dimanche 27 février 2011

Briseuse de préjugés



Par Olivier Berthelin, Gazette des communes 14/02/2011
Infirmière du groupement d'intérêt public « Accueil des gens du voyage en Ille-et-Vilaine », Annie Egu combat les idées toutes faites.
«Même sans eau courante et sans électricité, les voyageurs font de gros efforts du côté de l'hygiène, ils trouvent toujours le moyen de se laver, même à l'eau froide s'il n'y a rien d'autre », constate Annie Egu, qui prend plaisir à surprendre ses interlocuteurs en dénonçant les lieux communs sur le manque d'hygiène des gens du voyage. Infirmière du groupement d'intérêt public (GIP) « Accueil des gens du voyage en Ille-et-Vilaine », elle précise qu'elle n'a pas pour mission de promouvoir l'image de marque des voyageurs, mais de faciliter les relations entre ceux-ci, les soignants et les administrations. Mère de famille, aucunement aventureuse, elle n'hésite pourtant pas à affronter les angoisses des uns et les soupçons des autres dans des situations parfois tendues. Elle doit parfois déployer beaucoup d'énergie pour rassurer des parents qui craignent qu'on ne leur retire leurs enfants et calmer des médecins, affolés de devoir ausculter un patient en présence de ses proches. Les sourires qu'elle esquisse en évoquant des situations parfois surprenantes n'ont rien de condescendant.

Rassurer.

Soignante expérimentée, elle comprend les contraintes qui pèsent sur ses collègues et, fréquentant au quotidien des familles du voyage, elle sait que des attitudes parfois déroutantes n'ont rien d'absurde ni d'irrationnel. « Il faut rassurer aussi bien les familles que les agents des autres services, les médecins et les élus. Les familles ont peur des institutions et, à l'inverse, les intervenants qui ne connaissent pas les voyageurs abordent souvent les relations sur le mode du soupçon ou de l'incompréhension », explique-t-elle. « Mais, lorsqu'il y a un problème de santé, je peux compter sur les élus et les agents des communes qui recherchent des solutions, même quand la famille concernée est en conflit ouvert avec eux pour des questions de stationnement ou d'urbanisme », précise la spécialiste qui, dans le cadre du processus de révision du schéma départemental d'accueil, a travaillé à la coordination des acteurs de santé. L'esprit ouvert, soucieuse de la précision des faits et d'analyse, elle combat autant les préjugés à l'égard des élus et des territoriaux que ceux qui visent les voyageurs. Ayant débuté sa carrière professionnelle dans les métiers de la banque, avant de changer de voie, une dizaine d'années plus tard, en devenant infirmière, Annie Egu regarde avec un certain recul les polémiques autour de ce sujet sensible.

Nouer des relations de confiance.

« Dès le début de mes études d'infirmière, je me suis orientée vers la santé publique, qui prend en compte tous les aspects de la personne, plutôt que vers des spécialités plus techniques », raconte celle qui pratique des soins au quotidien lorsqu'elle visite des familles. « Sauf pour les enfants qui sont l'objet de toutes les inquiétudes, les gens du voyage ont plutôt tendance à ne consulter le médecin que lorsqu'ils ne tiennent plus debout, le travail de prévention est donc particulièrement nécessaire », explique l'infirmière, qui partage son temps entre le terrain et les interventions comme personne ressource auprès des administrations et des professionnels de santé. Forte d'une expérience dans la médecine du travail, elle s'est retrouvée par hasard sur un poste dédié à cette population particulière qu'elle ne connaissait nullement auparavant. « La nécessité de comprendre une autre culture et tous les dialogues nécessaires pour nouer des relations de confiance entre les familles, les soignants et les administrations ajoute une dimension passionnante à mon travail », confie l'infirmière, qui assume un rôle d'intermédiaire depuis dix ans.
BIO-EXPRESS
1980 : au cours de sa scolarité, elle effectue un stage dans un centre de soins, qui sera déterminant dans ses choix ultérieurs.
1986 : entame sa carrière dans les services comptables d'une banque parisienne.
1996 : passe le concours d'entrée à l'école d'infirmière de Rennes.
1998-2000 : diplômée d'Etat, elle effectue des remplacements dans la médecine du travail.
2000 : infirmière de l'association Gens du voyage Ulysse 35, devenue, en 2009, GIP.

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