 09 mars 2004, D.K. a été détenu pour mendicité à quatre reprises, la fois la plus récente étant deux semaines plus tôt. En cette occasion, il a été conduit au poste de police du boulevard de la Marquette près de là où il mendiait. Il aurait été gardé quatre jours, sans rien à boire ni à manger et uniquement autorisé à aller aux toilettes deux fois par jour. Il a été gardé dans le sous-sol du commissariat, dans une petite pièce étroite sans lumière.621
La mère du garçon, Mme L.K. a raconté qu’elle a été détenue quatre fois, dont une fois aussi pendant quatre jours. Elle estime qu’au moins quatre à cinq fois par mois, une personne de leur campement de 10 caravanes (soit environ 40 personnes), peuplées de migrants roms, est détenu.622
619 Entretien de l’ERRC avec Mme. L.C. et Mme. Veta K., le 11 avril 2004, Le Bourget.
620 Les initiales ont été attribuées par l’ERRC afin de préserver l’anonymat que M.D.K. désirait conserver.
621 Entretien de l’ERRC avec M. A.D., le 9 mars 2004, à Toulouse.
622 Entretien de l’ERRC avec Mme L.K., le 9 mars 2004 à Toulouse. 293 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
Mme. Irena Szabo, comme beaucoup de roms migrants, ne mendie plus car elle a peur des exactions policières. Elle a dit à l’ERRC : « Les policiers déchirent nos papiers et nous frappent. Les policiers nous battent beaucoup. Dans le métro, les policiers nous soulèvent par le col et nous frappent dans les côtes. Ils ont déchiré l’extrait de naissance de mon fils. »623
L’ERRC a rencontré au moins dix musiciens qui essayent de gagner un minimum d’argent en jouant de la musique dans le métro parisien. Tous ont été victimes de harcèlement, de destruction de leurs instruments et d’abus de la part des agents de sécurité de la RATP ou de policiers.
M. Cosmin N. constitue un cas typique, il jouait de l’accordéon sur la ligne 13 du métro parisien début février 2004. Il n’a pas vu que les agents de sécurité de la RATP étaient entrés dans la rame de métro dans laquelle il jouait. Quand il s’en est rendu compte il a arrêté de jouer, mais deux agents s’étaient déjà approchés de lui. Les agents l’ont escorté hors du métro à la station suivante. Là, ils l’ont emmené dans des toilettes, l’ont frappé dans les côtes et on déchiré le soufflet de son accordéon. Ils lui ont crié dessus mais il n’a pas pu comprendre ce qu’ils disaient car il ne parle pas français.624
Un autre cas typique : mi-avril 2004, M. G.M. a été arrêté par la Police alors qu’il jouait de l’accordéon dans le métro parisien. G.M. a raconté qu’il avait été approché dans la rame de métro par quelques agents qui lui ont dit : « Vous n’avez pas le droit de jouer de la musique ou de chanter dans le métro ». Il a alors été arrêté et détenu dans un commissariat parisien pendant deux jours. Il a été gardé dans le sous-sol du poste de Police, dans une pièce sans lumière, avec un banc de métal mais sans de couverture. On ne lui a rien donné à manger pendant deux jours. Il a dit à l’ERR C : « Ils mélangent les musiciens et les voleurs roumains, ne font aucune distinction et on a tous été renvoyés en Roumanie. »625
Des résultats d’enquête corroborant les découvertes de l’ERRC sont cités dans un rapport de la « Commission nationale sur les rapports entre les citoyens et les
623 Entretien de l’ERRC avec Mme Irena Szabo, le 2 mai 2004 à Aubervilliers. L’extrait de naissance a été déchiré aux environs de septembre 2003.
624 Entretien de l’ERRC avec M. Cosmin N., le 15 février 2004 à Aubervilliers.
625 Entretien de l’ERRC avec M. G.M., le 02 mai 2004, à Aubervilliers.294 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
forces de sécurité, sur le contrôle et le traitement de ces rapports par l’institution judiciaire ».626 M. Malik Salemkour, a participé pour le compte de l’organisation non gouvernementale LDH aux enquêtes de la Commission dans le cadre des rapports concernant les mauvais traitements subis par les musiciens. Il a dit à l’ERRC qu’il avait personnellement eu des entretiens avec 14 personnes, de 5 groupes de musiciens différents. Ses entretiens ont révélé plusieurs cas dans lesquels ces musiciens jouant dans le métro parisien ont été battus par des agents de police dans des locaux techniques du personnel de la RATP. Les passages à tabac comportent des claques et des coups, et même un cas d’abus sur un garçon mineur, un rom de 17 ans. Plusieurs musiciens roms avec qui ont eu lieu des entretiens ont aussi dit que leurs instruments avaient été pris ou cassés par la Police.627
L’un de ces cas, cité dans le rapport de la Commission, a eu lieu en octobre 2003. Cinq roms de Roumanie (trois accordéonistes, un saxophoniste et un percussionniste) sont entrés dans une rame du métro pour jouer de la musique. Six ou sept agents de police accompagnés de contrôleurs de la RATP sont entrés dans la rame et ont interpellé les musiciens. Les musiciens ont été conduits vers un local technique exigu appartenant à la SNCF. Leurs instruments ont été déposés par terre et les cinq hommes ont été mis face au mur, les mains sur la tête. Les policiers ont procédé à une fouille musclée avec palpation. Tous les cinq ont dû présenter leurs documents de séjour et vider leurs poches. L’agent dirigeant les opérations a pris leur argent, une somme d’environ 70€. On leur a dit de manière menaçante qu’ils feraient mieux de ne pas être de nouveau interpellés. Pour les intimider, les agents de police ont saccagé « le tambourin à coups de matraque ainsi qu’un accordéon et le saxophone qui est cassé en deux au niveau de l’embouchure. »628
626 Les membres de cette commission comprennent : l’organisation non gouvernementale La Ligue des Droits de l’Homme (LDH) ; l’organisation non gouvernementale Mouvement Contre le Racisme et Pour l’Amitié entre Les Peuples (MRAP) ; le Syndicat des Avocats de France et le Syndicat des Magistrats. Voir Commission nationale sur les rapports entre les citoyens et les forces de sécurité, sur le contrôle et le traitement de ces rapports par l’institution judiciaire. Rapport d’Activité de Juillet 2002 à Juin 2004. p. 21.
627 Entretien de l’ERRC avec M. Malik Salemkour, le 06 février 2004 à Paris.
628 Commission nationale sur les rapports entre les citoyens et les forces de sécurité, sur le contrôle et le traitement de ces rapports par l’institution judiciaire. Rapport d’Activité de Juillet 2002 à Juin 2004. p. 21. 295 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
12.6 Des sanctions pénales sont prises contre les roms qui mendient
Même s’ils n’ont pas d’autres sources de revenus, de nombreux migrants roms ont de plus en plus peur de mendier du fait des sévères sanctions pénales dont ils peuvent faire l’objet, y compris l’expulsion du territoire français, suivant les nouvelles dispositions de la loi du 18 mars 2003 pour la Sécurité intérieure. Ces dispositions, largement critiquées par les organisations de défense des droits de l’homme comme criminalisant la pauvreté, ne pénalisent pas le fait de mendier mais la mendicité « agressive » (sanctionnée de 6 mois de prison et de 3 750 euros d’amende)629 ou le fait d’exploiter la mendicité (sanctionné de 3 ans de prison et d’une amende de 45 000 euros).630 Quand ce dernier cas implique un mineur, la peine peut être aggravée à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende.631 Lorsqu’un étranger est reconnu coupable de l’un de ces délits, il peut en outre être interdit de séjour sur le territoire français, soit définitivement, soit pendant une période pouvant aller jusqu’à 10 ans.632
Ces lois signifient en fait que lorsqu’un enfant ou un adolescent mendie avec ses parents, les parents peuvent être accusés d’exploiter un mineur qui mendie. Même si les parents ne sont pas présents avec leur enfant au moment de l’acte, le fait que les parents ne puissent faire preuve d’une autre source de revenu peut être suffisant pour les accuser. De plus, mendier « de manière agressive » est une expression très vague. Les personnes qui demandent aux passants de l’argent, dans la rue, ne peuvent jamais être sûrs de ne pas en être accusés. Les dispositions de cette loi ont été appliquées à l’encontre des roms migrants qui ont recours à la mendicité pour survivre.
Lorsque l’ERRC a rencontré Mme. M.M., une rom de 30 ans, fin novembre 2004, elle était accusée « d’exploiter de la mendicité d’un mineur ». L’ERRC l’a rencontrée dans sa vieille caravane à la fenêtre scotchée, sur un site pollué d’Aubervilliers, manquant des infrastructures de base. Elle a dit à l’ERRC que, la plupart du temps, elle mendie sur les Champs-Élysées de 18 h à 6 h du matin. Elle ramasse entre 10 et 15 euros les bonnes nuits. Sa fille de treize ans B.M. marchait avec une autre adolescente sur les Champs-Élysées quand la police les a arrêtées pour mendicité et les a
629 Article L 312-12-1 du Code Pénal, Section 2 bis.
630 Article L 225-12-5 du Code Pénal, Section 2 ter.
631 Article L 225-12-6 du Code Pénal Code, Section 2 ter.
632 Article L 225-21 du Code Pénal. 296 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
placés en détention au poste. M.M. n’était pas avec elle à ce moment là. Mme M.M. est allé chercher sa fille au poste avec Mme. V.R., la mère de l’autre fille, et les deux femmes ont été arrêtées.
Les mères des deux filles ont été gardées en détention trois jours chacune. Les deux filles ont été séparées de leurs mères. M.M. a dit à l’ERRC que durant la détention, elles n’ont rien eu à boire ni à manger. Elles n’ont pas été autorisées à quitter leurs petites cellules étroites pour aller aux toilettes et devaient dormir sur des bancs durs. M.M. a dit que les policiers étaient agressifs et les ont frappées sur tout le corps, mais de manière à ne pas laisser de traces. La deuxième femme est diabétique, mais a quand même été frappée par les policiers.
L’audience de M.M. était prévue pour le 7 décembre 2004 devant le Tribunal de grande instance de Paris. Elle a dit à l’ERRC qu’elle devait payer 800 euros pour avoir un avocat. Des personnes ont réuni de l’argent afin de pouvoir payer cette somme. Elle devra le leur rendre.633
Albert Lévy, magistrat, a parlé à l’ERRC d’un cas dans lequel une femme qui mendiait à Lyon avec son bébé âgé de six à huit mois avait été accusée de mendier de manière agressive. Un tribunal a ordonné que son enfant lui soit enlevé et placé à l’assistance publique. Il pense qu’elle a passé une journée en prison avant d’être libérée avec une amende de 800 euros à la clé. Elle a réussi à récupérer son enfant mais au prix de grandes difficultés.634
12.7 On refuse aux roms migrants le droit à la santé
Jusqu’à récemment, les personnes ayant des revenus limités vivant sur le territoire français sans résidence avaient accès au système de l’Aide Médicale d’Etat (AME), ce qui leur donnait droit à des soins médicaux gratuits. Toutefois, suite à des changements du système en décembre 2003, les individus ne peuvent en bénéficier qu’après trois mois de résidence ininterrompue sur le sol français. Ces changements ont exclu de l’AME les roms migrants, qui viennent en France pour trois mois avec
633 Entretien de l’ERRC avec Mme. M.M., le 28 novembre 2004, à Aubervilliers.
634 Entretien de l’ERRC avec M. Albert Lévy, le 26 mars 2004 à Lyon.297 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
un visa de tourisme, comme ils en ont légalement le droit, avant de quitter le pays et d’y entrer de nouveau. Même ceux parmi les roms migrants qui ont légalement droit à l’AME rencontrent souvent des difficultés à y accéder en pratique, du fait de problèmes qu’ils rencontrent pour prouver leur domiciliation.
Ceci signifie que les roms migrants qui ne peuvent avoir accès à l’AME doivent se rendre aux urgences des hôpitaux afin de pouvoir recevoir un traitement. En pratique, ceci veut dire que, pour les soins de base, les roms migrants dépendent de la bonne volonté des médecins volontaires de l’organisation non gouvernementale MDM qui viennent dans leur campement de fortune et leurs squats.
D’après une étude faite par le collectif national droits de l’homme Romeurope, la situation sanitaire des roms migrants est bien pire que celle du reste de la population française. Le taux de mortalité infantile est cinq fois plus élevé que pour le reste de la population. De plus, les conditions de vie indécentes de la plupart des roms migrants entraînent toutes sortes de maladies infectieuses, d’allergies, ou de parasitoses. Des cas de tuberculose ont été rapports dans des camps de roms autour de Lyon et de Paris.
De nombreux roms migrants sont aussi atteints d’affections liées au stress psychologique dont ils souffrent du fait de leurs conditions de vie précaires, des constantes expulsions, des contrôles d’identité et de la peur de l’expulsion du territoire. D’après Romeurope, « certains somatisent et développent ullcères, hypertension, infarctus. D’autres dépriment ou deviennent agressifs. »635
En 2003, MDM a fait 89 consultations médicales auprès de roms migrants vivant dans le bidonville de Surville à Lyon. Soixante-douze de ces consultations ont révélé des pathologies nécessitant des soins médicaux. 25% de ces pathologies étaient liées aux conditions de vie de ces individus. 636
635 Collectif national droits de l’homme Romeurope. Note de Synthese sur l’accueil des roms Migrants en France. 9 novembre 2004, distribuée par email à la liste de diffusion de Romeurope, pp. 9-10. Aussi bien les conditions de vie des roms que le fait qu’ils ne peuvent accéder à d’autres soins que ceux des urgences constituent une violation de leur droit à la santé.
636 Alpil, Médecins du Monde et Secours Populaire. Sortir du bidonville... Enquête auprès des familles du bidonville de Surville. Report, January 15, 2004, p.11.298 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
12.8 On refuse aux migrants roms le droit à l’éducation
L’ERRC a rencontré très peu d’enfants de roms migrants en mesure d’aller à l’école. Dans les camps et les squats visités, leur droit à l’éduction était en général refusé, en dépit de leur désir et de celui de leurs parents d’une scolarisation. La non-scolarisation semble être liée à différentes raisons, notamment le refus des maires, ou le manqué de volonté de la part du Ministère de l’Education nationale de fournir les moyens nécessaires. Les raisons des refus ne sont pas toujours claires, les autorités se renvoyant mutuellement les responsabilités.637 Les conditions de vie des familles font aussi qu’il est très difficile pour les parents d’envoyer leurs enfants à l’école. De plus, les expulsions constantes signifient que les enfants qui vont à l’école locale sont, du coup, obligés d’arrêter l’école.
Le cas du camp de Surville, à Lyon, est significatif. Ce camp compte de nombreux enfants de roms migrants (200 enfants de plus de trois ans) qui ne sont pas scolarisés. Les entretiens de l’ERRC avec des familles de Surville ont indiqué que les familles manquaient d’information en ce qui concerne le droit de leurs enfants à aller à l’école et des possibilités de les y envoyer. Les familles ont indiqué qu’elles n’avaient eu aucun contact avec l’Académie et qu’elles ne croyaient pas que leurs enfants seraient admis à l’école. Certaines familles ont aussi demandé comment il serait possible d’envoyer leurs enfants à l’école compte tenu de leurs conditions de vie.638 L.M. et T.M., deux adolescentes roms de Bosnie habitant à Surville, ont dit à l’ERRC qu’elles ne pouvaient pas aller à l’école car elles n’avaient pas de maison. Elles ont dit que leur cousin avait une maison et pouvait donc aller à l’école. Elles ont dit que c’était un fonctionnaire qui leur avait dit ça, mais on ne sait pas exactement qui. L.M et T.M ont reçu l’asile territorial en France.639 Dans la région de Lyon, les enfants de roms vivant dans d’autres campements de fortune se sont vus précédemment refuser l’entrée à l’école par les autorités éducatives locales.640
637 Voir Collectif national droits de l’homme Romeurope. Note de Synthese sur l’accueil des Rroms Migrants en France. Novembre 9, 2004, distribuée par émail à la liste de diffusion de Romeurope, p. 12.
638 Visite de l’ERRC à Surville, le 24 mars 2004 à Lyon.
639 Entretien de l’ERRC avec L.M. et T.M, le 24 mars 2004 à Lyon. Les initiales ont été attribuées par l’ERRC étant donné le désir des jeunes filles de garder l’anonymat.
640 Voir Alpil, Médecins du Monde et Secours Populaire. Sortir du bidonville...Enquête auprès des familles du bidonville de Surville. Rapport , 15 janvier 2004, p. 9. 299 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
12.9 Les roms migrants, cibles privilégiées des déportations
Le 30 août 2002, la France et la Roumanie ont conclu un accord prévoyant le retour en Roumanie de tous les citoyens roumains se trouvant en situation irrégulière en France. Les pays se sont également mis d’accord sur une procédure selon laquelle des charters seraient spécialement affrétés à cet effet. Les tickets seraient payés par la France et les passagers accompagnés par des fonctionnaires roumains.641
Il est communément reconnu que ces accords marquent un tournant dans l’attitude française à l’égard des migrants roms et particulièrement à l’égard de ceux venant de Roumanie. Non seulement les descentes de police et les expulsions des roms migrants des squats et des camps semblent augmenter, en fréquence et en niveau d’agressivité, mais il y a eu aussi une multiplication des reconductions à la frontière (APRF) sans examen adéquat des situations de chacun.
Ce ne sont pas seulement les roms roumains en situation illégale qui sont déportés, mais aussi ceux qui sont légalement sur le territoire français. Depuis janvier 2002, les roms roumains n’ont plus besoin de visas pour entrer en France. Les individus peuvent rester dans l’Union européenne comme touristes pendant une période de trois mois. Toutefois, de nombreux roms roumains qui sont bien en deçà de cette limite de temps sont néanmoins déportés par les autorités françaises au motif qu’ils n’ont pas de ressources suffisantes pour rester. Pour ce faire, les autorités françaises utilisent l’ article 5c de la Convention de Schengen qui prévoit que les individus entrant dans l’espace Schengen doivent prouver qu’ils ont des ressources suffisantes pour couvrir leur séjour et leur voyage de retour. Une fois déportés, les roumains risquent des sanctions pénales en application des lois roumaines, pouvant donner lieu à une peine de prison et à une interdiction de quitter le territoire roumain pendant une période pouvant aller jusqu’à cinq ans.642
641 Voir Bissuel, Bertrand. «Les municipalités confrontées à la réapparition des bidonvilles». Le Monde, 27 novembre 2002.
642 L’article 1 de l’Ordonnance d’Urgence 112 du 30.08.2001 « Sur la sanction des actes commis à l’extérieur du pays par des citoyens roumains ou des apatrides ayant une résidence en Roumanie » déclare : (1) Entrer ou sortir d’un Etat étranger en franchissant illégalement sa frontière constitue pour un citoyen ou une personne apatride résident en Roumanie un crime passible d’une peine de prison de 3 à 24 mois ; … l’Article 5 de l’Ordonnance d’Urgence prévoit que toute personne reconnue coupable d’un crime tel que spécifié à l’article 1 « se verra refuser la délivrance de passeport, ou, le cas échéant se verra suspendre le droit de l’utiliser pendant une période de 5 ans. » 300 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
Les actions des forces de l’ordre françaises révèlent une tendance à viser spécifiquement les roms migrants lors des arrestations et des déportations. Les fréquentes descentes dans les campements non autorisés et les squats, de même que les contrôles d’identité près des lieux où ils vivent, sont souvent suivis d’arrestations et de déportations. C’est aussi devenu monnaie courante d’arrêter des migrants roms qui essayent de gagner de quoi vivre au travers d’activités variées : vendre des fleurs ou des journaux, laver les vitres des voitures, jouer de la musique dans le métro, mendier. Il est alors présumé qu’ils ont des ressources insuffisantes. Romeurope en juillet 2004 a demandé au Ministre de l’Intérieur quel était le montant exact de ressources considéré comme nécessaires pour vivre en France, mais n’a pas reçu de réponse claire à ce sujet.643
Depuis l’automne 2002, les organisations non gouvernementales MDM et LDH ont aussi observé une augmentation des tentatives des autorités françaises d’organiser des déportations collectives, toutefois elles font observer que celles-ci sont fréquemment interdites par les tribunaux français.644
L’Etat français a toutefois procédé à des déportations collectives en infraction explicite avec l’article 4 du protocole 4 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, lequel interdit la déportation collective des étrangers.645
Par exemple, une expulsion collective a eu lieu le 28 septembre 2004.646 Un charter spécial appartenant à la Compagnie Aigle Azur a quitté l’aéroport de Roissy avec
643 Collectif national droits de l’homme Romeurope. Compte rendu rencontre Monsieur Jean de L’Hermitte au Ministère de l’intérieur le 16 Juillet 2004. 9 novembre 2004, distribué par e-mail à la mailing list de Romeurope.
644 Médecins du Monde et la Ligue des Droits de l’Homme. Les Roms Dossier Presse. Mai 2003.
645 CEDH, Protocole 4, Article 4. Dans sa décision dans l’affaire Conka contre la Belgique, concernant une expulsion collective de Belgique de demandeurs d’asile roms de Slovaquie, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a reconnu la Belgique coupable d’infraction à l’interdiction d’expulsions collectives. La Cour a réitéré sa jurisprudence concernant les expulsions collectives. Selon l’Article 4 du Protocole 4, celles-ci doivent être considérées comme toute mesure pressant des étrangers, en tant que groupe, de quitter le pays, excepté lorsqu’une telle mesure est prise sur la base d’un examen objectif et au cas par cas de la situation de chaque membre de ce groupe. (Voir Conka v. Belguim, Requête No. 00051564/99, Eur. Ct. H.R. (5 février 2002).
646 Dans un communiqué de presse, le Ministère Français de l’Intérieur, de la Sécurité Intérieure et des Libertés locales, a indiqué que ce vol avait été affrété en collaboration avec les autorités italiennes,301 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
au moins 27 roumains déportés à son bord, une grand partie d’entre eux auraient été des roms. L’avion s’est arrêté en Espagne, en Italie, et en Belgique avant d’arriver à Bucarest à 18h20 avec Roumains à son bord. Chaque personne aurait été escortée de 3 agents de police. Parmi les personnes renvoyées en Roumanie, certaines étaient en France depuis une période inférieure aux trois mois pendant lesquels ils sont censés pouvoir rester, mais étaient accusées de ne pas avoir de ressources suffisantes.647
Le 28 novembre 2004, l’ERRC a visité quatre lieux différents où résidaient des roms migrants. Sur trois sites, les habitants ont répété une curieuse histoire – de nombreux roms avaient été arrêtés et déportés les semaines précédentes et des policiers parlant roumain leur racontaient qu’ils allaient être ramenés en Roumanie pour pouvoir voter.
Mme. Maria L. et M. Gheorghe L., des roms migrants vivant dans le camp d’Aubervilliers, ont dit à l’ERRC qu’ils croyaient, d’après des informations reçues de roms de différents campements, que les semaines précédentes des centaines de roms avaient été renvoyés en Roumanie. D’après ce qu’ils savaient, des roms des différents camps et squats autour de Paris avaient été renvoyés en Roumanie. Gheorghe L. a dit que 3 ou 4 personnes avaient été expulsées de son camp d’Aubervilliers. Deux personnes ont été arrêtées alors qu’elles allaient dans un magasin pour faire des courses et deux autres pendant qu’elles mendiaient.648 Mme. C.S., qui vit dans un autre camp, à Aubervilliers a dit à l’ERRC que deux femmes étaient parties chercher de l’eau et avaient été arrêtées à la borne d’incendie. Apparemment on les aurait mises dans des avions pour les renvoyer en Roumanie. Ces femmes n’avaient été là que pendant un mois avant d’être déportées.649 Les habitants d’un squat de Villetaneuse ont dit à l’ERRC que 4 personnes de leur bâtiment avaient été arrêtées et renvoyées en Roumanie. Mr Niku C., un habitant du squat, a dit à l’ERRC que « le Ministre roumain avait payé deux avions pour ramener les roms. »650
espagnoles et belges, rapatriant ainsi 75 citoyens roumains. Ministère de l’Intérieur, de la Sécurité Intérieure et des Libertés Locales. Communiqué de Presse. Le 28 septembre 2004.
647 La Cimade et le Collectif Romeurope. « L’Europe expulse 75 roumains par charter ». Communiqué de Presse, 4 octobre 2004.
648 Entretien de l’ERRC avec M. Gheorghe L. et Mme. Maria L., le 28 novembre 2004, à Aubervilliers.
649 Entretien de l’ERRC avec Mme. C.S., le 28 novembre 2004, à Aubervilliers.
650 Entretien de l’ERRC avec M. Niku C., le 28 novembre 2004, à Villetaneuse. 302 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
Gheorghe L. a aussi dit à l’ERRC qu’il savait qu’il y avait un site dans lequel 18 personnes avaient été arrêtées et expulsées. Il a dit : « Ils les ont pris et les ont renvoyés – il y a quelques jours. Et ils avaient leur visa.651 Ils sont restés deux jours dans un centre de détention et ont ensuite été renvoyés directement en Roumanie… Apparemment il y avait même des policiers roumains, et ils leur ont dit : « On vous ramène pour voter. Il n’y a personne là bas pour voter. Quand vous aurez voté, vous pourrez retourner en France ». On leur a aussi mis un tampon sur leur passeport qui leur interdit d’entrer en France. »652
Le fait que des familles soient séparées semble être relativement courant lors des déportations, y compris le fait de séparer des parents de leurs jeunes enfants.653 Par exemple, M. Marius M. a dit à l’ERRC qu’il avait été déporté en janvier 2000. Son fils de six ans, S.M., est resté en France. A cette époque, la mère de l’enfant, V.S. était en prison. Alors qu’il était en détention, Marius M. a fait appel devant les tribunaux afin de pouvoir emmener son fils S.M. avec lui. S.M. est né en France sous un autre nom, mais Marius M. était officiellement reconnu comme étant son père. Il a dit à l’ERRC qu’il avait expliqué au juge qu’il n’y avait personne pour s’occuper de son enfant. Il n’a pas reçu de décision écrite. Il a été simplement informé par des policiers du centre de détention que le juge avait décidé de le renvoyer en Roumanie. S.M. est resté en France avec ses grands-parents. Toutefois, lui est son grand père sont morts deux mois plus tard dans un accident de voiture alors qu’ils fuyaient en hâte après avoir été expulses d’un camp où ils vivaient.654
Cet autre cas serait, d’après les organisations non gouvernementales locales, fait exprès pour intimider les habitants du campement de Choisy-le-Roi. Mme Olympia V a été arrêtée le 24 septembre 2002 pour « irrégularité de séjour » devant sa caravane et ses deux enfants. Son plus jeune enfant, âgé de six ans, était à l’école à ce moment là. Quarante-huit heures plus tard elle était renvoyée en Roumanie sans ses enfants. L’organisation non gouvernementale MDM a dû intervenir pour que les enfants puissent rejoindre leur mère.655
651 En d’autres termes, ils étaient encore dans les délais de 3 mois autorisés.
652 Entretien de l’ERRC avec M. Gheorghe L., le 28 novembre 2004 à Aubervilliers.
653 Tout acte d’une autorité publique visant à séparer des personnes ayant une vie de famille commune constitue une infraction aux droits protégés par l’Article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
654 Entretien de l’ERRC avec M. Marius S., 28 novembre 2004, à Aubervilliers.
655 Médecins du Monde. Mission Banlieue Rapport d’activité 2002. p. 48. 303 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
Non seulement les liens familiaux ne sont pas suffisamment pris en compte lorsque sont prises les décisions de déportation, mais c’est aussi le cas des liens personnels et des relations tissées après plusieurs années passées en France.
Ainsi, par exemple, M. Toma Christa a été déporté en Roumanie en novembre 2004 après avoir passé 15 ans en France. Sa femme et son fils sont restés à Choisy-le-Roi, où la famille venait juste de s’installer dans un logement mis à leur disposition par le Conseil général du Val-de-Marne dans le cadre d’un projet d’intégration. Son fils a été scolarisé en France et a commencé un stage dans une entreprise. M. Christa a aussi d’autres membres de sa famille en France et a développé des relations personnelles étroites durant toutes ces années. M. Daniel Davisse, maire de Choisy-le-Roi et Mme. Hélène Luc, sénateur du Val-de-Marne, ont témoigné de l’intégration de M. Christa dans la société française, au fil des procédures judiciaires concernant son expulsion. Sa demande de naturalisation était en cours d’examen à la préfecture. Le Comité local de Soutien des Roms du Val de Marne,656 qui a suivi la déportation, a également souligné son absurdité. En fait, M. Christa a été arrêté le 11 novembre 2004 avec trois autres membres de sa famille alors qu’ils étaient en route pour la Roumanie afin de faire renouveler leurs papiers. M. Christa n’avait pas dépassé la période de trois mois de séjour à laquelle il a droit en tant que touriste. Aussi a-t-il été expulsé vers la Roumanie, alors que c’est précisément là-bas qu’il allait de toutes façons !657 M. Christa ne peut maintenant plus retourner dans sa famille en France puisqu’il s’est vu interdire de quitter le territoire roumain pendant un an du fait des sanctions pénales que lui ont infligées les autorités roumaines depuis sa déportation de France.658
12.10 Les roms demandeurs d’asile sont victimes de discriminations
Lors d’une visite du camp bidonville de Surville à Lyon le 24 mars 2004, l’ERRC a rencontré des douzaines de demandeurs d’asile en provenance de l’ex -Yougoslavie vivant dans des cabanes improvisées sans aucune commodité et sans aucune assistance publique d’aucune sorte.
656 Ce Comité, membre de Romeurope, est composé de citoyens apportant leur soutien aux migrants roms du département.
657 Communications par mail du Comité de Soutien des roms du Val de Marne, le mercredi 17 novembre 2004 et le dimanche 21 novembre 2004.
658 Entretien téléphonique de l’ERRC avec M. Michel Fèvre, le 6 avril 2005, à Paris. 304 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
Un homme d’une quarantaine d’années, M. T.C., qui semblait totalement désorienté, a approché l’ERRC en nous demandant où il pourrait trouver quelque chose à manger ou à boire. Il a dit qu’il était arrivé du Kosovo quelques jours plus tôt. Il avait fui la violence contre les communautés minoritaires qui ont lieu dans sa province du 17 au 21 mars 2004.659 Il a dit à l’ERRC que sa maison avait été brûlée.
M. T.C. est allé à la Préfecture pour remettre sa demande d’asile politique. Toutefois il n’y a naturellement reçu aucune assistance matérielle. Il a montré à l’ERRC le papier qu’il a reçu de la préfecture. D’un côté, écrit en français, ce document disait que M. T.C. avait fait une demande d’asile. De l’autre côté, écrit en anglais, le document disait que la France n’était pas responsable de l’instruction de sa demande d’asile et que cette responsabilité incombait à une autre nation. La nation en question n’était pas nommée. En bas du papier, il y avait dix cases.
D’après M. Nicolas Molle de l’association non gouvernementale ALPIL, c’est là la manière dont la France applique la Convention de Dublin.660 Toutes les unes à deux semaines, le demandeur d’asile doit retourner à la Préfecture et l’une des cases est tamponnée. Pendant ce temps, son dossier est examiné et les autorités font leur enquête afin de savoir si la personne est venue via un autre pays, lequel serait responsable de sa demande d’asile. La personne ne reçoit aucune aide durant ce temps. Lorsque toutes les cases ont été tamponnées et si la personne persiste dans sa demande d’asile, alors la demande est acceptée.661 Cette période initiale avant que ne soit officiellement acceptée une demande d’asile pourrait durer jusqu’à six mois, période durant laquelle la personne qui a fait la demande ne reçoit aucune aide.
659 Voir UNHCR Kosovo. Update on the Kosovo Roma, Ashkaelia, Egyptian, Serb, Bosniak, Gorani and Albanian communities in a minority situation. June 2004, disponible à l’addresse suivante : http://www.unhcr.se/Protect_refugees/pdf/Kosovo_minorities_June.pdf.
660 Convention relative à la détermination de l’État responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres des Communautés européennes (Convention de Dublin). Cette Convention autorise un Etat auprès duquel est faite une demande d’asile d’en refuser la responsabilité au motif qu’un autre Etat membre en est responsable selon un certain nombre de critères : membres de la famille, visa ou permis de résidence, franchissement illégal de la frontière, responsabilité du contrôle de la frontière.
661 Entretien avec M. Nicolas Molle, le 26 mars 2004, à Lyon. Pour une description détaillée de cette procedure voir : The Dublin Convention : Study on its Implementation in the 15 Members States of the European Union, European Commission and Danish Refugee Council, janvier 2001, p. 36. Disponible à l’adresse suivante : http://www.flygtning.dk/publikationer/rapporter/dublin/dublin.pdf.305 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
Une fois que la demande d’asile de la personne est acceptée, cette dernière doit en principe être logée dans un Centre d’Accueil pour Demandeur d’Asile (CADA).662 Dans ces centres, les demandeurs d’asile sont logés et reçoivent de la nourriture ainsi qu’une aide sociale. Il y a toutefois un sévère manque de place dans ces centres en France et certains demandeurs d’asile sont de ce fait logés dans des Centres d’Accueil d’Urgence des Demandeurs d’Asile (AUDA).663 Là aussi, on les aide un peu et on leur donne un peu de nourriture. D’autres reçoivent une allocation de logement temporaire ou sont logés à l’hôtel. Les moins chanceux d’entre eux ne reçoivent tout simplement aucune aide et doivent se trouver eux-mêmes un abri. Un nombre disproportionné de demandeurs d’asile roms figurent parmi ces moins chanceux. L’APIL a estimé en mars 2004 qu’il y avait environ 500 à 600 demandeurs d’asile roms dans la région de Lyon et que 90% d’entre eux vivaient dans des bidonvilles ou des squats.664
Mme Michele Mézard, responsable de la mission roms à Médecins du Monde, a dit à l’ERRC que les roms n’ont pas accès aux mêmes logements que les autres demandeurs d’asile. « Les autorités ont en tête beaucoup de stéréotypes. Par exemple, ces personnes pensent : « On ne peut pas les recevoir comme les autres parce qu’ils veulent vivre dans des caravanes et dans une communauté. Il ne veulent pas de logement. » Il faut qu’on comprenne que ce sont là des propos racistes. »665
L’allocation de subsistance donnée par l’Etat français permet à peine aux familles de survivre : chaque adulte reçoit environ 280euros/mois et ce quelle que soit la taille de la famille. Cette assistance ne dure qu’un an, et ce même si la procédure de demande d’asile est toujours en cours. Après cette période, les demandeurs d’asile peuvent demander une aide exceptionnelle à l’enfance auprès du Conseil général. Toutefois, il n’y a aucune garantie qu’ils la reçoivent, et, compte tenu du climat politique actuel, il y a une importante pression mise sur les fonctionnaires pour qu’ils ne les accordent pas.666
662 Centre d’acceuil pour demandeurs d’asile.
663 Centre d’Acceuil pour Demandeurs d’Asile (AUDA).
664 Entretien de l’ERRC avec M. Nicolas Molle, le 26 mars 2004, à Lyon. Le traitement subi par les roms demandeurs d’asile constitue une infraction explicite aux standards mis en places par la Convention de Genève qui prévoit qu’il ne devrait pas y avoir de discriminations dans le traitement des demandeurs d’asile fondées sur la race, la religion, ou le pays d’origine.
665 Entretien de l’ERRC avec Mme. Michele Mézard, le 15 janvier 2004, à Paris.
666 Entretien de l’ERCC avec Mme Marion Gachet, Médecins du Monde, le 02 février 2004 à Lyon. Entretien de l’ERRC avec M. Nicolas Molle, ALPIL, le 26 mars 2004, à Lyon. 306 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
Pour ceux à qui n’est donnée aucune forme de logement, il reste peu d’autre choix que le bidonville ou le squat, à moins que ces individus n’aient des ressources personnelles leur permettant de se payer eux-mêmes leur logement. Ce n’est généralement pas le cas des demandeurs d’asile roms.
Le 26 mars 2004, dans un square du centre de Lyon , l’ERRC a rencontré un groupe de 10 roms venant de l’ex-Yougoslavie, les familles P. et M. Il y avait deux petits bébés parmi eux et une femme enceinte. Mme. R.M. a dit à l’ERRC qu’ils n’avaient nulle part où dormir, rien à manger et qu’ils n’avaient reçu aucune aide. Ils avaient fait une demande d’asile politique, mais ne semblaient pas connaître le statut de leur requête.667
12.11 Conclusion : il y a un besoin urgent de protéger les roms demandeurs d’asile
Mis à part une petite minorité de migrants roms en provenance de l’ex-Yougoslavie, les migrants roms n’ont aucune chance d’obtenir l’asile politique en France. La majorité d’entre eux n’est pas non plus considérée comme réunissant les conditions nécessaires pour bénéficier des formes de protection subsidiaires. Un petit nombre reçoit une autorisation de rester pour raisons de santé. La grande majorité d’entre eux est exposée constamment au risque d’être déportée.
L’ERRC considère qu’au lieu de soumettre ces migrants roms à de continuelles violations de leurs droits et à tenter, directement ou indirectement, de les faire retourner dans leur pays d’origine, la majorité d’entre eux devraient recevoir une protection sur le territoire français.
Bien trop souvent, les migrants roms sont renvoyés à une réalité de discrimination et de marginalisation permanente si sévère que cela constitue des persécutions selon la définition de la Convention de Genève sur le Statut des Réfugiés (Convention de Genève). Le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations Unies (UNHCR) a exposé clairement que les réfugiés ne sont pas seulement des personnes fuyant la torture ou d’autres dangers sérieux liés à des critères raciaux, ethniques ou religieux, mais que des mesures discriminatoires non violentes peuvent elles aussi constituer un cas de persécution.« C’est le cas si des mesures de discrimination entraînent des conséquences d’une nature substantiellement préjudiciable pour la personne
667 Entretien de l’ERRC avec Mme. R.M., le 26 mars 2004, à Lyon. 307 Les migrants roms sont soumis à des traitements inhumains et dégradants
concernée, par exemple de sérieuses restrictions au droit à gagner sa vie, au droit à pratiquer sa religion ou à l’accès à une éducation normale »668 La situation de nombreuses communautés roms dans les pays d’Europe de l’Est ou d’Europe centrale atteint sans aucun doute de tels niveaux.
C’est ce genre de situations que fuient un certain nombre de migrants roms arrivés en France depuis les années 90. Il est sans doute plus facile de les dépeindre comme des criminels et de les expulser de ville en ville, de bidonville en bidonville, que de les reconnaître comme des victimes de graves violations des droits de l’homme au titre de la Convention de Genève sur le Statut des Réfugiés. Mais de telles actions peuvent constituer des violations du droit international et des droits de l’homme. En fait, les vagues d’expulsion de migrants roms conduites par les autorités françaises ont fortement mis en doute l’attachement réel de la France aux droits de l’homme. Il y a un besoin urgent de politiques destinées à corriger les dommages causés ces dernières années et d’apporter un remède aux abus dont son victimes des milliers d’individus.
668 Haut Commissariat aux Réfugiés. Guide des procédures et des critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié selon la Convention de 1951 et le Protocole de 1967 relatif au statut des réfugiés. Genève, 1992.309 Conclusion : l’égalité trahie
13. CONCLUSION : L’ÉGALITÉ TRAHIE
Le Comité des Nations Unies des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) a récemment exprimé ses inquiétudes concernant le manque de reconnaissance des minorités en France. Il a affirmé que « le fait que tous les individus se voient garantir des droits égaux dans l’État partie et sont égaux devant la loi n’implique pas que les minorités n’ont pas le droit d’exister et d’être protégées en tant que telles par l’État partie. » De plus, le Comité a souligné que « l’égalité devant la loi ne suffit pas toujours à assurer l’exercice dans des conditions d’égalité des droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, par certains groupes minoritaires d’un pays. » Il a recommandé que la France « réexamine sa position à l’égard des minorités, afin d’assurer aux groupes minoritaires le droit d’exister et d’être protégés en tant que tels dans l’État partie. » 669
Les recherches de l’ERRC sur la France confirment de manière frappante la justesse des observations de la CDESC. Les tsiganes et voyageurs français ne sont pas égaux aux autres citoyens. Ils souffrent de discriminations dramatiques qui les affectent dans l’exercice d’un large panel de droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels. Cette discrimination a deux aspects. D’une part, du fait que leurs spécificités ne sont pas prises en compte dans les lois, politiques et réglementations, ils se trouvent privés des droits et services fondamentaux garantis à la majorité de la population. D’autre part, leur spécificité est parfois prise en compte par les législateurs, fonctionnaires locaux et autres autorités mais d’une manière qui en fait des cibles de traitements négatifs.
Les discriminations viennent du fait que l’on n’a pas réussi à prendre en compte le style de vie lié au voyage ; cela affecte particulièrement les droits sociaux, économiques et culturels des tsiganes.
La situation a atteint des proportions critiques dans le domaine du logement : de nombreuses lois et de nombreux règlements relatifs à l’occupation des sols, à la planification urbaine et à l’accès aux infrastructures publiques ne répondent pas aux besoins
669 Conclusions du Comité pour les Droits Economiques, Sociaux et Culturels : France, 30/11/2001, E/C.12/1/Add.72. (Conclusions/ Recommandations).
Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
310
spécifiques des tsiganes et des voyageurs qui vivent dans des caravanes. Des milliers de tsiganes et de voyageurs qui achètent des terrains se trouvent constamment harcelés, menacés d’expulsion et se voient refuser les commodités élémentaires que sont le raccordement aux réseaux d’eau et d’électricité. De plus, bien qu’y étant obligés par une loi spécifique (loi Besson), les communes n’ont pour la plupart pas réussi à inclure d’aires d’accueils pour les voyageurs dans leurs plans urbains et leurs règlements, et ne sont pas disposées à installer de telles aires d’accueil sur leur territoire.
De telles discriminations s’étendent aussi à d’autres secteurs de la vie, amplifiant les effets de chaque cas de discrimination. Du coup, les tsiganes et les voyageurs se trouvent pris dans un effet boule de neige d’extrême marginalisation et d’exclusion. Les dénégations officielles de ces discriminations, souvent sous couvert « d’égalité universelle », ne servent qu’à les perpétuer. Ce cycle est mis en route dès l’enfance des tsiganes et voyageurs au sein du système éducatif français, lequel a historiquement refusé de prendre en compte la culture spécifique des ces populations, imposant au lieu de cela un moule rigide auquel les enfants doivent se conformer. En pratique, un pourcentage choquant d’enfants de voyageurs et de tsiganes ne reçoit pas d’éducation, sortant du système avant d’avoir atteint le secondaire ou étant scolarisé dans des structures spéciales où ils ne reçoivent qu’une éducation minimale. Même lorsqu’ils vont en cours, tsiganes et voyageurs semblent bien trop souvent ne recevoir qu’une éducation médiocre, ne leur donnant même pas le bagage de base. Plus tard dans leur vie, les opportunités permettant aux tsiganes et voyageurs de gagner leur vie sont battues en brèche par des réglementations toujours plus importantes affectant les activités économiques et leur exercice. Ces lois et règlements sont développés sans prise en compte du style de vie et caractéristiques spécifiques des tsiganes et voyageurs. Leur situation économique en est aggravée, les familles de voyageurs et de tsiganes à faibles revenus se trouvant souvent exclues des diverses formes d’aide au logement ouvertes aux autres citoyens, leurs caravanes n’étant pas considérées comme une forme de logement.
On ne demande pas aux autres composants de la société française d’abandonner des éléments significatifs de leur culture afin de bénéficier de droits élémentaires et des services de l’Etat. C’est pourtant là le choix indécent proposé aux tsiganes et voyageurs. Pour bénéficier des mêmes services que les autres, ils doivent abandonner des parts significatives de leur identité. Ou alors, ils « choisissent » de conserver leur style de vie et donc souffrir des effets de la discrimination. Ainsi, en traitant leurs cultures comme si elles étaient invisibles ou illégitime, l’Etat français refuse en fait l’égalité aux tsiganes et aux voyageurs. 311 Conclusion : l’égalité trahie
Paradoxalement, les inégalités dont souffrent les voyageurs et les tsiganes sont considérablement aggravées par les nombreuses lois, pratiques et politiques sous-tendues par le racisme, dans le cadre desquelles leur manière de vivre est prise en compte mais d’une manière qui viole leurs droits fondamentaux.
Ces discriminations affectent des droits aussi élémentaires que le droit de vote. Du fait d’une réglementation raciste, de nombreux tsiganes et voyageurs ne peuvent voter qu’après une période de rattachement de trois ans à une commune particulière, alors que les autres citoyens français peuvent voter après seulement six mois de résidence dans une municipalité donnée. De plus, tsiganes et voyageurs doivent transporter avec eux des documents de circulation spéciaux qu’ils doivent régulièrement faire viser par la police ou les gendarmes. Ils risquent des sanctions pénales – amendes et prison – s’ils circulent à travers le pays sans ces documents ou ne remplissent pas leurs obligations consistant à faire viser ces documents.
Une série de lois racistes a également rendu illégal pour tsiganes et voyageurs de stationner sur la majeure partie du territoire français. L’article 9 de la loi Besson interdit effectivement aux tsiganes de s’arrêter en dehors des aires prévues à cet effet. Ces restrictions sont renforcées par la loi du 18 mars 2003 pour la Sécurité intérieure, laquelle fait de l’arrêt illégal un crime punissable par de sévères sanctions pénales. La loi de Sécurité intérieure pénalise donc tsiganes et voyageurs pour le simple fait qu’ils ont un style de vie spécifique. De plus, la Loi Borloo dresse une liste de vingt-huit villes françaises de moins de 20 000 habitants où les tsiganes ne peuvent s’arrêter.
En pratique, il y a très peu d’aires d’accueil, et encore moins d’aires d’accueil répondant aux standards de décence. Les parties du territoire français qui semblent être réservées aux voyageurs et aux tsiganes ont tendance à être physiquement séparées et situées dans des lieux pollués et néfastes à la santé (tels que des lieux à proximité des décharges publiques, des stations d’épurations, ou d’usines polluantes). Pourtant, voyageurs et tsiganes sont régulièrement expulsés, même de lieux aussi indécents.
Tsiganes et voyageurs sont aussi la cible d’expulsions forcées dans le cadre desquelles les policiers arrivent lourdement armés, en grand nombre, et soumettent régulièrement les habitants à des traitements dégradants, y compris des insultes, des dommages aux biens et parfois des violences physiques. Les recherches de l’ERRC montrent aussi des tendances systématiques aux descentes abusives découlant en des fouilles, contrôles d’identité et arrestations dans le cadre desquels tous les tsiganes et 312 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
les voyageurs habitant au même endroit sont collectivement traités comme suspects. De plus, les stéréotypes racistes courants qui font des tsiganes et des voyageurs des voleurs et des délinquants se traduisent dans le traitement discriminatoire que leur réservent les autorités judiciaires.
Le racisme et la discrimination imprègnent également les interactions quotidiennes des tsiganes avec la société française. Par exemple, on leur refuse fréquemment l’entrée dans des lieux publics tels que bars, restaurants, boîtes de nuit et les magasins. On refuse également très régulièrement de les assurer. Sur le marché du travail, la clé de leur succès dépend de leur capacité à dissimuler leur identité vis-à-vis de leurs clients et employeurs.
De manière surprenante, dans un pays qui attache autant de valeur à la notion d’égalité, les violations régulières et considérables dont sont victimes les tsiganes et les voyageurs en France viennent du fait que l’Etat français ne s’est pas conformé à ses obligations internationales de garantie de l’égalité et de la non discrimination.
Ces principes fondamentaux du droit international sont reconnus et répétés dans de nombreuses conventions internationales, déclarations, et recommandations. Les principes d’égalité et de non-discrimination sont des droits généraux et autonomes qui doivent s’appliquer à tous les secteurs de la vie, que ceux-ci soient politiques, civils, sociaux, économiques, ou culturels.670 Ces dernières années une définition largement acceptée du principe d’égalité est devenue acceptée en droit international. Elle requiert que les situations égales soient traitées également et que les situations inégales soient traitées différemment. Ne pas s’y conformer revient à faire de la discrimination, à moins qu’une justification objective et raisonnable de cette attitude existe.
670 Par exemple, la « Déclaration Universelle des droits de l’Homme » (laquelle mentionne déjà dans son premier article l’égalité entre toutes les personnes), dans son article 7, pose les principes d’égalité et de non-discrimination comme étant des droits fondamentaux en eux-mêmes ainsi que le fait l’Article 26 du « Pacte international relatif aux droits civils et politiques » (PIDCP). Au niveau européen, avec la récente adoption du « Protocole 12 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales » (CEDH), un droit général et autonome de la non discrimination est légalement plaidable devant la Cour Européenne des droits de l’homme. Ces principes sont aussi compris dans un large nombre d’instruments internationaux comme étant des droits à prendre en compte en terme d’application des droits proclamés. Par exemple, c’est le cas de l’Article 14 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, Article 2(2) du PIDESC et Article 2(1) du PIDCP.313 Conclusion : l’égalité trahie
Cela signifie qu’afin de garantir en pratique l’égalité et la non discrimination, des facteurs tels que la culture des minorités doivent être pris en compte de manière constructive dans les lois, politiques, et pratiques. En revanche, prendre en compte la culture d’une minorité d’une manière défavorable aux personnes appartenant à cette minorité constitue une discrimination raciale.
Afin de garantir une égalité réelle pour les voyageurs et les tsiganes en France, il est impératif que l’Etat français respecte les principes d’égalité et de non discrimination tels que définis par le droit international. La première étape repose évidemment dans le fait de reconnaître la discrimination dont sont victimes les voyageurs et les tsiganes dans de nombreux aspects de leur vie. Il est urgent qu’au lieu de chercher à légitimer des lois, politiques et pratiques discriminatoires au travers d’une interprétation restrictive du principe d’égalité, l’Etat français prenne en compte les manières de vivre et les cultures spécifiques des tsiganes afin de garantir une égalité réelle. Et, d’autre part, toutes les lois, politiques et pratiques qui ciblent les voyageurs et les tsiganes pour des traitements négatifs devraient être reconnus comme étant discriminatoires et devraient être modifiés en conséquence.
De plus, des stratégies doivent être développées afin de permettre aux tsiganes et aux voyageurs d’avoir accès aux mêmes droits et services que les autres citoyens.671 Ceci doit être fait d’une manière qui respecte les cultures des voyageurs et des tsiganes. Evidemment, ceci signifie que différents segments des communautés des tsiganes et des voyageurs doivent être directement impliqués à tous les stades des développements et mises en place des mesures qui les affectent directement. Ces mesures doivent s’accompagner d’actions concertées afin de combattre le racisme anti-tsiganes et voyageurs qui imprègne actuellement la société française.
671 Il faut noter qu’au vu du droit international, des mesures positives ne sont pas de la discrimination. Ceci est clairement indiqué dans la définition de la discrimination par la CIEDR. L’article 1(4) stipule que : « Les mesures spéciales prises à seule fin d’assurer comme il convient le progrès de certains groupes raciaux ou ethniques ou d’individus ayant besoin de la protection qui peut être nécessaire pour leur garantir la jouissance et l’exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans des conditions d’égalité ne sont pas considérées comme des mesures de discrimination raciale, à condition toutefois qu’elles n’aient pas pour effet le maintien de droits distincts pour des groupes raciaux différents et qu’elles ne soient pas maintenues en vigueur une fois atteints les objectifs auxquels elles répondaient. » La directive 2000/43/EC stipule aussi dans son article 5 que : « Pour assurer la pleine égalité dans la pratique, le principe de l’égalité de traitement n’empêche pas un Etat membre de maintenir ou d’adopter des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser des désavantages liés à la race ou à l’origine ethnique. » 314 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
Paradoxalement, c’est en fait l’attachement de la France à un concept restrictif d’égalité qui agit comme une barrière empêchant de remédier aux inégalités existantes de certains segments de la population. Si la France veut perpétuer ses garanties constitutionnelles d’égalité, la situation dramatique des tsiganes et des voyageurs en ce qui concerne les droits de l’homme doit être immédiatement reconnue et rectifiée. 315 Recommandations
14. RECOMMANDATIONS
En se fondant sur les résultats de ce rapport, l’ERRC presse les autorités françaises d’agir selon les recommandations suivantes :
1. Signer et ratifier la Convention cadre pour la protection des minorités nationales, reconnaissant expressément tsiganes et voyageurs comme une minorité nationale, et retirer la reserve de l’article 27 du Pacte international sur les droits civils et politiques.
2. Prendre des mesures urgentes afin de mettre fin au climat d’impunité dans lequel se développent les propos racistes relatifs aux tsiganes, voyageurs et Roms migrants et faire en sorte que ces expressions anti-tsiganes soient promptement et efficacement sanctionnées. Rendre clair pour le public français que de telles expressions ne sauraient être tolérées.
3. Reconnaître publiquement l’internement des tsiganes et voyageurs pendant la seconde guerre mondiale et s’excuser pour cela. Etablir des monuments sur les sites des anciens camps d’internement et mettre en place des mesures afin de commémorer la mémoire des tsiganes et voyageurs victimes des politiques de la France durant la seconde guerre mondiale. Financer des recherches visant à mettre en lumière le traitement des tsiganes et voyageurs durant la deuxième guerre mondiale.
4. Faire en sorte que l’histoire des tsiganes et voyageurs sur le territoire français, y compris les informations concernant les livrets anthropométriques et leur internement pendant la deuxième guerre mondiale, soit inclus dans le cursus scolaire.
5. Collecter des données statistiques, réparties par ethnies, de manière à permettre un suivi efficace de la situation des tsiganes, voyageurs et autres minorités dans des domaines-clés de la vie, tels que : la participation politique, le logement, l’éducation, les services sociaux, la santé, la justice, les relations avec la police, etc. Un tel suivi est essentiel afin d’identifier les problèmes rencontrés par les groupes minoritaires et afin de développer des solutions adaptées. Le suivi doit être conduit en accord avec les règles de protection des donnés confidentielles, sur la base d’un système d’auto-identification volontaire, et en expliquant clairement les raisons pour lesquelles ces informations sont collectées.
Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
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6. Conduire des recherches spécifiques pour évaluer le nombre et la fréquence des actes de discrimination raciale à l’encontre des tsiganes, voyageurs et roms migrants dans des secteurs tels que l’éducation, le marché du travail, l’accès au logement (y compris le logement social), l’accès aux soins et l’accès à l’aide sociale. De telles recherches devraient également fournir des informations sur le nombre de personnes sanctionnées pour des actes de discrimination raciale à l’encontre des tsiganes, voyageurs et Roms migrants.
7. Abroger immédiatement tous les aspects discriminatoires et abusifs contenus dans la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à « l’exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe. »
8. Identifier et abroger tous les règlements et les obstacles administratifs empêchant les tsiganes et voyageurs d’obtenir des Cartes nationales d’identité.
9. Eliminer les conditions discriminatoires relatives au droit de vote des tsiganes et voyageurs résultant de la loi du 3 janvier 1969, y compris les aspects relatifs à la période de rattachement de 3 ans et au quota de 3% de personnes possédant des documents de circulation ayant le droit de voter dans une municipalité donnée. Prendre des mesures positives pour faire en sorte que les voix des tsiganes et voyageurs soient dûment représentées à tous les échelons de la vie politique.
10. Prendre d’urgentes mesures pour faire en sorte que les tsiganes et voyageurs puissent exercer leur droit de participation aux affaires publiques au niveau national aussi bien que local, conformément à l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et au document du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale : « Recommandation générale XXVII sur la discrimination à l’égard des Roms. » Mettre fin immédiatement aux pratiques consistant à consulter des intermédiaires en lieu et place des tsiganes et voyageurs en ce qui concerne leurs intérêts et leurs besoins, et faire en sorte que tout organe consultatif permette une participation efficace des voyageurs et tsiganes.
11. Prendre des mesures positives afin de créer des conditions garantissant aux tsiganes et voyageurs une poursuite de leur mode de vie, qu’il soit sédentaire ou nomade, selon leur libre choix et en conformité avec les principes d’égalité et de non-discrimination.317 Recommandations
12. Faire en sorte que les tsiganes et voyageurs qui voyagent puissent librement exercer leur droit à la liberté de circuler et à un logement décent, et qu’ils soient protégés contre les expulsions par la force.
• Abroger, sans délais, les articles 53 et 58 de la loi du 18 mars 2003 pour la Sécurité intérieure ainsi que l’article 15 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la Ville et la rénovation urbaine
• Faire en sorte que les aires d’accueil soient établies dans les communes à travers tout le territoire ainsi qu’il est stipulé dans la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage (loi Besson). Faire en sorte également que ces aires d’accueil soient conformes aux normes de décence, notamment pour tout ce qui concerne les accès aux services et infrastructures, la localisation et l’habitabilité.
• Prendre des dispositions positives assurant que les tsiganes et voyageurs disposent d’un nombre de places suffisant pour stationner et qu’elles soient conformes aux standard de décence élémentaire.
• Faire en sorte que les tsiganes et voyageurs ne soient pas relégués sur des parties du territoire présentant des risques en termes de santé et de pollution ou des dommages sérieux liés à la ségrégation raciale.
• Cesser toutes pratiques d’expulsions par la force de familles tsiganes et voyageurs stationnant dans des communes, en violation du droit à un logement décent.
• Faire en sorte que les campings qui ont des règlements ou des politiques impliquant une discrimination à l’égard des tsiganes et voyageurs soient dûment sanctionnés.
• Entamer immédiatement des consultations sérieuses et étendues au sein de l’ensemble de la population des tsiganes et voyageurs afin de développer des réponses appropriées aux besoins liés au logement, le sujet de l’aire d’accueil n’étant qu’un aspect parmi d’autres.
• Développer de manière urgente des solutions alternatives pour les stationnements de courte durée relatifs aux besoins de logement des tsiganes et voyageurs, tels que l’établissement de sites familiaux.
13. Faire en sorte que le droit à un logement décent ainsi que la protection contre les expulsions forcées soit garantis aux tsiganes et voyageurs qui achètent des terrains :
• Faire en sorte que les nombreuses lois et politiques réglementant l’utilisation des terrains, la planification urbaine et l’accès aux infrastructures publiques prennent en compte le style de vie et les besoins particuliers des tsiganes et 318 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
voyageurs (tel que vivre sur leur terrain dans une caravane) et qu’elles ne résultent pas en mesures discriminatoires contre ces communautés.
• Ne pas faire d’usage illégal du droit de préemption pour empêcher la vente de propriétés aux voyageurs et aux tsiganes.
• Faire en sorte que la sécurité des biens immobiliers soit garantie aux tsiganes et voyageurs et que dans l’application des règlements urbains soient bien considérés les droits humains fondamentaux, tels que le droit à un logement décent, le droit à la scolarisation des enfants, le droit à la santé et le droit à la non-ingérence dans la vie privée et familiale.
• Reconnaître les caravanes comme une forme de logement.
• Ordonner aux autorités locales de fournir sans délais aux familles à qui cela est refusé au motif que leur installation viole la réglementation urbaine : l’eau, l’électricité, le raccordement à l’évacuation des eaux usées et autres infrastructures.
14. Prendre des mesures immédiates pour mettre les lieux d’habitation permanents de tsiganes et voyageurs aux normes de décence et régulariser la situation de logement de ceux qui ont été pendant longtemps résidents sur des lieux d’habitation non autorisés. A défaut, leur fournir des possibilités de logement qui respectent les standards de décence. Toutes les mesures devront être prises et mises en oeuvre avec l’avis et la participation des familles de tsiganes et voyageurs concernées.
15. Faire en sorte que les droits des Roms migrants en matière de logement, y compris en ce qui concerne les infrastructures de base, la qualité sanitaire de l’environnement et la sécurité soient garantis. Développer des politiques cohérentes aux échelons départementaux, régionaux et nationaux visant à fournir aux Roms migrants des conditions de logement décentes pour ceux qui vivent dans des camps non autorisés ou des squats. Cesser immédiatement les pratiques d’expulsion forcée des roms migrants d’une municipalité vers une autre.
16. Mettre en place des mesures propres à supprimer les pratiques discriminatoires et ségrégationnistes en ce qui concerne l’accès des tsiganes et voyageurs aux HLM (logement social) et assurer l’application efficace d’une législation anti-discriminations à l’encontre de ceux qui perpétuent de telles discriminations.
17. Conduire des enquêtes approfondies et régulières concernant les allégations de conduite policière abusive à l’encontre des tsiganes, voyageurs et Roms migrants. 319 Recommandations
Faire en sorte que les suspects soient rapidement traduits en justice et que les victimes reçoivent une indemnisation légitime. Mettre fin aux pratiques consistant à viser collectivement les tsiganes, voyageurs et Roms migrants durant les fouilles, les contrôles ou arrestations, ainsi qu’aux pratiques de ciblage ethnique.
18. Faire en sorte que les rapports faisant état de harcèlement de Roms migrants par la police donnent lieu à des enquêtes sérieuses et que les officiers de police qui abusent de leur autorité soient dûment sanctionnés.
19. Prendre des mesures appropriées de manière à assurer que les personnes ayant été victimes de mauvais traitements de la part d’agents de la force publique ne soient pas intimidées ou dissuadées de déposer une plainte officielle, notamment par des menaces d’actions punitives contre ceux qui déposent plainte.
20. Conduire des recherches détaillées concernant le traitement judiciaire des tsiganes, voyageurs et Roms migrants de manière à identifier les pratiques discriminatoires et à pouvoir développer des mesures appropriées pour mettre fin à ces pratiques.
21. Faire en sorte que tsiganes et voyageurs aient un accès à l’aide sociale égal à celui dont bénéficie le reste de la population. Inclure les caravanes et mobil homes dans les formes de logement pouvant donner lieu à une aide au logement, de manière à ce que ceux qui y vivent puissent prétendre à toutes les formes d’aide disponibles, à l’instar des autres citoyens français. Une solution alternative serait de développer une assistance spéciale de manière à garantir que tsiganes et voyageurs puissent recevoir le même niveau d’aide au logement que les autres citoyens français.
22. Développer des programmes de prêts spéciaux permettant aux tsiganes et voyageurs qui sinon, pourraient ne pas pouvoir souscrire de prêts ni acheter des biens immobiliers
23. Mettre en place des dispositions généralisées afin que tsiganes et voyageurs aient un accès complet aux services sociaux dans les administrations, c’est-à-dire égal au reste de la population, et qu’ils ne soient pas, dans les faits, orientés vers un système spécial de services sociaux. Faire en sorte que les fonctionnaires des services sociaux reçoivent une formation leur permettant de faire face aux besoins spécifiques des tsiganes et voyageurs et que ces mêmes fonctionnaires comprennent qu’il est de leur responsabilité de fournir toute aide et assistance 320 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
aux tsiganes et voyageurs afin de bénéficier d’un accès aux services sociaux égal à celui dont bénéficie le reste de la population. Enquêter sur les témoignages faisant état de dossiers de tsiganes et voyageurs systématiquement non instruits dans certains départements et prendre les mesures propres à régler ce problème.
24. Faire en sorte que le droit à la santé des Roms migrants soit totalement garanti, y compris leur possibilité d’accès aux soins et leur droit à vivre dans un environnement sain.
25. Faire en sorte que des enquêtes sérieuses soient conduites concernant des pratiques discriminatoires au sujet de l’accès des tsiganes et voyageurs aux services publics, qu’il s’agisse d’assurances ou d’établissements de service public, que les responsables soient sanctionnés de manière appropriée et que leurs victimes reçoivent une juste compensation. Que les lois et réglementations anti-discriminations existantes dans ce domaine soit sérieusement appliquées et qu’il soit clair pour tous ceux qui fournissent des services publics qu’aucune discrimination à l’encontre des tsiganes et voyageurs ne sera tolérée.
26. Prendre des mesures proactives de manière à assurer que tsiganes et voyageurs bénéficient du même droit au travail que le reste de la population. Faire en sorte que tsiganes et voyageurs puissent faire halte dans les communes à travers tout le pays. Mettre en place des mesures propres à remédier à l’impact discriminatoire que de nombreuses réglementations relatives à un certain nombre de professions ont sur les possibilités de travail des tsiganes et voyageurs, telles que la loi n° 96-603 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat. Faire en sorte que des enquêtes sérieuses soient menées au sujet de toutes les allégations de pratiques discriminatoires concernant l’accès aux emplois salariés, que les responsables de telles discriminations soient sanctionnés et que les victimes reçoivent de justes compensations. Que les lois anti-discrimination existantes couvrant ce secteur soient sérieusement appliquées et qu’il soit clair pour tous les employeurs qu’aucune pratique discriminatoire à l’égard des tsiganes et voyageurs ne sera tolérée.
27. Faire en sorte que tous les enfants de tsiganes, voyageurs et roms migrants bénéficient du même accès à l’enseignement que les autres enfants, dans un environnement non discriminatoire.321 Recommandations
• Faire en sorte que le droit et l’obligation des enfants d’être scolarisé soit réellement pris en compte lors de toute expulsion forcée de tsiganes, voyageurs et Roms migrants.
• Mettre en place un panel d’actions positives et coordonnées dans tout le pays de manière à faire en sorte que les enfants de tsiganes et voyageurs voient leur participation scolaire et leur scolarité facilitées lorsqu’ils voyagent.
• Faire en sorte que les autorités locales accueillent systématiquement les enfants de tsiganes, voyageurs ou roms migrants dans les écoles locales sans tenir compte de la régularité de leur établissement sur le territoire municipal et sans tenir compte du fait que les parents soient ou non en mesure de produire l’ensemble des documents nécessaires.
• Faire en sorte que toutes les plaintes relatives à des pratiques discriminatoires à l’encontre d’enfants de tsiganes, voyageurs et roms migrants donnent lieu à des enquêtes approfondies et faire en sorte que des mesures disciplinaires et une réglementation anti-discrimination soient bien appliquées dans ces cas.
• Dispenser une formation à la non-discrimination aux enseignants et responsables d’établissements scolaires et leur fournir les informations nécessaires relatives aux lois anti-discriminations applicables dans leur situation.
• Inclure des contenus relatifs à l’histoire des tsiganes et voyageurs en France dans le cursus scolaire comme composants centraux des différentes matières. Faire intervenir les tsiganes et voyageurs eux-mêmes dans la préparation de tels documents de manière à ceux qu’ils soient libres de tous stéréotypes.
• Prendre sans délais des mesures propres à mettre fin à la ségrégation scolaire et faire en sorte que les enfants de tsiganes et voyageurs soient scolarisés dans le système général avec les autres enfants. Là où des programmes passerelles et des supports spéciaux seront nécessaires, faire en sorte que les écoles aient des ressources suffisantes pour mettre en place de tels programmes et que ceux-ci ne deviennent pas des formes de ségrégation.
• Fournir les ressources nécessaires afin que les enfants de tsiganes et voyageurs qui arrivent en âge d’entrer au collège et ayant un retard dans leur éducation puissant recevoir l’assistance de l’enseignement général au lieu d’être simplement orientés vers les filières SEGPA.
28. Sans délai, mettre en application la circulaire n°. 2002-101 du 25 avril 2002 sur la « scolarisation des enfants du voyage et de familles non sédentaires » de manière coordonnée à travers le pays.322 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
29. Sans délai, adopter de nouvelles lois anti-discriminatoires en conformité avec les standards européens et internationaux actuels, en conformité avec les standards établis par la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales et par la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. En particulier dans les domaines suivants : administration de justice, y compris les éléments concernant la protection et la sécurité de la personne ; participation politique, y compris les éléments concernant le droit de vote, le droit de se présenter à une élection, de prendre part à la direction du pays à tous les niveaux, le droit à la liberté de circulation et de résidence dans les frontières de l’Etat ; le droit au rassemblement pacifique et à la liberté d’association.
30. Faire en sorte que les lois anti-discriminations existantes soient bien appliqués. Attirer l’attention des juges et des procureurs sur les problèmes de discrimination raciale et sur les difficultés à en fournir des preuves. Informer tous les magistrats et représentants de l’ordre des nouvelles dispositions anti-discriminations et de l’importance de leur application. Mettre en oeuvre des campagnes d’information ciblant la population de manière à attirer l’attention sur les lois anti-discriminations en France.
31. Faire en sorte que la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) bénéficie des ressources, de l’indépendance et des compétences nécessaires à la réussite de son mandat.
32. Ratifier sans délais le Protocole n°12 de la Convention européenne des droits de l’homme.
33. Cesser toutes expulsions à caractère discriminatoire de Roms migrants et toute expulsion collective visant les Roms migrants.
34. Faciliter le retour de personnes illégalement expulsées de France et fournir une compensation pour les dommages émotionnels ou matériels causés par l’expulsion de France par la force.
35. Cesser toutes pratiques discriminatoires à l’égard des Roms migrants demandeurs d’asile.
36. Faire en sorte que les standards de protection des personnes stipulés par la Convention de Genève relative au statut des réfugiés soient pleinement appliqués à 323 Recommandations
tous les Roms demandeurs d’asile. Garder en mémoire que le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCNUR) a clairement indiqué que les réfugiés ne sont pas seulement des personnes fuyant la torture ou des persécutions sur la base de principes raciaux, religieux ou ethniques, mais que les mesures discriminatoires non violentes peuvent aussi être considérées comme des formes de persécution.
37. Dénoncer aux plus hauts niveaux les discriminations à l’égard des tsiganes, voyageurs, Roms migrants et autres et indiquer clairement que le racisme ne sera pas toléré.325 Bibliographie
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Note: All translations are unofficial by ERRC.
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Urbanism Code335 Résumé en romani
16. RÉSUMÉ EN ROMANI
1. Ander
Khatar 2003, o Evropako Centro Pala Romane Xakaja/Ćaćimata phandlas pe te kerel zuralo monitoring pala Ciganongi, Phirutnengi taj Rromane migrantongi situacia ande Franca. Kado rodipe sikavela, ke e Ciganongi, Phirutnengi taj e Rromane migrantongi situacia areslas pe kriza ande palutne berśa. Dźikaj e Franca na pindźarel e minoriteten/ciknimatan, na pindźarela pe e Ciganikane taj Phirutne jekhetanimatangi identiteta taj śajimata, kaj te śaj griźin taj te inkeren pengi kultura, tradicia, trajosko/źivotosko drom taj e aver anglune kotora penge identitetako. But śel milă Ciganura taj Phirutne, kajso e francikane themutnenge aba but śele berśende dela pe, kadalenge na dela pe e egalone griźimasko fundamentalo ćaćipe taj butivar astarena lendar palpale taj hatărena/halovena hamisaripe maśkar penge civilone, politikalone, socialone, ekonomikane taj kulturikane ćaćimata. Aba dolmut/ćirla si von tel-e zòr e thamănge, politikonge taj praktikenge so resena pe lengo kontrolo, represia, ekskluzia taj bilaripe/assimilacia, taj kado efektuila sako aspekto ande lengo sako-dívesutno trajo. Akanutnes but thamă/zakonura sa ćhinde e droma e ciganonge taj phirutnenge te śaj astaren penge identitetake klidune kotora, taj von jekhvareste si o legalo ćaćikanipe e rasistone thanutne funkcionaronge te vazden represivo taj drakonikani mezúra, so aresena – taj vi tradena maj dur – pe ciganengo taj phirutnengo phandavipe sadekh khatar sa e kotora e francikane publikane trajoske taj sevimatange/servizonge.
Bute romen taj phirutnen naśavena khatar jekh fòrosko raipe dźi k-o aver, taj kodoleske naśtik te aćhaven nići pe cikni perioda, soske pe sila pe zòr ćhudena len khatar e thana kajso beśena. Maj but francikani territòria ćaćimaste si phandle angla ciganura taj phirutne, nadikh e nasvalimaske, melale taj phandade thana so si garade miśto angla avere beśutnenge jakha. Kadi situacia aděs si but dramatiko, kodolestar baro gin e ciganengo thaj phirutnengo patăla, ke e raimasko sa o apparato si mamuj lende, kaj te śaj mujalden a maj bare kotora lenge kulturako, vaj maj feder śaj kodolestar, ke kamena te phanden len zòratar khatar sa o francikano dostipe/societeta.
Sa kadă, e uní milă rromane migrantura pe francikani phuv aresena bi-manuśikane taj kafka-ikane politikura, so maj anglal rodela te naśavel sa e rromen khatar e Franca. Von
Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
336
beśena ande ćorrivane slum krujalimata taj maj butivar ćhudena len khatar e traśorne lagera taj khera kajso e rroma beśena bi-permisiako, naśavena len dźi kaj aver forosko raipe khatarso pale naśavdona. Avral kadala butivar astarena sila zór, azbavipe taj neglekcia taj kodolestar śaj te dikhel pe, ke lenge ćaćimata pharravena pe zurales sadekh ande sa e trajoske umala.
Pe avere vasteste naj seriozo publiko diskusia so dźala pala ciganura, phirutne taj rromane migrantura. O efekto kadale zordimatango astarde kadale averikane administraciendar sas, ke o rasikano pustisaripe mamuj e ciganura, phirutne taj romane migrantura ande Franca bares zurajlas, pe aver rig jekhvareste sa khoslas lenge patívale integraciake seriozna śajimata, so sas te dźan pala maśkarthemutne manuśikane xakajenge thamă kajso vi e Franca si phandadi. Nivar na dine palpale miśto e anti-ciganistikane rasizmoske ande Franca, taj lesko publiko sikavipe kerdilas sako divesutno taj siklo aćhar so skepisajvela pe e sankciake sa e formendar. Akana arakhela pe e mamuj-ciganizmoske taj phirutnenge diskusiaki darutni klima kajso dela pe phuterdo than e anglikrisimatange/stereotiponge sar lengo śajutno bezexaripe, rodena illegalone droma te arakhen pokin/poćin, von si strene manuś, naj len higenia taj naj len pativ karing o dostipe. E politikake aktora dena dumo kasave rasistikane vakerimaske pe sako nivelo, taj kodo butivar arakhela pe pe thanutno/lokalo nivelo ande diskusie te keren pe aćhavimaske/tordărimaske thana e phirutnenge. E śerutne na informuin e populacia pala phirutnenge taj ciganonge legitim ćaćimata – so si sigurardo ande Francikani thami1 – te aćhaven ande lengo foro, von feder śaj arakhen politikalo profito kana phenena e populaciake, ke e phirutnenge taj ciganenge invazie aresena ande lengo fòro, taj mothona pala sekuritetako, publikane tràbako taj sastimasko riziko.
E problemongo kidipe so arakhlas o ERRC ande Franca ande pesqo rodipe śaj te ginaven/drabaren telal :
1.1 Dujto Klasake Themutne : E phirutne taj e ciganura na barrabarr astarena penge Bazikane, Civilone taj Politikane Ćaćimata/xakaja
E Franca si pre-pindźardi sar e vuna taj o lurdo e moderne demokraciako taj individualone xakajengo taj slobodiako, dźi kaj but śel milă francikane themutnenge
1 Specifiko Thami gin 2000-614 khatar 5 Źulaj 2000 pala Phirutnengo Xulajaripe taj Beśutnipe (« Thami Besson »), so sas paruvdo ando nevo thamăripe. 337 Résumé en romani
fundamentalo civilone taj politikane xakaja bares azbavena pe, taj kado nići agordel ći ande varesavo protesto, taj na te liparas o publikano vazdipe kajso provokuisajle e Francikane Republikake anglune fundacie. Baro kotor kodole manuśengo ande kala azbavimata si e ciganura taj phirutne, so sikavela, ke von si rasistikane azbavimata ande pengo xaraktero. E dźene kas naj fiks khera vaj beśimaske thana, taj kajso beśena ande vurdona, trejlera vaj aver miśkimaski vatra (maj but lendar si ciganura taj phirutne) musaj te arakhel pe lende special phirimaske dokumentura. Maśkar e phirimaske dokumentura arakhena pe aver kategorie, taj sako sikavela aver nivelo pe policiako kontrolo. Dźene ko naśtik te den evidenca pala penge profesionalone aktivimata vaj regularo potin, musaj te nevăren penge phirimaske lila (phirimaske karta) kaj e policiako aćhavdin vaj k-e gendarmery sako trinto ćhon/masek. Dźene ko naśtik te sikaven penge phirimaske/cirkulaciake lila vaj ko naśtik te den len angle pe nevăripe śaj te astaren krisarimaske sankcie, śaj lovenge no vi śaj te phanden len.
E manuśa kas si kodola phirimaske lila numaj śaj te astaren pengo alosarimasko /votosarimasko ćaćipe, kana si pherde e trine berśengi perioda e « paśaldinimaski » k-o alome foro. Aver francikane themutne śaj te len kotor ande alosaripe kana pheren e śove ćhonengi beśutnimaski perioda kaj varesavo lokalo raipe. Specialo programura kerena pe e manuśenge bikhereske ko na beśena ande « vurdona, trejlera vaj aver miśkimaski vatra » ko pale śaj te alon pheren e śove ćhonengi perioda, kajso si phandle kaj varesavo foro vaj gav.
E manuśengo gin kas si phirimaske lila « paśaldine » k-e varesavo foro vaj gav naśtik te pherel (nadikh varesave non-standardone situacie) 3% e saste populaciako ando gav vaj foro. Soske von musaj te votosaren ande pengo foro vaj gav paśaldinimasko, kodolestar but ciganura taj phirutne kas si kodola phirimaske lila naśtik te alon penge phiravnes ko brakhelas/ferisarelas/arakhelas lenge intereson, ke von naśtik te keren maj but sar 3% e alosarne dźenengo. Duredereste, e ciganura taj e phirutne si phandle khatar e politikane kotorlinimaske/participaciake aver forme. E funkcionara butivar na vakerena lenca vorta/direkt, vi kana e problemura si maj anglal ande publikosko gindo pala phirutne taj ciganura vorta. Generalo feder boldena pe karing « maśkarne », ko pala lengo gindo dźanena taj hatărena/halovena paśa « ciganura ». Vi kana kerena pe e konzultativone institucie kaj te keren pe kadala habisti/na ćaće konzultacie (sar e Departamentoske Konzultativone Komisie pala Phirutne so kerela pe ando sako Francikano Departamento), e phirutne taj e ciganura ando sako vaj sadekh ando 338 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
sako suro/kejzo/situacia numaj cerra/xari dźene śaj te beśen pe komisie vaj lengo baś/glaso/hango numaj cerra pharipe inkerel.
1.2 Atako mamuj Trajosko Drom : Thamă, Politika taj Praktike pala phirutnengo taj ciganengo phirutnipe, aćhavipe taj pala lenge trajoske krujalimata
E ciganura taj e phirutne naśtisaren te beśen pe maj baro kotor e Francikane phuvako. E zakonura ande but thamă so sas adaptuime akana efektivo phenena ke e ciganura naśtik te beśen pe Francake phuvako maj baro kotor. Kadala si special : Artiklo 9 po Thami numero 2000-614 khatar 5 Źulaj 2000 pala Phirutnengo Xulajaripe taj Beśutnipe (« Thami Besson ») ; i Thami khatar 18 Tirdaraj (3to ćhon/masek) 2003 pala Andralutni Sekuriteta (« Sekuritetaki Thami) ; taj Thami numero 2003-210 khatar 1 Avgusto 2003 pala Foronge Raimaski Orientacia taj Planuipe taj pala Forongo Nevăripe (« Thami Borloo »).
Artiklo 9 ande Thami Besson vazdela pharo kikidipe, kajso e ciganura taj e phirutne naśtik te aćhaven avral e indikuime thana, numaj ande nesave but specifikone situacie. Sa kade, but foroske raimata na dikhen pengo godorvalipe/obligacia pala Thami pe foronge raimata kas si buteder desar 5000 beśne te keren jekh « aćhavimasko than » e phirutnenge te śaj beśen pe varesavi vrama okhote, e raimata na vazdine kasave thana. Akanutne estimacie ćhuvena o numero e ekzistuime aćhavimaske thanengo karing 6000, dźi kaj patăna ke maj cerra 35 000 sas te aven. Andral e 6000 so arakhena pe, maj cerra desar lengi dopaś aresen e legalone aźukarimatan so si pala infrastrukturaki taj krujalimaski adekvacia.
E Sekuritetaki Thami so sas adoptuime ande Franca ande Tirdaraj 2003 inkerel jekh kotor – k-o Artiklo 53 – so krisarel e ciganon taj e phirutnen ko zumavena penge kulturako fundamentalo aspekto : phirutnipe. Kado artiklo phenela, ke kodo si kriminalo akcia, kana jekh grupa kamel te parkuil/aćhavel vi pe skurto vrama pe varesavo than, kaj kamen beśen :
• Pe jekh phuv so si e foroske raimasko so pasuil kaj peske phandlimata karing e Departamentalo Plano dźamavdo pala Besson Thami ;
• Pe jekh phuv so si varesave thanutne raimasko taj so naj ande Departamentalo Plano (kade e maj but forura kajso si maj cerra sar 5000 beśutne vaj si vi forura maj but sar 5000 dźenenca taj von naj inkerde ando Plano) ;339 Résumé en romani
• Vaj pe varesavo aver phuv (privato, themesko, regionalo, departamentalo), kajso naśtik te sikavel pe evidenca pe permisia te beśen pe phuv, vaj o manuś kon las o ćaćipe te labărel i phuv naśtik te sikaven i permisia.
Krisa pe oprune legalone phagerimata si pre-phare : śov ćhon phandlipe, vaj 3750 Euro sar lovengi kris taj vi śaj te len a manuśestar o tradimasko lil śaj dźi pe trin berś.2 Avral kadala, sako vurdon lino te kerel pe e illegalone aćhavimaski akcia (taj kodo si butivar e ciganonca ko cirdavena penge mobilna khera kadale vurdonenca) śaj te lel pe taj konfiskuil pe e rajendar, nadikh kana o vurdon si e manuśesko kher.
I Thami Borloo kerdas jekh lista biś-taj-efta francikane foronca kajso maj cerra sar 20,000 dźene beśena, kajso e ciganura taj phirutne śaj te aćhaven pe varesavi vrama. But kadale bare francikane forondar si thana kajso e ciganonge taj phirutnenge but generacie beśenas taj kajso si len śaj familiake, socialone vaj profesionalone/butăke phandlimata.
Ćaćimaste e thana kaj so śaj te aćhaven e ciganura penge miśkimaske khera pe maj skurtone vaj pe maj lungone periodura si butenca maj cerra desar kadala legalone limitacie sikavena. Ćaćipnasa na numaj jekhe thaneske varesave kotora si phandle angla ciganura, no sadekh o sasto than, nadikh thana kajso sig śaj te nasvajven vaj na dićona. Butivar naśavena e familien khatar e thana kajso aćhaven, univar si te traden děsenca/divesenca anglalso śaj te aćhon varekaj, taj kadala thana si pre dur khatar e thana kajso trubunas te aven.
E phirutnengo taj ciganengo palpaldipe pala illegalone evikcie ćorrardola khatar e francikane kriselinako bilaćho registero te davavel pativ e phirutnenge taj ciganonge fundamentalone ćaćimatange. O ERRC kidas jekhetane empiriake dimasberśa/adatura/podatke ande pesko rodipe so kerdas karing kado Themesko Raporto, taj kodo sikavela ke e francikane kriselina banges krisaren taj na resena penge legalone godorvalimata te śaj den than e phirutnenge taj ciganonge te aćhaven. Duredereste, e phirutnengo taj ciganengo angluno ćaćipe sar o vortome aśunipe taj e opoziciaki procedura si butivar phaglo khatar e pindźardi « mangipe procedura » so phutrela drom e krisitoreske te del avri jekh decizia bizo te śunel e dźenen pe aver rig.
2 Artiklo 53(1) taj Artiklo 53(2), Sarbarrimaski Thami. 340 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
E phirutne taj ciganura ko kamena te kinen penge simadi maladona bare pharimatenca specifiko misto « pre-empcia » kerdi lokalone funkcionarondar opral lengo kinipe – kodo si akcia so blokkuil e tranzakcia. Von beśena maj dur e dàrasa, ke naśaven len khatar o than kajso aćhon misto e but francikane thamă taj regulacie so bàres limitisaren e territoria pe soste e karavanura śaj aćhon legal, vi pe privatone phuva, taj kodo butivar ćhivela pre phare krujalimata pe e uně linimaske śajimata.
1.3 Adekvatone Beśutnimasko Palpale Inkeripe e Phirutnendar taj Ciganondar
E ciganura taj e phirutne hatărena pharo azbavipe ande pengo ćaćipe te avel len adekvato beśutnipe naj vastno lengo trajosko drom – kado kerela pe vi kana nomadiko vaj beślo si ; naj vastno nići von te beśen pe oficialone aćhavimaske thana vaj pe pengi phuv ; naj importanto von te si barvale taj len penge śukara khera vaj te si pre-ćorre taj te rodena socialo źutipe francikane kancellariendar. O fakto, ke von avena khatar jekh specifiko etniciteta, aćhol butivar korkorro e vorba e kancellarienge, kaj ći dena e phirutnen taj ciganon adekvato beśutnipe.
E uně thana kajso e familie śaj te aćhon generalo si but telal e standardura vaj pativipe. E aćhavimaske thana si vorta ulavde/segreguime khatar e lokalone populaciake aver dźene. Von generalo beśena so dur so śaj khatar e normal beśimaske thana taj pe foronge raimaski maj durutni granica. Pe varesave thana e phirutnengo taj e ciganengo fizikalo segregacia kerel pe ćikale plajenca so krujal lela o aćhavimasko than, taj kade fizikalo ćhinen len khatar e krujalimata. E aćhavimaske thana sistematikalo si ćhivde/śute paśa gunujenge plaja, than kajso griźin pala gunuja, fabrika so nasvalarel vaj pollucia kerel, pe motorenge vaj cirdenge/vozonge/trenonge drom, butivar tela sirma bare rundźetosa/ kurrentosa/strujasa/armosa. Maj butivar kadala aćhavimaske thana seravena pe phandlimaske thana desar pe beśimaske. Kado efekto lela pe e manuśeske khatar kadale thanengo fizikalo vazdipe taj khatar o beśutnengo regularo kontrolo.
Vadźe/inke/mek opral, e ciganura taj phirutne ando them, ko beśena pe phuv so si lengi, butivar inkerena lender palpale o paji, rundźeto/elektrika taj gunujesko ingeripe, vi kana si pre-nasvale dźene vaj ćhavorre ko beśena po than.
Nesave maj ćorre taj maj marginalizuime ciganura taj phirutne beśenas ande slum-ikane krujalimata bute deśe berśenca pe thana kaj e funkcionara toleruisarde len. Garadindos khatar e populaciake aver dźene taj total xasarindos e bazikane infrastrukturatar 341 Résumé en romani
(sar o paji, rundź taj gunujesko ingeripe), kadala manuśa butivar si avri ćhivde/ćhute e krujalimaske darake, soske paśe arakhena pes e gunujenge plaja, thana kajso griźin e gunuja taj e fabrike so melaren o nem/lufto/ajero. Te dźana pe kadal mahala/kvartela, śaj lel pe i impresia ke o manuś dźala khatar o jekhto sundal/luma/sveto ando trinto sundal ande uni minutura.
E ciganonge taj phirutnenge diskriminaciake taj segregaciake forme si buhlarde kana dikhela pes pe e socialone kherango uźul-linipe/vundźile-linipe so si e dźenenge cerra lovenca (buśola pes « HLM »), dźikaj e themesko zakono prohibitisarel eksplicito kasavi diskriminacia.
1.4 Diskriminativo taj Azbavimasko phiravipe e thamărarne/zakonoske śingalendar taj kriselinake funkcionarondar
Atakura khatar e śingale si regularo xaraktero ando trajo e francikane phirutnengo taj ciganengo.
E śingale maj butivar avena but dźene, si lende marimaski rovli taj na murdarimaske puśke. E naśavimata pe sila, so si kerde sistematiko taj regularo, lena e forma e marimatango. Paśal, kana e śingale rodena varekas, kontroluil vaj arrestuil varekas maśkar kaste si jekh cigano vaj phirutno, atunći/posle/atoska von dźana pe sa e beśutne e thaneske sistematiko taj na numaj e individualone bidasles atakuin. Ande kala atakura policiako azbavipe butivar inkerel dźungali vorba (maśkar lende rasistikane), degradimaski griźa taj rumusarena vi lenge bută so kinde lovendar e ciganura taj phirutne. Univar labărena vi puśke ando traśorno drom taj vi marena dźenen fizikalo.
E phirutne taj ciganura xana diskriminaciaki dukh vi khatar e kriselinake kancellarie. Maj butivar inkerena len ando phandlipe anglal so inkerel pes i kris ande rodimaski faza taj tel-i kris, taj dićola ke maj butivar inkeren len ando phandlipe angla krisa sar e gadźen (na-romen). But dźene vakerena ke e krisa so phagena opral e ciganura si bi-vortimasko maj lungone sar e krisa so phagrena pe opral e gadźe.
1.5 Diskriminacia pe Socialone taj Publikone Sevimatango Pàśeresipe
Śel milă ciganura taj phirutne si phandle avri e socialone aźutimaske but averikane formendar so śaj te aresen e francikane themutne te śaj den len zor te len kher 342 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
uźule vaj te arakhen penge beśimasko than, soske e karavanura naj pindźarde sar beśutnimaski forma.
E phirutne taj e ciganura univar musaj te bolden pe karing parallel instituciengi drakhin so si numaj vaś lenge, kaj te śaj te len varesavo socialo aźutipe soske e themeske agenture naśtik vaj ći kamena te seven/servizuin len.
E phirutne taj e ciganura butivar naśtik te den ande publikane thana, sar ande najttklubura, barura, magazinura/bolci/balame vaj restauracie. Ći e sekurarimaske firme na sevena len butivar. Dźi kaj si zakono so krisarel e diskriminacia pala simadăngo taj sevimatango dinipe, o ERRC ći dźanela nisavo suro, kajso dine sankcia, kana varesave phirutnes vaj ciganos na sevde.
1.6 Diskriminacia pe aresipe k-e bută
But ciganura taj phirutne kerena love andar butăke forme so phandena pen e phirutnipnasa. E thamă, politika taj e lokalone funkcionarenge akcie zurales phararen e ciganonge taj e phirutnenge te śaj aćhaven penge karavanura, vi pe skurto vrama ande majbut foronge raimata ande Franca, taj kodo dela pre-pagubaslo/bilaćho efekto pe lengo śajipe te keren buti. Avral kodo, ande palutne dekada, e regulaciengo efekto sas, ke diskriminuisarde vi e bută so von jekhetane zumavenas te keren, taj kodolestar e ciganura taj e phirutne naśtik te keren love ando kodo drom, so von alosarde. E phirutne taj e ciganura aresen pe diskriminaciasa, kana si vorba pala bută pokinasa, kajso dela pe lenge buti kajso si baro riziko pala lengo sastipe.
1.7 Phageripe e ćaćimasko k-e siklaripe maśkar e phirutne taj ciganikane ćhavorra
E kotorlinimaske nivelura pala phirutne taj ciganikane ćhavorra si but telal, but ćhavorra na phiren k-i śkola taj but dźene lendar ternes peravdona latar. Si bare brigako, ke cikno gin e ciganikane taj phirutne ćhavorrengo opral e deśuduj berśa phirena ande śkola taj sa maj cikno gin si kaj śaj te pherel e maśkaruni śkola. Maj dureste, vi kana phiren ande śkola, e ciganura taj e phirutne numaj but telutne standardosko siklaripe śaj te len, butivar na siklaren len te ginaven/drabaren taj te lekhaven/ramon. Misto regularone naśavimata khatar pengo beśthan si pre phareste e phirutnenge taj e ciganonge te bićhaven penge ćhavorren ande śkola. Foronge śerutne van śkolake 343 Résumé en romani
direktora butivar na dena drom e ćhavorrenge te phiren ande śkola, dźi kaj si len legalo ćaćipe taj obligacia te phiren. E segreguime siklarimaske averikane forme si e realiteta bute phirutne taj ciganikane ćhavorrenge, kasave si e segreguime śkole, śegreguime klasura, mobilo śkolake kotora. Kadi situacia butivar agordola, soske naj nisavo fleksibilizmo taj « phurt » programura ande gadźikane śkolange sistemura taj naj adekvato adaptacia k-e phirutnenge specialone trebalimata (sar te kerel pe jekh efektivo sistema te rekorduil pe taj te molarel pe e ćhavorrengo śkolaripe ko phirena kaj te śaj dźan maj dur penge śkolara pe jekh vatra pe kaver). Prebute phirutne taj ciganikane ćhavorren bićhavena ande « Aplikuime Generalo taj Profesionalo Siklaripe » (« SEGPA ») maśkarune śkole so dena specifiko siklaripe e ćhavorrenge ko naśti te siklon miśto misto socialo, kulturikane vaj intelektualone kauze/aćha.
E duśle principlura ramome ando Cirkular No. 2002-101 pe 25 Grastornaj 2002 pe « Phirutne ćhavorrengo taj na-beśle familiengo śkolaripe » aresen te vazden e ciganikane taj phirutne ćhavorrengo kotorlinipe ande francikani siklăripnaski sistema. Kadala principlura aćhile simbolikane patuma/pasura/krokura taj naj ćaćikane. Innovativoen iniciativure aćhon maj butivar pe lokalo nivelo taj e centralizuime koordinacia naśtik te arakhel pe.
1.8 Thami Mamuj Diskriminacia
Ande palutne berśa, kaj te del pe palpale pe Evropake progresura, line pe patuma te anaven jekh nevi thami mamuj e diskriminacia taj te laćhardol e ekzistuime thamăngo labăripe. Numaj cerra krisarimata śaj arakhen pe te dikhela pe o buhlipe e diskriminaciake problemako. O ERRC ći dźanel pe nisavo suro kajso varesavo legalo dźeno sas krisardo pala diskriminacia mamuj phirutno vaj cigano perdal kala zakonura.
Dureder, e rama e civilone taj administrativone zakonengi te maren pe mamuj rasikani diskriminacia zurajli ande palutne berśa. No ći atunći na inkerela sa e umala e trajoske sarso kamlola pe pala Francake phandlimata k-e internacionalone zakonura sar o ICERD.
Kado trubul te buhlardol maj dur te śaj inkerel aver ćaćimata : e justiciaki administracia, so inkerel e dźenenge sekurarimaski protekcia, politikaki participacia, so inkerel o ćaćipe pe alosaripe, te alosardon, te len kotor ande guverno taj ande buti ande orsavo kotor e themesko, taj te avel barrabarr resipe k-e publikane sevimata ; 344 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
te avel len o ćaćipe te miśkin pe taj te beśen maśkar e themeski granica ; o ćaćipe te kiden pe ande paćasle beśimata taj organizacie.
1.9 Bimanuśikano taj xasarimasko griźipe pala rromane migrantura
E Franca adoptuisardas drakonikani politika, so legalo śaj pućhel pe, karing e but milă rromane migrantura ko si pe laki phuv. Lengo maj angluno res sas te phutren drom e rromane migrantonge te mukhen o them. Kade e rromane migrantura hatărena, ke lenge ćaćimata phagerdona sadekh ande trajoske sa e umala, so lela kumulativo taj seriozo efekto pala peste taj butivar bimanuśikano taj xasarimasko griźipe. E strene rrom maj bute dromende beśena maśkar ćorrivane krujalimata ande sigo vazdime lagera taj butivar pe sila naśaven len vi khotar śaj e policiake atakosa so butivar zoratar dźala taj vi but drom daraven pe rromende, roden len, mujalden taj phagren lenge simadă taj vi aversar azbavena len. Kana von zumavena te keren buti te śaj trajin/dźiven peske (misalaqe bikinen luludă vaj źurnala, thoven e vurdonenge felăstri/dźama, baśavena gila vaj mangena love), e policia sako drom azbavel len. Kodola so mangena love, śaj astaren bari krisarimaski sankcia, śaj vi pe sila naśaven le e themestar. Bute ćhavorrenge ći dena o śajipe te resen k-o śiklăripe. De o milaj 2002 drastikano vazdipe śaj te dikhel pe ande rromengo naśavipe e Francatar, vi legalone rromane migrantongo khatar francikani phuv.
Kerde pe kollektivone naśavimata, so phagerdas maj bute kotora e thamăke, sar o Artiklo 4 ando Protokol 4 ande Evropaki Konvencia pe Manuśikane Ćaćimata.
Dikhindos maj dur, e rrom so mangena azilo xana diskriminacia te dikhena pe lenge śajimata pala beśutnipe taj socialo aźutipe, kajso but lendar musaj te beśen ande mahala taj khera bililengo.
O raporto khatar o ERRC agordola rekomendacienca so dźana e francikane raimaske te akharen e kancellarien te pativaren penge phandlimata paś-e themeske taj sarethemenge manuśikane xakajengi thami (ćaćimatango zakono) taj te del pe efektivo reparacia e viktimonge. Pala kadale raportoske arakhimata, o ERRC mangel e francikane kancellarien te reaguin pe e avinde propozicie :
1. Te semnatin taj te ratifikuin e Ramaki Konvencia pe Selikane/Nacionalone Minorengo Brakhipe/Ferisaripe/Protekcia, taj te pindźaren e ciganon taj e phirutnen sar selikani 345 Résumé en romani
minoriteta taj te khosen pengo cirdipe khatar artiklo 27 ando Maśkarthemutno Pakto pe Civilone taj Politikane Xakaja.
2. Te len sigo patuma/pasura te pharraven e akanutni bikrisangi klima pe rasistikane vakerimata pala ciganura, phirutne taj e rromane migrantura taj te keren sar barr ke a mamuj-ciganikane vakerimata sigo taj zurales si sankcionime. Te duślaren e francikane publikoske, ke kasave vakerimata na toleruin pe.
3. Publiko te pindźaren taj te jertisaren pala ciganongo taj phirutnengo phandlipe ande IIto Sundalesko Maripe (IISM). Te keren pe seravimaske barra pe e phurane phandlimaske lagerenge thana taj te bianen programura so serena pala ciganikane taj phirutne viktimura ande Francaki IISM politika. Den dumo e rodimaske so adudarel e phirutnengo taj ciganengo griźipe ando IISM.
4. Te keren sar barr, ke e ciganongi taj phirutnengi historia pe francikani phuv, informacia pala antropometrikane pustikelina taj lengo IISM phandlipe, si inkerde sar sumbor kotor ande siklărimaski kurrikula.
5. Te kiden statistika, phagerdi pala etniciteta, kaj te śaj kerel pe zuralo monitoring pala ciganongi taj phirutnengi taj avere minoritetikane grupangi situacia ande trajoske/źivotoske/văcake klidune umala sar : kotorlinipe ande politika, beśutnipe, siklăripe, dostimaske sevimata, sastimasko griźipe, vortimasko sevipe, relacia e policiasa tmd… Kodo monitoring kamlola pe kaj te śaj arakhen pe e minoritetikane grupange problemura taj te dźamaven pe adekvatone bilarimata. O monitoring trubula te kerel pe pala dimasberś brakhimaske taj vortome garadimaske principlura, so vazdela pes pe sistema, kaj sako pestar śaj phenel peski sel, taj sakoneske duślo si te mothon soske kidel pe i informacia.
6. Te kerel pe specifiko rodipe kaj te dikhel pe e rasikane diskriminacienge gin taj frekvenca, so dźana mamuj e ciganura, phirutne taj rromane migrantura ande sektoralone umala sar ando siklăripe, butăripe, beśutnipe (so inkerel o socialo beśutnipe), ande sastimaski griźa taj ande socialone aźutimaske taj sevimatange programura. Kodo rodipe trubulas te del informacia pala manuśengo numero ko sas krisarde misto rasikani diskriminacia kerdi mamuj ciganura, phirutne taj rromane migrantura.
7. Imediat te del pe palpale pe sa e rasatar diskriminativone taj azbavimaske aspektura ande « Thami gin 69-3 khatar 3 januari 1969 pala ambulantone aktivimatango 346 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
zumavipe taj o reźim so si pala manuśa ko krujaren ande Franca bi jekhe kheresko vaj rezidencako phandle thaneste ».
8. Te arakhen pe taj te khosen pe e diskriminativone regulacie taj administrativone pharimata so cirdena palpale e ciganon taj e phirutnen te śaj len penge nacionalone identitetake karta.
9. Te eliminuin pe e diskriminativone krujalimata pala ciganongo taj phirutnengo alosarimasko ćaćipe so vazdela pe khatar e Thami biandi pe 3 januari 1969, kodo inkerela e askeptura pala 3-e berśengi perioda e paśaldinimaski taj e 3% kvota e manuśengi kas si kodola phirimaske lila taj śaj votosaren ande varesavo forosko raipe. Te keren pe pozitivone patuma te keren sar barr, ke e ciganonge taj e phirutnenge baśa si miśto phiravde pe e francikane politikake trajoske sa e nivelura.
10. Te len pe patuma sigo te keren sar barr, ke e ciganura taj e phirutne śaj te zumaven pengo ćaćipe te len kotor ande publikoski sama pe thanutno taj pe themesko niveli, so pasuil paś-o Artiklo 25 ando Internacionalo Pakto pe Civilone taj Politikane Ćaćimata taj paś-o UN Komisia pe e Rasikane Diskriminaciako Mujaldipe « Generalo propozicia XXVII pe diskriminacia mamuj rroma ». Te agorden vorta akana e aćhara, kajso lena godi pala lenge trebalimata taj interesura khatar maśkarne gadźe taj na korko e phirutnendar taj e ciganondar, te keren sar barr ke varesavo konzultativo trupo phutrel o drom e phirutnenge taj ciganonge pala lengo ćaćo taj zuralo kotorlinipe.
11. Te len pe pozitivone patuma te keren pe krujalimata, so dena sar barr, ke e phirutne taj ciganura śaj beśen penge sar kamena, te beśena ande kherande vaj te beśena phirindos, mukj alon von sar kamen, taj kodo pasuila paśa barrabarrimasko/egalitetako taj non-diskriminaciako principlo.
12. Te sarbarraren (te sekuraren) ke e phirutne taj ciganura ko phirena, śaj te zumaven sa pengo ćaćipe te miśkin pe sar kamen taj o ćaćipe te avel len laćho kher taj vi te brakhen len khatar naśavipe pe sila pe zor.
• Te khosen, akana taj na maj palal, Artiklo 53 taj 58 ande « Thami khatar 18 Tirdaraj 2003 pala Andralutno Sarbarripe » taj khosen vi Artiklo 15 ande Thami no. 2003-710 khatar 1 Avgusto 2003 pe « Foronge raimatangi orientacia taj planuipe taj forongo nevăripe ».347 Résumé en romani
• Te sarbarraren, ke kerena pe aćhavimaske thana ande foronge raimata ande sa o them, sar mangel pes ande « Thami no. 2000-614 khatar 5 Źulaj 2000 pala Phirutnengo Xulajaripe taj Beśutnipe » (dureder « Thami Besson »). Te keren sar barr, ke kadala aćhavimaske thana pasuin paś-e moraliteta, specifiko paś kadala : sevimatango linipe, krujalimata taj infrastruktura ; kaj si o than val śaj te beśel pe khote vaj van.
• Te len pe pozitivone patuma te sarbarraren ke e ciganura taj e phirutne aresen pe bas/ dosta thana kaj śaj te aćhaven taj khote arakhena e moralitetake bazikane standardure.
• Te kerel pe sar barr, ke e phirutnen taj e ciganon na beśarena pe territoria kajso aresena len bilaćhi sastimaski taj krujalimaski dar taj na rodel len e rasikane segregaciaki traś.
• Te aćhaven e naśavimatange aćhara so kerena pe sila mamuj ciganikane taj phirutne familie so aćhaven ande foronge raimata, kajso phagren e adekvatone beśutnimasko ćaćipe.
• Te keren sar barr, ke e thana kajso keren pe diskriminativone regulacie taj politika, kajso na mukhen e phirutnenge taj ciganonge te beśen, khote arakhel pe pherdi sankcia.
• Akana pe kado vaxt te keren pe ćaćikane taj buhlarde konzultacie maj telal e ciganonca taj phirutnenca kaj te keren pe adekvatone bilarimata/solucie pe lenge beśutnimaske trebalimata, vi pe aćhavimaske thana taj vi pe lenge aver problemura so si len.
• Sigo te keren pe alternativone bilarimata pe skurtone vramake aćhavimaske thana, kaj te del pe palpale pe phirutnenge taj ciganonge beśutnimaske trebalimata, sar te śaj vazden penge familiake thana.
13. Te keren sar barr, ke o ćaćipe pe adekvato beśutnipe, so inkerela brakhipe mamuj naśavipe zoratar, si pherdo garantuime e phirutnenge taj e ciganonge te ko kinena penge phuv.
• Te len sama, ke ande but thamă taj ande politika, so griźisaren pala phuva, forongo planuipe, taj pala resipe k-e publikani infrastruktura, te aven vi dosta zurale kotora pala ciganongo taj phirutnengo trajosko drom taj specifikone trebalimata, sar te śaj train pe pengi phuv ande karavano, taj kodo na agordel pe ande diskriminacia mamuj e jekhetanimaske dźene.
• Len sama ke e foronge raimata na paruven penge ‘pre-empciake’ zòra ando illegalo drom, kaj te preventuin e phirutnengo taj ciganengo simadăko bikinipe. 348 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
• Te keren sar barr, ke del pe beśimasko than e ciganonge taj e phirutnenge, taj ande foronge regulaciengo labăripe dikhen pe miśto e fundamentalone manuśikane ćaćimata sar e adekvatone beśutnimasko ćaćipe, e ćhavorrengo siklăripe, e ćaćipe k-e sastimaste taj o ćaćipe kaj te na azbavel pe ando privato taj familiako trajo/dźivipe.
• Te prindźaren pe e karavanura sar beśutnimaski forma.
• Te direktuin e lokalone kancellarien, kaj te del pe bi-adźukarimasko paji, rundźeto, kanalizacia taj aver bazikane krujalimata e familienge kaske kadala na den pe, phagerindos e foronge regulacie.
14. Te len pe pasura vorta akana, kaj te vazden pe e krujalimata ande phirutnenge taj ciganonge beśimaske thana pe etikake fundamentalone norme, taj te śerarel pe e dźenengi beśutnimaski situacia, ko beśena but vaxt/vrama/ciros pe thana bidino svatosko e rajendar. Vaj te den pe aver beśimaske śajimata so pativaren e etikake norme. Sa e programura taj lengo ćaćvaripe/implentacia trubul kondźardo/getosardo taj ćaćvardo ande jekhetano godăripe e dine ciganikane taj phirutne familiange kotorlinimasa.
15. Te del pe sar barr, ke e rromane phirutne xutrena pherdi garancia pala beśutnimaske ćaćimaske sa e aspektura, so inkerela peste e anglune trebalimata, sasto krujalipe taj beśutnimasko sarbarraripe/sekuraripe. Te kondźarel pe/getol pe politika godăsa po nivelo e departamentosko, regiako taj themesko so resela te del śukar beśutnimaske bilărimata e rromane phirutnenge, kon akana beśena ande lagera taj khera so von astarena bi e rajengo mukhipe. De akanara te aćhaven pe e sila-zorake naśavimatangi praktika, kajso bićhavena e romane phirutnen khatar jekh foro dźi k-o aver.
16. Te keren pe programura, so agorden e diskriminaciake taj segregaciake praktike, kajso e ciganura taj e phirutne naśtik te aresen k-o HLM (socialo beśutnipe) taj te sekuraren e mamuj-diskriminaciake thamărimasko labăripe mamuj e dźene, kon kerena kodi diskriminacia.
17. Te keren pe xurdikane taj lungone vramake rodimata pala sa e misala, kajso e policia phiravdas pe mamuj e ciganura, phirutne taj rromane phirutne ando bilaćho drom, taj e bezexaslen te ingren k-o krisipe imediat taj te del pe kompenzacia e viktimonge. Te agordel pe e praktika, kajsp kollektivo dźana pala grupa e ciganongi, phirutnengi taj e rromane migrantongi ande rodimata, kontrola taj arrestura taj vi e rasikane profilongi praktika. 349 Résumé en romani
18. Te keren sar barr, ke pherdo rodene pe e raportura pala rromane migrantongo azbavipe khatar i policia, taj kaj e policikiake funkcionara kon kerena bilaćhipe khatar pengi zor, kodo miśto krisarel pe.
19. Te lel pe adekvato programo, so sekuraren, ke na daraven pe manuśa, kon śaj sas viktimura e thamăke funkcionaronge bilaćhe griźimaske, vaj averćhandes te na aćhaven len te ćhon vorba pe kris kana dukhaven len, sar kana e śingale keren te pokinen bezexenge love e dźene, ko kamen te den vorba e rajenge pala pengi dukh.
20. Te kerel pe xurdikano rodipe pala ciganengo, phirutnengo taj rromane migrantongo krisarimasko griźipe, kaj te arakhen pe e diskriminativone praktike, taj te geton pe zurale programura so aćhaven kasave praktikon.
21. Te kerel pe sar barr, ke ciganura taj e phirutne barrabarr/egal aresen o socialo aźutipe. Te hatăren e karavanon taj e miśkimaske kheran sar beśutnimaske forme kana del pe beśutnimasko aźutipe, kajso e manuśa ko beśen ande lende śaj astaren e beśutnimaske aźutimaske sa e forme so śaj len dźene ko beśen ande beśutnimaske aver forme. Sar alternativa, kondźaren specifiko źutipe, kaj te keren sarbarr, ke e ciganura taj e phirutne śaj te le sa kodo nivelosko aźutipe pala beśutnipe so vi e aver francikane themutne.
22. Te geton pe specifiko uźulimaske programura kaj te den zòr e ciganon taj e phirutnen, ko aver drom naśtisaren te len uźule, te kinen penge simadi.
23. Te keren pe buhlarde programura, so sarbarraren, ke e ciganura taj e phirutne śaj aresen pherdo taj barrabarr e socialone sevimata ande publikane viramlina/kancellarie, taj naj inkerde ande uladi sistema e socialone sevimatango. Te keren sar barr, ke sa e funkcionarra ande socialone sevimaske viramlina xutrena adekvato treningo te śaj aresen e ciganonge taj e phirutnenge specialone trebalimata, taj kadala funkcionara te dikhen kodo sar kana si godorvale/responsibilone te aźutin e phirutnen taj e ciganon, kaj te xutilen barrabarr aresipe k-e socialone sevimata. Te roden pe e mothovimata, kaj e phirutnenge taj e ciganonge fajlura ingerde sistematiko khatar e themeske institucie ande varesave departamentura, taj te len pe adekvato patuma te sastăren kadi problema.
24. Te sekuraren, ke e rromane migrantongo ćaćipe k-o sastipe si pherdo garantuime, sar e śajimata te aresen a sastărimasko griźipe taj te beśen ando sasto krujalipe.350 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
25. Te sarbarraren, ke sa pala diskriminaciake mothovimata mamuj phirutne taj e ciganura kaj te aresen e publikane sevimata, sar o sarbarraripe taj sar e publikane sevimaske vazdimata, sa rodena pe taj adekvato krisaren pe taj sastăren e viktimongi dukh. O akanutno mamuj-diskriminàciako thamăripe pala kadi umal, pherdo trubulsas te lel pe vastende, taj te duślarel pe sa e dźenenge, ko dena publikano sevipe, ke i diskriminacia mamuj ciganura taj phirutne na dikhel pe bikhanćesko.
26. Te len pe pozitivona patuma, so sarbarraren, ke e phirutne taj ciganura śaj profituin barrabarr khatar pengo ćaćipe k-e buti. Te lel pe sama, ke e phirutne taj e ciganura śaj te aćhaven ande foronge raimata ando sa o them. Te vazden pe programura so sastăren o diskriminativo efekto e bute regulaciengo so si pala but bută opral phirutnenge taj ciganonge butăke śajimata, sar i Thami no. 96-603 « Pala śeftongo taj paruvimatango dzămavipe taj buhlaripe ». Te sekuraren, ke sa e diskriminaciake mothovimata – pala resipe k-e bută pokinimaske – pherdo roden pe taj sa e diskriminaciake misala adekvato krisardon taj e viktimura si kompenzuime. O akanutno mamuj-diskriminaciako thamăripe kamlol pe te le pe sa e vastende, dźi kaj duślarel pe sa e butărnenge, ke i diskriminacia mamuj ciganura taj phirutne ći toleruin pe.
27. Te lel pe sama, ke e ciganonge, phirutnenge taj rromane migrantonge ćhavorra śkolake berśenca aresen k-o siklăripe ando na-ulavdo śkolako krujalipe.
• Te keren sar barr, ke miśto dikhel pe e ćhavorrengo ćaćipe taj obligacia te phiren ande śkole kana keren pe e phirutnenge, ciganonge taj rromane migrantonge sila naśavimata.
• Te len pe pe phikende pozitivone akcie ando sa o them ando śerardo drom, kaj te lel pe sàma, ke śaj te len kotor e phirutnenge taj ciganikane ćhavorra ande śkolipe vi kana phiren, taj te sarbarrarel pe/te sekurarel pe vi e siklărimasko durutnipe.
• Te lel pe sàma, ke e lokalone funkcionarra sistematiko registruin e phirutnenge, ciganonge taj rromane migrantonge ćhavorren and lokalone śkole, taj na te dikhen so vrama beśena von pe foroske raimaski phuv, taj kana e dada taj deja barem śaj den e trebalutne dokumentura imediat.
• Xurdikanes te dikhen pe sa e dukhake mothovimata pala diskriminacia e phirutnenge, ciganonge taj rromane migrantonge ćhavorrendar ande śkolaki sistema, taj te sekurarel pe, ke ande kasave misala lena pe sa e vastende e krisarimaske patuma taj o mamuj-diskriminaciako thamăripe.351 Résumé en romani
• Te del pe treningo pala mamuj-diskriminacia taj informacia pala relevanto mamuj-diskriminaciako thamăripe e siklărrenge taj śkolake funkcionarronge ando sa o them.
• Te inkren pe materiala pe ciganongi taj phirutnengi historia ande Franca ande śkolaki kurrikula sar maśkaruno kotor ande verver/diferentone siklimaske umala. Te inkeren e ciganon taj e phirutnen ande kasave materialongo getosaripe taj te len sàma na te inkeren rasistikane anglikrisimata/stereotipura.
• Biadźukarimasko te len pe patuma te agorden pe e ulavde siklărimaske forme taj te siklăren e phirutne taj ciganikane ćhavorren ande savorrengi śkolaki sistema e avere raklorrenca. Kaj trubuna phurtake/podoske programura taj specifiko aźutipe, te keren sarbarr, ke e śkolande si sa so trubun paś-e programura, taj te lel pe sàma, ke kadala programura na paruvena pe p-i forma e ulavimaski/segregaciaki.
• Te den pe sa so trubun, te sekurarren, ke e phirutne taj ciganikane ćhavorra kon aresen a kollegiake berśa taj aćhile palal penge siklimasa te śaj xutren o trebalutno aźutipe ande śkole savorrenge, taj numaj te bićhaven len ande Segpa śkòle.
28. Biadźukarimasko te ćaćvaren i Thami gin 2002-101 khatar 25 Grastornaj 2002 pala « Phirutne ćhavorrengo taj na-beśle familiengo siklăripe » ando śerardo drom ando sa o them.
29. Biadźukarimasko te adoptuin nevo mamuj-diskriminaciako thamăripe so pasuil paśa akanutne Evroputne taj aver maśkarthemutne kućimata, taj pasuin pe paśa śerala ande Evropaki Konvencia pala Manuśikane Xakajengo taj Mestimasko Brakhipe taj e Maśkathemutni Konvencia pala e Rasikane Diskriminaciake Sa e Formengo Peravipe. Specifiko śaravingos e avinde umala : e krisarimaski administracia, sar e dźenenge sekuritetako brakhipe/feripe/protekcia ; politikako kotorlinipe, sar o ćaćipe te alon, te alosardon, te len kotor ando raipe taj ande publikani sàma pe sa e nivelura, taj te avel vi barrabarr resipe karing e publikane sevimata/servizura ; o ćaćipe te miśkin pe mesto/slobodo taj te beśen kajso kamen maśkar e themeske grànicura ; o ćaćipe te kiden pe pàćasa kana taj sarso kamen taj te jekhajven.
30. Te sarbarraren ke o akanutno mamuj-diskriminaciako thamăripe si zurales ćaćvardo. Te vazden e krisitorrenge taj prokuratorenge jakha pe rasikane diskriminaciake problemura taj e probaciake pharimata (te sikavel pe evidenca). Te del pe xurdărdi 352 Hors d’ici ! Anti-tsiganisme en France
informacia e magistratonge taj e thamărimaske funkcionarronge ando sa o them pala neve mamuj-diskriminaciake regule taj pala lengo vastnipe/vaźnipe te le pe k-e vastende zurales. Te kerel pe jekh informaciaki kampană so kamel te aresel e generalone publikos, kaj te vazdel e jakha pala Franckao mamuj-diskriminaciako thamăripe.
31. Te kerel pe sar barr, ke i « Bari Kancellaria vaś o màripe mamuj diskriminacia taj vaś barrabarripe » lela sas so trubul la, biumblavdipe taj kompetenca te śaj pherel pesko mandato.
32. Biadźukarimasko te ratifikuin Protokol gin 12 ande Evropaki Konvencia pe Manuśikane Ćaćimàta.
33. Te aćhaven pe e rromane migrantonge diskriminativone naśavimata taj e kollektivone naśavimata so aresen e rromane migranton.
34. Te śaj bolden pe e dźene ko sas naśade e Francatar illegàlo, taj te del pe kompenzacia materiake, emociake vaj avere dukhake so kerdas o illegalo naśavipe khatar i Franca pe sila.
35. Te aćhavel pe o diskriminativo griźipe e rromane migrantongo, so mangen azilo.
36. Te sarbarraren o pherdo labăripe e brakhimaske/ferisarimaske/protekciake kućimatange so si inkerde ande Geneva konvencia pala naśadengo status, sar pala rromengo ko rodena azilo, na bisterindos ke e Unisarde Nacienge Komisareski Kancellaria pala Naśade (UNHCR) duślàrdas, ke e naśade si na numaj e manuśa kon naśen khatar e tortùra vaj khatar aver seriozo dukh vazde pe rasikani, etnikani taj patăimaski bàza, no ke e diskriminativone programura so kerena pe bi-silako śaj aresen pe naśavimasko nivelo.
37. Pe maj ùće nivelura te del pe duma pala rasikani diskriminacia so kerel pe mamuj e ciganura, phirutne, rromàne migrantura taj avera, taj te duślàrel pe ke o rasizmo na toleruil pe. 353 Résumé en romani
REPORTS BY THE EUROPEAN ROMA RIGHTS CENTRE
In Search of Happy Gypsies: Persecution of Pariah Minorities in Russia
(May 2005)
The Non-Constituents: Rights Deprivation of Roma in Post-Genocide Bosnia and Herzegovina
(February 2004)
Cleaning Operations: Excluding Roma in Greece
(April 2003)
The Limits of Solidarity: Roma in Poland After 1989
(September 2002)
State of Impunity: Human Rights Abuse of Roma in Romania
(September 2001)
Campland: Racial Segregation of Roma in Italy
(October, 2000)
A Special Remedy: Roma and Schools for the Mentally Handicapped in the Czech Republic
(June, 1999)
A Pleasant Fiction: The Human Rights Situation of Roma in Macedonia
(July, 1998)
Profession – Prisoner: Roma in Detention in Bulgaria
(December, 1997)
No Record of the Case: Roma in Albania
(June, 1997)
The Misery of Law: The Rights of Roma in the Transcarpathian Region of Ukraine
(April, 1997)
Time of the Skinheads: Denial and Exclusion of Roma in Slovakia
(January, 1997)
Sudden Rage at Dawn: Violence Against Roma in Romania
(September, 1996)
Divide and Deport: Roma and Sinti in Austria
(September, 1996)
To receive reports by the European Roma Rights Centre, please donate 30 US dollars or
25 Euro per report to cover printing and shipping costs.
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