mercredi 8 décembre 2010

Rapport : les aires d’accueil des gens du voyage en octobre 2010



Tout juste rédigé, le rapport de l’Inspection générale de l’administration du développement durable, tombe quelques jours avant que la mission de l’assemblée nationale ne remette ses conclusions. Dans un contexte où les parlementaires devront, dans les prochains mois s’emparer des dossiers de l’habitat et de la citoyenneté des Gens du Voyage, ce document officiel brosse l’état des lieux de la situation.
Dans un premier temps les Dépêches tsiganes vous livrent le document. Il apporte des éclaircissements sur des questions très débattues mais manquant de données précises. Le coût des aires d’accueil, la prise en compte des différents types d’habitats par les schémas départementaux, la répartition des compétences entre les Communes, les EPCI et les services de l’Etat, les modes de gestions.
Les prochains flashs infos tsiganes et le blog vous donneront   prochainement les réactions et les analyses des principaux acteurs.
OB  


Les aires d'accueil des gens du voyage
etabli par
Patrick LAPORTE
Inspecteur general de l'administration du developpement durable
Octobre 2010
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Sommaire
Introduction..............................................................................................................3
1. Les schémas départementaux pour l'accueil des gens du voyage doivent
être achevés...............................................................................................................7
1.1. Un diagnostic en demi-teinte de la situation actuelle..................................................7
1.1.1. Les 2/3 des places prévues par les schémas ont été financées et la moitié des
places ont été mises en service fin 2009..................................................................7
1.1.2. Les normes techniques ne constituent pas le principal motif de cherté des
aires..........................................................................................................................8
1.2. Une nouvelle impulsion doit etre donnee pour permettre l'achevement du programme
fixe dans les schemas departementaux...........................................................................10
1.2.1. Le transfert de compétence aux ECPI............................................................11
1.2.2. Une consultation renforcée des communes concernées................................12
1.2.3. L'extension de la maîtrise d'ouvrage aux organismes du logement social
( HLM , SEM, organismes agréés)...........................................................................13
1.2.4. Les schémas départementaux devraient tenir compte de l'ancrage progressif
des gens du voyage sur leurs territoires...................................................................14
1.2.5. Le pouvoir de substitution du préfet, une fois rénové, devrait pouvoir être
utilisé........................................................................................................................16
1.2.6. L'objectif d'achèvement des aires suppose un financement pérenne.............18
1.2.7. Certaines règles d'urbanismes devraient être ajustées..................................20
1.2.8. Le problème spécifique des aires de grand passage.....................................20
2. La gestion des aires doit être harmonisée et professionnalisée davantage :
..................................................................................................................................23
2.1. Les partenaires departementaux doivent etre incites a creer un GIP dedie aux gens
du voyage........................................................................................................................23
2.2. Les gestionnaires devraient etre agrees par l'Etat....................................................25
2.3. Les conventions de gestion devraient etre harmonisees..........................................26
2.4. Les droits d'usage devraient etre harmonises...........................................................27
Annexes..................................................................................................................31
1. Lettre de mission ...............................................................................................33
2. Liste des personnes rencontrées.....................................................................37
3. Annexes :.............................................................................................................39
3.1. LOI n° 2000-614 du 5 juillet 2000 modifiee relative a l'accueil et a l'habitat des gens
du voyage .......................................................................................................................39
..............................................................................................................................47
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3.2. Proposition de montants de nouveaux plafonds de depenses subventionnables.....47
3.3. Aires d'accueil des gens du voyage (nombre de places financees et mises en
service)...........................................................................................................................48
3.4. Aires d'accueil des gens du voyage (evolution des normes).....................................49
3.5. Types d'accueil et d'habitat pour les gens du voyage...............................................50
4. Glossaire des sigles et acronymes...................................................................51
5. Liste des recommandations..............................................................................53
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Introduction
Par lettre du 26 aout 2010 (annexe n° 1), Monsieur Jean-Louis BORLOO,
ministre d'Etat, ministre de l'Ecologie, de l'Energie, du Developpement durable et de la
Mer et M. Benoist APPARU, secretaire d'Etat charge du Logement et de l'Urbanisme,
ont demande au Vice-president du Conseil general de l'environnement et du
developpement durable (CGEDD) de realiser une mission concernant les aires
d'accueil des gens du voyage.
Par note du 10 septembre 2010, le Vice-president du CGEDD confiait cette
mission a M. Patrick LAPORTE, inspecteur general de l'administration du
developpement durable (annexe n° 1).
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La question des gens sans domicile ni residence fixe a toujours ete une
question sensible.
Le fait que l'immense majorite des gens du voyage circulant en France soit de
nationalite francaise ne rend pas plus aise leur cohabitation avec les populations
sedentaires.
Et c'est bien sur la base d'un donnant-donnant que le legislateur, des 1990(1),
a elabore un dispositif qui n'autorise un maire a interdire le stationnement des gens du
voyage sur le reste de sa commune que s'il a realise l'aire d'accueil prevue dans sa
commune par le schema departemental.
C'est bien ce meme ≪ equilibre ≫ qui perdure aujourd'hui, meme si le legislateur
de 2000(2), constatant l'echec du dispositif arrete en 1990, a mis en place a la fois un
cadre contraignant pour les communes et un financement par l'Etat. Mais dix ans
apres, malgre l'importance du travail accompli, il reste encore plus de 20 000 places a
creer et, devant la poursuite de stationnements juges illicites par les maires et les
habitants sedentaires, un bilan aujourd'hui s'impose : le cout de stationnement des
aires constitue-t-il un obstacle dirimant a leur realisation ? Quelles mesures preconiser
pour realiser l'ensemble des objectifs fixes dans les schemas departementaux ?
1 Loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant a la mise en oeuvre du droit au logement, article 28.
2 Loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative a l'accueil et a l'habitat des gens du voyage (cf annexe 3-1).
Cette loi, modifiee de multiples fois constitue aujourd'hui le cadre d'action des pouvoirs publics en
matiere d'accueil et d'habitat des gens du voyage.
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1. Les schémas départementaux pour l'accueil des gens du voyage
doivent être achevés
Les 96 departementaux metropolitains ont publie leur schema departemental.
Pour les 3 departements dont les schemas ont ete annules par le juge administratif
(Seine-Saint-Denis, Val de Marne et Pas de Calais), un nouveau schema est en cours
d'elaboration. Par ailleurs, les 4 departements d'Outre-Mer n'accueillent pas de gens
du voyage.
1.1. Un diagnostic en demi-teinte de la situation actuelle
1.1.1. Les 2/3 des places prévues par les schémas ont été financées et la
moitié des places ont été mises en service fin 2009.
Les obligations des communes et des etablissements publics de cooperation
intercommunale (ECPI) fixees dans les schemas departementaux devraient se traduire
par la creation de 41 569 places situees dans les aires permanentes d'accueil (APA) et
par la creation de 350 aires de grand passage (AGP) ( 3).
a) les realisations
Au 31/12/2009, 19 936 places avaient ete ouvertes dans 840 APA (soit 48 %
des places) et 91 AGP (soit 26 %) avaient ete realisees.
45 departements ont un taux de realisation des aires d'accueil inferieur a 50 %,
dont les 8 departements de l'Ile-de-France, le Nord, le Pas de Calais, les Alpes
Maritimes, les Bouches du Rhone, la Gironde et la Seine Maritime.
299 communes et 163 ECPI n'avaient pas rempli leur obligation a la date du
1/1/2010.
3 Les caracteristiques des differents types d'aires et autres lieux d'habitat des gens de voyage ainsi que
les subventions de l'État pour leur financement se trouvent dans l'annexe n° 3.
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b) les financements de l'Etat
De 2000 a 2009, 27 871 places en aires d'accueil et 122 aires de grand
passage ont ete financees par l'Etat, soit 67 % des places d'aires d'accueil prescrites
dans les schemas et 35 % des aires de grand passage. L'engagement financier de
l'Etat se monte ainsi au total a 288 M€.
L'annexe 3 permet de visualiser sur un graphique le nombre de places
financees par l'Etat et celles mises en service chaque annee. Ce schema fait
apparaitre qu'entre 2004 et 2009, la duree moyenne de realisation d'une aire (entre la
decision de financement de l'Etat et la mise en service) a plus que double, traduisant
sans doute a la fois la difficulte croissante des montages financiers pouvant conduire a
differer voire a abandonner sa realisation et la duree croissante de realisation.
1.1.2. Les normes techniques ne constituent pas le principal motif de
cherté des aires
a) rappel des normes
Les normes techniques des aires permanentes d'accueil ont ete definies par le
decret n° 2001-569 du 29 juin 2001, qui n'a fait d'objet d'aucune modification depuis
l'origine.
Il precise notamment qu'au minimum, un bloc sanitaire ( 1 douche + 2 WC)
devrait etre installe pour 5 places, une place devant permettre le stationnement d'une
caravane, de son vehicule tracteur et, le cas echeant, de sa remorque.
Ce decret a ete commente par la circulaire Interieur / Logement du 5 juillet
20014 qui precisait :
que la superficie de la place devrait etre au moins egale a 75 m2,
qu'il pouvait etre envisage de realiser 1 bloc sanitaire par emplacement,
l'emplacement comportant 2 ou 3 places et etant destine a accueillir une
famille.
Sur le strict plan juridique, la circulaire de juillet 2001 ne deroge pas au decret
puisque celui-ci avait fixe une norme a minima.
4 Circulaire UHC/IUH1/12 n° 2001-49 du 5 juillet 2001 des ministres de l'interieur et de l'equipement des
transports et du logement, relative a l'application de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative a
l'accueil et a l'habitat des gens du voyage (publiee au bulletin officiel du ministre de l'equipement n°
2001-14) ;
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Elle a cependant ete jugee par certains maires comme inflationniste, ce qui a
motive le circulaire Interieur / Logement du 3 aout 2006 (5) qui precise : ≪ L'aire est
dotee des equipements sanitaires comportant un bloc sanitaire, integrant au moins une
douche et deux WC, pour 5 places de caravanes ≫, faisant ainsi du minimum la norme
generale.
La logique du dispositif etait clairement rappelee dans cette circulaire : ≪ Les
surcouts de realisation et de gestion constituent un frein a la creation des aires. Par
voie de consequence, les prefets ne peuvent constater que les communes ont satisfait
aux prescriptions du schema departemental et faire appliquer des dispositions
legislatives d'evacuation forcee des terrains occupes de facon illicite ≫(6).
b) Les donnees constatees
Le ministere charge du logement et de la ville a demande a un prestataire
exterieur, le groupe REFLEX reunissant les societes Acadie et Aures, de conduire une
evaluation du dispositif d'accueil des gens du voyage. Cette etude achevee en
decembre 2007 a porte sur 17 aires d'accueil situees dans 9 departements.
Ainsi que le constate cette etude, ≪ a travers la diversite des exemples etudies,
apparait donc assez nettement que l'individualisation des equipements (7) n'est pas
specifiquement determinante dans le cout final de realisation, mais qu'en revanche, le
choix du site apparait crucial ≫.
En effet, pour les 17 aires etudiees, pour laquelle des couts ont ete renseignes,
la moyenne des couts de realisation a la place est quasiment identique pour les
2 types d'aires (28 900 € pour les 4 aires collectives, 28 500 € pour les 13 aires aux
equipements individualisees). Le cout du bloc sanitaire est de l'ordre de 7 000 € par
place, ce qui correspond a une augmentation du cout a la place de l'ordre de 7 % si
l'on passe d'un bloc sanitaire pour 5 places a un bloc sanitaire pour 2 places. (8)
59 % des aires en service sur les 9 departements etudies disposent
d'equipements individualises. Ce taux s'eleve a 80 % parmi les aires nouvellement
creees et a 77 % pour les realisations en cours.
5 Circulaire n° NORINT D0600074C des ministeres de l'interieur et de l'amenagement du territoire et de
l'emploi, de la cohesion sociale et du logement du 3 aout 2006 relative a la mise en oeuvre des
prescriptions du schema departemental d'accueil des gens du voyage.
6 Les moyens a disposition des maires ou des proprietaires des terrains occupes par des gens du
voyage pour obtenir l'evacuation de leurs caravanes ont ete renforces avec la loi n° 2003-239 du 18
mars 2003 pour la securite interieure et la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative a la prevention de la
delinquance.
7 C'est-a-dire le fait d'avoir un bloc sanitaire par emplacement et non pas 1 bloc sanitaire pour 5 places.
8 Pour un cout moyen actuel d'environ 30.000 € par place, une aire de 10 places revient a 300.000€.
Cette aire contient 2 blocs sanitaires, si l'on a prevu 1 bloc pour 5 places, pour un cout de 14 000 € ; si
l'on a prevu 1 bloc par emplacement - soit 2 places -, elle contient 5 blocs, pour un cout de 35 000 €.
Le surcout, soit 21 000 €, represente 7 % du cout total de l'aire.
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Ceci traduit tant la demande des usagers des aires qui souhaitent ce confort
supplementaire que le point de vue des gestionnaires qui sont unanimes a considerer
que les equipements individuels responsabilisent les usagers et leur permettent plus
aisement de s'approprier les lieux, ce qui diminue les couts d'entretien des aires. De
plus, cette individualisation des blocs sanitaires s'accompagne generalement d'une
individualisation du paiement des fluides, accompagne du pre-paiement et de la
telegestion.
Ce que constate cette etude du groupe REFLEX, c'est que les aires les plus
cheres ont pour caracteristique commune d'avoir necessite d'importants travaux de
voirie et reseaux divers (VRD) directement lies au choix de leur localisation, et dont les
couts ont ete imputes au budget global de l'operation (creation ou refection d'une voirie
d'acces, creation d'un rond-point d'acces a l'aire, raccordement au reseau d'eau
potable, remblaiement du fait de l'inondabilite du site, traitement du sol pollue,...)
Cette problematique de la localisation est double :
· il y a d'une part la distance par rapport aux voiries et reseaux existants : c'est
ce dont on vient de parler et qui entraine les surcouts;
· il y a d'autre part la distance par rapport aux centres-ville, ou, plus
generalement, par rapport aux services publics et prives sur un site qui, par
ailleurs, peut ne pas entrainer de surcouts de VRD : les populations nomades,
meme si certains de leurs representants souhaitent cette proximite et rappellent
d'ailleurs les circulaires qui recommandent d'y etre attentif dans le choix de
l'implantation de l'aire, peuvent se satisfaire d'un relatif eloignement9, des lors
qu'elles sont vehiculees, sous reserve que les transports scolaires les
desservent.
C'est une des recommandations du present rapport portant sur la desserte des
aires en transport scolaire, des lors que des transports scolaires fonctionnent dans
certaines communes mais ne desservent pas les aires d'accueil.
En conclusion de cette partie sur les normes techniques des aires, il n'est pas
propose de toucher aux textes existants, comptant sur le dialogue entre les maitres
d'ouvrage qui realisent et financent les aires, les gestionnaires qui souhaitent minimiser
leurs couts d'entretien et, lorsqu'ils sont consultes, les gens du voyage qui les utilisent,
pour trouver a chaque fois la solution la plus adequate.
1.2. Une nouvelle impulsion doit etre donnee pour permettre l'achevement du
programme fixe dans les schemas departementaux.
Les mesures proposees portent sur 6 points :
le transport de competence aux ECPI ;
9 Sous reserve que le terrain d'accueil soit eloigne ou, a tout le moins, protege des nuisances (bruit des
infrastructures, dechetterie, station d'epuration).
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une consultation renforcee des communes concernees ;
l'extension de la maitrise d'ouvrage aux organismes du logement
social ;
la mise en oeuvre d'un pouvoir de substitution renove du prefet ;
une revision des schemas qui prenne en compte l'ancrage progressif
des gens du voyage sur les territoires ;
un mode de financement perenne ;
des regles d'urbanisme ajustees en consequence.
Enfin, un paragraphe traite du probleme specifique des aires de grand passage.
1.2.1. Le transfert de compétence aux ECPI
Actuellement, certaines aires n'arrivent pas a se faire parce que le maire est a
la fois confronte a une opposition virulente dans sa commune et a un refus de la
communaute de communes a laquelle sa commune appartient de prendre cette
competence.
La question de la competence se pose en effet pour les communautes de
communes, pour lesquelles la competence ≪ Politique du logement et du cadre de
vie ≫ n'est pas obligatoire (10). A l'inverse, pour les communautes urbaines (11) et les
communautes d'agglomeration(12), la competence ≪ en matiere d'equilibre social de
l'habitat ≫ (programme local de l'habitat et action en faveur du logement des personnes
defavorisees) est obligatoire.
Le transfert obligatoire de la competence ≪ Logement ≫ ou, a defaut, ≪
Politique d'accueil et d'habitat des gens du voyage ≫ revetirait un triple interet :
l'organe deliberant de l' EPCI constitue un lieu de debats suppose moins
soumis aux pressions locales que le conseil municipal (meme s'il est evident
que la localisation geographique d'une aire est necessairement situee sur le
territoire d'une commune membre) ;
ceci permet de mieux repartir les couts de l'equipement ;
l' EPCI dispose de services et de moyens dont les communes ne disposent pas
toujours.
10 Article L.5214-16-II du code general des collectivites territoriales
11 Article L 5215-20-I du code general des collectivites territoriales
12 Article L.5216-5-I du code general des collectivites territoriales
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Si le transfert de la competence Logement, que le Gouvernement a echoue a
introduire dans une precedente loi, devait connaitre le meme sort, il faudrait plaider la
specificite des gens du voyage pour obtenir le transfert de cette seule competence.
Cette proposition de transfert de la competence ≪ Gens du voyage ≫ ne
semble pas rencontrer d'opposition et necessite quelques retouches de la loi du
5/07/2000 et du code general des collectivites territoriales (cf. en annexe 5 : liste des
recommandations).
1.2.2. Une consultation renforcée des communes concernées
Conformement a l'article 1er III de la loi du 5 juillet 2000, ≪ le schema
departemental est elabore par le representant de l'Etat dans le departement et le
president du conseil general, apres avis du conseil municipal des communes
concernees et de la commission consultative (departementale) ≫.
Selon l'article 1er du decret n° 2001-540 du 25 juin 2001, relatif a la composition
et au fonctionnement de la commission departementale consultative des gens du
voyage, ≪ la commission (…) comprend : (...)
b) Cinq representants des communes designes par l'Association des maires du
departement ≫.
Les maires des communes ou les presidents d'ECPI qui vont devoir assumer
les engagements fixes dans le schema departemental n'ont donc pas la certitude de
faire partie de cette commission.
Or, les temps forts du debat portent sur la localisation des aires et sur le mode
de calcul du nombre de places par aires.
Sur le dernier point, aucune disposition ne vient preciser ce mode de calcul.
Cela differe de ce que la loi a prevu pour les logements locatifs sociaux dont certaines
communes doivent realiser un nombre egal a 20 % du total des residences
principales(13) et pour les hebergements dont certaines communes doivent realiser un
nombre au moins egal a une place par tranche de 2000 habitants(14) ;
La mission n'a pas eu le temps d' explorer davantage l'opportunite de fixer dans
la loi un mode de calcul du nombre minimum de places d'aires d'accueil. Une telle
mesure apparait a priori difficilement transposable car le flux de circulation des gens du
voyage ne peut etre determine a partir de l'importance de la population sedentaire.
13 Article L.302-8 du CCH.
14 Article L.312-5-3 du code de l'action sociale et des familles.
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Pour autant, il apparait necessaire que la commune ou l'ECPI qui conteste le
mode de calcul le concernant puisse etre entendue par la commission departementale.
Une modification du decret du 25/06/2001 devrait intervenir en ce sens.
1.2.3. L'extension de la maîtrise d'ouvrage aux organismes du logement
social ( HLM , SEM, organismes agréés)
La loi du 5 /07/2000 limite la competence de maitrise d'ouvrage des aires aux
seules communes et ECPI, en en faisant un equipement communal ou
communautaire.
Or la caracteristique principale de ces aires n'est pas tant qu'il s'agit d'un lieu de
stationnement de vehicules, muni de branchements aux fluides (ce qui pourrait les
rapprocher des marches, qui sont des equipements communaux), mais qu'elles
constituent le lieu ou se trouve la residence principale de leurs occupants.
Le fait qu'il s'agisse d'une caravane, mobile ou non, ne change rien aux
problemes lies a la presence d'habitants : les conditions de scolarisation des enfants et
celles d'exercice d'activites economiques etaient pointees dans la loi du 31/05/1990. La
loi du 5/07/2000 parle en plus d'acces aux soins.
Les pratiques des gens du voyage, on le verra ci-dessous, amenent a diversifier
l'offre en proposant, a cote des aires, des terrains familiaux et des habitats adaptes
(15).
Or, ces derniers, inscrits dans les plans departementaux d'action pour le
logement des personnes defavorisees (PDALPD) en meme temps que dans les
schemas departementaux et finances avec des prets PLAI de la Caisse des depots et
consignations (CDC), sont realises par des organismes de logement social.
De plus, l'augmentation du nombre d'aires et de places a conduit les
collectivites progressivement a confier la gestion a des tiers : l'activite de gestionnaire,
voire d'assistant a maitre d'ouvrage des aires, s'est donc professionnalisee.
Les organismes de logement social, s'ils pouvaient etre maitres d'ouvrage des
aires, permettraient de soulager les seances parfois houleuses du conseil municipal de
debats portant sur la realisation de l'aire, meme si tous s'accordent pour dire que le
choix du terrain constitue bien l'obstacle principal a franchir. Mais, la encore, les
organismes de logement social peuvent contribuer a resoudre le probleme foncier
prealable.
Les organismes de logement social sont des generalistes de l'habitat hors
marche et des professionnels reconnus : l 'accroissement de leur mission dans ce
nouveau champ apparait donc legitime.
15 Ils ont ete introduits dans la loi du 5/07/2000 par la loi du 25/03/2009.
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Rien ne permet cependant de presumer que ces organismes auront une
appetence particuliere pour ce secteur d'activite nouveau pour eux. Il faudra les y
inciter, en recherchant avec eux le modele economique adequat, ce qui ne sera pas
forcement facile. Si cette mesure etait retenue, il appartiendrait a coup sur aux
intercommunalites d'engager avec eux (qui constituent leurs partenaires institutionnels)
une negociation globale, en y incluant dorenavant l'habitat des gens de voyage.
1.2.4. Les schémas départementaux devraient tenir compte de l'ancrage
progressif des gens du voyage sur leurs territoires.
Jusqu'a la loi toute recente du 4/08/2008 (16), un lien etait effectue entre le fait
de n'avoir ni domicile, ni residence fixe et celui d'exercer une activite ambulante (17).
Meme si ces personnes doivent toujours etre munies et faire viser tous les trois mois
un livret special de circulation, la reference a l'activite ambulante a disparu, traduisant
par la meme le changement progressif des types d'activites exercees par les gens du
voyage.
Meme si la notion de ≪ voyage ≫ est fortement revendiquee par cette
communaute, il n'est pas sur qu'elle voyage en moyenne plus que les sedentaires et, si
l'on rangeait les deux categories de population (sedentaire et nomade) par deciles
decroissants de kilometres parcourus, il y aurait fort a parier que les plus ≪ voyageurs
≫ seraient les sedentaires dans les premiers deciles.
La notion de voyage ne doit donc pas etre associee necessairement a des
deplacements importants, mais a un habitat susceptible de bouger : la caravane, …
tant que celle-ci n'est pas immobilisee.
La notion d'ancrage territorial est d'ailleurs forte chez des gens de voyage,
traduisant une notion de centre des interets familiaux et une duree de sejour
superieure a la duree de sejour de tous les autres lieux de stationnement.
Il n'est donc pas etonnant de constater que les aires d'accueils ne rendent pas
compte de l'ensemble des besoins des gens du voyage et qu'en plus de ces lieux ou
plusieurs familles cohabitent, d'autres lieux sont susceptibles d'accueillir une seule
famille ou plusieurs familles vivant ensemble. Ce sont des terrains familiaux lorsque la
caravane reste le lieu de vie et des habitats adaptes lorsque la caravane est devenue
l'annexe d'un logement construit en dur.
Les besoins pour ces nouvelles formes d'habitat doivent etre evalues dans les
schemas departementaux en cours de revision, qui devront prevoir leur localisation,
leur volume et leur programmation sans que soit pour autant modifie le lien entre
l'interdiction de stationnement et l'evacuation forcee, d'une part, et la seule realisation
d'une aire d'accueil, d'autre part.
16 Loi n° 2008-776 du 4 aout 2008 de modernisation de l'economie, article 53.
17 Loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative a l'exercice des activites ambulantes et au regime applicable aux
personnes circulant en France sans domicile ni residence fixe.
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La loi du 5 juillet 2000 devrait etre modifiee en ce sens, meme si les demarches
d'evaluation en cours pour preparer ces revisions ont d'ores et deja pointees ces
nouveaux besoins.
De la meme facon, les schemas revises devraient identifier les difficultes
entrainees par l'acquisition par les gens du voyage de parcelles inconstructibles en vue
de stationner leur caravane, voire d'y realiser des constructions, dans des conditions
sanitaires et de raccordement aux fluides souvent insatisfaisantes. Les maires
confrontes a ces situations, de plus en plus nombreuses, doivent etre aides pour
regulariser ces situations sans declencher une urbanisation non desiree ou pour
proposer des solutions alternatives aux occupants.
En effet, dans certains secteurs, la revision du PLU peut etre l'occasion
d'inclure les terrains concernes dans des zones constructibles ou de creer des zones
specifiques autorisant l'implantation d'habitat leger. Les communes peuvent egalement
offrir des solutions de relogement aux familles qui se trouvent en situation irreguliere
en realisant un echange de proprietes ou en mettant a leur disposition un terrain locatif.
Dans les cas ou ces familles verraient leur situation regularisee au regard du
droit de l'urbanisme, elles se trouveraient assujetties a un, voire deux taxations de la
plus- value en cas de revente :
a) L'article 1605 nonies du CGI (18) institue une taxe sur la cession a titre onereux
de terrains nus rendu constructibles du fait de leur classement, posterieur au
13/01/2010 par un document d'urbanisme. Cette taxe qui ne s'applique que
lorsque le rapport entre le prix de cession et le prix d'acquisition est au moins
egal a 10 , est egale a 5 ou 10 % de la difference entre le prix de cession et le
prix d'acquisition actualisee. Le produit de cette taxe est affecte a un fonds pour
l'installation des jeunes agriculteurs.
b) L'article 1529 du CGI (19) permet aux communes et ECPI d'instituer une taxe
forfaitaire sur la cession a titre onereux de terrains nus qui ont ete rendus
constructibles du fait de leur classement par un document d'urbanisme. Cette
taxe qui ne s'appuie qu'aux terrains constructibles depuis moins de 18 ans et
dont le prix de cession est superieur a 15 000 € est egale a 10 % de la meme
base taxable que celle instituee a l'article 1605 nonies. Le produit de cette taxe
n'a pas d'affectation.
Ces dispositifs qui ne captent au maximum que 20 % de la plus-value,
apparaissent suffisants si la collectivite publique s'est contentee de rendre le terrain
constructible. Si, en plus , un effort financier a ete fait en faveur du proprietaire de ce
terrain (notamment en realisant a son profit un terrain familial ou un habitat adapte
soit sur ce terrain, soit sur un autre), une captation de la totalite de la plus-value serait
envisageable, en s'inspirant de l'article L.443-12-1 du CCH, qui fait obligation au
18 Article ajoute au CCI par l'article 55 de la loi n° 2010-874 du 27/07/2010 de modernisation de
l'agriculture et de la peche
19 Article ajoute au CGI par l'article 26 de la loi n° 2006-876 du 13 juillet 2006 portant engagement
national pour le logement et modifie par l'article 38 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de
mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 15/54
locataire d'un logement social devenu proprietaire de ce logement a verser a
l'organisme HLM qui lui a vendu ce logement la difference entre le prix de vente et le
prix d'acquisition (limitee a l'ecart entre l'estimation des Domaines lors de l'acquisition
et le prix d' acquisition), s'il le revend dans les cinq ans. Le produit de ce versement
pourrait etre affecte au fonds departemental prevu a l'article 1595 quater du CGI (cf §
126 ci-dessus).
1.2.5. Le pouvoir de substitution du préfet, une fois rénové, devrait
pouvoir être utilisé.
L'article 3 de la loi du 5 juillet 2000 accorde a l'Etat un pouvoir de substitution
dans la realisation et la gestion des aires si la commune ou l'EPCI ne les a pas
realisees dans les delais qu'elle prescrit ≪ apres mise en demeure par le prefet restee
sans effet dans les trois mois suivants ≫.
Ce pouvoir de substitution n'a jamais ete utilise.
Or, il presente un double avantage :
il permettrait d'accelerer la realisation des schemas departementaux ;
il permettrait aux elus locaux, devant affronter, pour appliquer la loi, une forte
opposition locale, de se retrancher derriere une autorite superieure pleinement
legitime a intervenir au nom de l'interet general.
Cependant, le pouvoir de substitution demande a etre precise sur les points
suivants :
a) Cette periode contradictoire de 3 mois maximum est beaucoup trop breve et un
debat doit etre prevu dans une instance interpartenariale : c'est pourquoi il est
preconise de s'inspirer des regles progressivement mises en place lorsqu'il n'y
a pas suffisamment de constructions de logements locatifs sociaux dans une
commune (20): engagement d'une procedure de constat de carence et
consultation du comite regional de l'habitat. Il n'est toutefois pas propose
d'instituer ici un prelevement sur les collectivites ou etablissements publics
defaillants.
b) Le dispositif actuel s'avererait complexe a mettre en oeuvre, voire inapplicable
tant que des mesures d'application ne seraient pas edictees. En effet, ce
dispositif prevoit qu'il appartient a l'Etat d'engager les depenses et a la
commune ou a l'EPCI de les regler. Ceci suppose de mettre en oeuvre la
procedure d'inscription d'office de cette depense au budget de la commune ou
de l'EPCI, via la mise en demeure de la chambre regionale des comptes, et la
procedure de mandatement d'office (21). Meme avec le mandatement d'office
20 Article L. 302-9-1 du CCH
21 Procedures prevues aux articles L.1612-15 et L.1612-16 du code general des collectivites territoriales.
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par le comptable des sommes dues au titre des interets moratoires(22)
(inevitables vu les delais que cette procedure entrainerait), on ne serait pas sur
de trouver des societes sur le marche interessees a repondre a un tel appel
d'offres que lancerait l'Etat. Une amelioration possible consisterait a prevoir
que l'Etat fasse l'avance de la totalite des sommes dues et se rembourse sur
les collectivites et etablissements debiteurs. Mais cela supposerait que l'Etat
inscrive l'ensemble de ces sommes a son budget.
c) C'est pourquoi il a paru plus expedient de confier cette mission a un tiers, en
l'espece les organismes de logement social, si la proposition d'extension de
leur competence formulee supra est retenue. On pourrait la encore s'inspirer du
4eme alinea de l'article L.302-9-1 du code de la construction et de l'habitation qui
prevoit que le Prefet, des lors qu'il a constate la carence, peut passer une
convention avec un organisme en vue de la construction de logements sociaux
(ici, d'aires d'accueil).
d) Il faudrait egalement prevoir que le droit de preemption soit exerce par le prefet
(article L. 210-1 du code de l'urbanisme), et que le permis de construire soit
accorde par le prefet (article L.422-2 du code de l'urbanisme), comme dans les
cas prevus a l'article L.302-9-1 du CCH.
e) Si c'est un organisme de logement social qui est maitre d'ouvrage de la
construction ou de la rehabilitation d'une aire d'accueil, c'est sa responsabilite
d'en assurer le montage financier. Il est toutefois propose que la commune ou l'
EPCI participe pour au moins 50 % au cout de l'investissement, dans la limite
d'un plafonnement de depense subventionnable fixe par decret en Conseil
d'Etat ;
Les plafonds fixes par le decret du 25 juin 2001 pourrait etre actualises en
s'inspirant du rapport du CGPC de juin 2005 sur le financement des aires
d'accueil(23) qui proposait d'actualiser les montants en tenant compte de
l'evolution moyenne des index TP01 et BT01 et en proposant trois montants
selon les zones A, B et C. (cf. annexe 3.2)
Ces depenses seraient obligatoires pour les collectivites locales et les EPCI, ce
qui, pour ces derniers, necessiterait de completer le code general des
collectivites territoriales.
22 Decret n° 90-1072 du 30 novembre 1990 modifiant le decret n° 77-981 du 29 aout 1977 relatif a
l'engagement et au mandatement des sommes dues en execution de marches passes par l'Etat ou l'un
de ses etablissements publics a caractere administratif au titre des interets moratoires pour retard
apporte dans le reglement de leurs creanciers.
23 Conseil General des Ponts et Chaussees – Le financement des aires d'accueil des gens du voyage,
etabli par Francois WELLHOFF – rapport n° 2005-0032-01 – juin 2005.
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1.2.6. L'objectif d'achèvement des aires suppose un financement pérenne
a- Le dispositif actuel :
Jusqu'au 31/12/2008, l'Etat (Ministere charge du Logement) financait 50 % des
depenses engagees pour la realisation des aires d'accueil et 100 %, pour la realisation
des aires de grand passage.
Depuis cette date, il ne finance plus que la creation d'aires d'accueil ou de
grand passage des communes ayant franchi le seuil des 5000 habitants lors du dernier
recensement de la population24;
Par ailleurs, l'Etat continue de financer les terrains familiaux locatifs prevus par
le schema revise ainsi que les etudes prealables a la revision du schema
departemental25.
Ainsi qu'on l'a vu supra, il reste un tiers des places d'aires d'accueil et les deux
tiers des aires de grand passage, prevues aux schemas departementaux, qui devront
etre realisees sans aide de l'Etat. Aux conditions de financement fixees en 2000 , cela
represente un manque de financement pour les collectivites locales d'au moins 150
M€.
b- L'hypothetique poursuite des financements de l'Etat :
Deux theses s'affrontent :
une favorable a la reprise des financements de l'Etat ; cette these s'appuie sur
2 arguments : d'une part, l'aide de l'Etat constitue une condition necessaire
pour convaincre les collectivites qui n'ont pas encore realise leur aire et dont on
peut penser qu'elles sont les plus reticentes ; d'autre part, les communes qui ne
respectent pas l'obligation de construire des logements sociaux ne se sont pas
vu pour autant couper les financements d'Etat si elles les realisaient
tardivement ;
pour les tenants de la these opposee, l'Etat avait annonce dans la loi du
5/07/2000 que ses financements etaient limites dans la duree et il a fait preuve
de tolerance envers les retardataires en repoussant 2 fois en 2004 et 2007 le
delai initialement fixe.
Cette question de pure opportunite semble aujourd'hui depassee si l'on met en
place de dispositif en deux temps detaille ci-dessous.
c- La creation d'une taxe annuelle d'habitation des residences mobiles terrestres.
24 Decret n° 2008-1477 du 30 decembre 2008 authentifiant les chiffres des populations de metropole, des
departements d'outre-mer, de Saint-Barthelemy, de St Martin et de St Pierre-et-Miquelon.
25 Circulaire Interieur/Logement du 28 aout 2010 sur la revision des schemas departementaux.
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 18/54
Cette taxe a ete creee par l'article 92 de la loi de finances pour 200626. Apres
2 reports successifs, d'abord au 1er janvier 2008, puis au 1er janvier 2010, la taxe est
effectivement entree en vigueur, suite a la suppression par le Senat d'un amendement
visant a repousser une nouvelle fois son application.
Or, cette disposition prevoit que le produit de cette taxe est affecte a un fonds
departemental d'amenagement, de maintenance et de gestion des aires d'accueil des
gens du voyage, a hauteur du montant percu dans le departement.
Le montant du produit de cette taxe est estime a 11 M€ aux conditions
legislatives actuelles et a 25 M€ si l'on transforme cette taxe en vignette comme c'est
envisage, des lors que, dans cette derniere hypothese, les personnes assujetties a la
vignette ne beneficieraient pas des exonerations prevues en matiere de taxe
d'habitation.
d- Permettre aux maitres d'ouvrage des aires et des terrains familiaux d'emprunter en
gageant les ressources du fonds departemental.
On voit que si l'on percoit la taxe, il faudrait 9 ans pour achever les schemas
departementaux actuels – toutes sources de financement autres que celles de l'Etat
etant inchangees – et 6 ans si l'on percoit la vignette. Encore ne tient-on pas compte
de la derive des couts pendant cette periode.
C'est pourquoi, afin d'accelerer l'achevement de ces schemas, il est propose
que les maitres d'ouvrage des aires soient autorises a emprunter, les echeances de
remboursement de ces prets etant couvertes totalement ou partiellement par les
ressources tirees de la taxe ou de la vignette.
La Caisse des Depots et Consignations pourrait etre ainsi autorisee a accorder,
pour ce faire, des prets ayant les caracteristiques des prets PLAI (taux du livret A
moins 20 points de base, soit 1,55 % aujourd'hui ; duree de 40 ans maximum et 50 ans
pour la partie fonciere).
Un tel dispositif, qui reste a mettre au point, suppose de s'assurer au prealable
que les sommes percues au titre de la taxe ou de la vignette, seront effectivement
recouvrees a hauteur des montants estimes.
Meme si l'on n'entend pas affecter la totalite des sommes ainsi percues au
remboursement de ces prets, il serait sans doute opportun d'exclure la possibilite pour
ces fonds departementaux de financer les depenses de gestion des aires.
26 Loi n° 2005-1719 du 30 decembre 2005, dont l'article 92 insere un nouvel article 1595 quater dans le
code general des impots.
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1.2.7. Certaines règles d'urbanismes devraient être ajustées.
On sait la difficulte de certains elus locaux a construire des aires, alors meme
que le terrain d'assiette de l'aire est propriete de la commune ou de l'ECPI et qu'il est
situe en zone constructible du plan local d'urbanisme (PLU).
Afin de permettre, lorsque necessaire, la constructibilite des terrains destines a
recevoir des aires d'accueil, des terrains familiaux et des logements adaptes, les
etapes suivantes doivent etre franchies :
a/ c'est dans le schema departemental que doit etre prevu, pour chacune des
communes ou EPCI astreints a obligation d'accueil ou d'habitat des gens du voyage, le
nombre des aires d'accueil, de terrains familiaux ou d'habitats adaptes qui doivent y
etre construits ;
b/ le code de l'urbanisme(27) prevoit bien que le schema de coherence territoriale
(SCOT) prenne en compte les objectifs et les principes de la politique de l'habitat, que
le SCOT soit rendu compatible avec les PLH et que les orientations d'amenagement et
de programmation (OAP) des PLU intercommunaux tiennent lieu de PLH. Mais l'article
L.302-1 du CCH qui definit le contenu du PLH ne precise pas que celui-ci doit indiquer
les moyens a mettre en oeuvre pour satisfaire les besoins d'accueil et d'habitat des
gens du voyage. Une modification legislative serait opportune.
c/ l'article L.123-1 du code de l'urbanisme, dernier alinea, dispose que le PLU doit, si
necessaire, etre rendu compatible avec le PLH dans un delai de 3 ans. Si cette mise a
jour n'est pas intervenu dans ce delai, le prefet dispose, conformement a l'article L.
123-14 de ce code, d'un pouvoir de substitution.
Un bilan de l'exercice effectif de ce pouvoir de substitution devrait probablement
conduire a formuler des propositions d'amelioration du dispositif existant.
Des directives devraient etre donnees aux prefets pour qu'il fasse usage de leur
pouvoir de substitution, dans des conditions qu'il leur appartient d'apprecier, en etroite
collaboration avec le cabinet et les services du ministre charge de l'urbanisme, et en
fonction des circonstances locales.
1.2.8. Le problème spécifique des aires de grand passage
Ainsi que cela ete dit supra (§1.1), seules 35 % des aires de grand passage
prevues aux schemas departementaux ont ete financees par l'Etat. La loi du 5 juillet
2000 ne prevoyait pas le financement par l'Etat des aires de grand passage. C'est la
circulaire du 5 juillet 2001 qui a prevu un financement a hauteur de 70 % de la depense
subventionnable plafonnee a 114 336 € par operation par le decret n° 2001-541 du
25 juin 2001.
27 Articles L.122-1-7, L.122-1-15 et L.123-1-4, dans leur redaction issue des articles 17 et 19 de la loi
n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (dite loi Grenelle II).
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La loi du 13/07/2006 portant engagement national pour le logement a porte a
100 % le taux maximal de subvention dans la limite du meme plafond et la loi de
finances pour 2008 a autorise l'Etat a assurer la maitrise d'ouvrage de ces aires. Mais,
depuis le 21/12/2008, l'Etat ne finance plus les aires de grand passage.
Contrairement aux aires d'accueil, aucun texte ne vient definir les normes
techniques des aires de grand passage.
Une enquete a ete realisee en avril 2005 aupres des prefectures et des
intercommunalites competentes a la demande du Reseau IDEAL-Gens du voyage, par
le cabinet ARHOME. Elle a analyse 37 aires de grand passage.
Elle a permis d'etablir les caracteristiques existantes et le cas echeant les
recommandations formulees par les usagers, qui peuvent ainsi se resumer :
a) Sur les caracteristiques des terrains et des equipements :
un terrain d'une superficie variant de 1 a 4 ha pour accueillir entre 50 et 200
caravanes ; les usagers souhaitant plutot 40 que 50 caravanes a l'hectare ;
des terrains en herbe, tondue entre 10 et 15 cm, et clotures ;
la presence d'une cuve de vidange pour recuperer les eaux usees et le contenu
des sanitaires chimiques ;
la presence de points d'eau et la facturation de la consommation d'eau au tarif
reel ;
l'installation de groupes electriques forains pour les groupes minoritaires
n'ayant pas de groupes electrogenes ;
un systeme d'assainissement autonome ;
l'installation de bennes pour les ordures menageres soit de taille moyenne (350
a 770 l) soit de grosse taille (entre 2 et 30 m3) selon la taille de l'aire ;
b) Sur la gestion des terrains :
une ouverture des aires pendant 4 mois de mai a juin jusqu'en septembre ;
l'existence de convention d'occupation ainsi que le cas echeant, d'un systeme
d'assurance pour la protection des terrains alentour ;
une duree de stationnement maximale de 15 jours ; avec un temps de repos de
1 a 2 semaines entre chaque passage ;
une caution variant entre 150 et 200 € ;
un forfait entre 3 et 10 €/semaine x caravane ;
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 21/54
un forfait entre 1 et 4 €/nuitee x caravane ;
un paiement des fluides au forfait ou au reel.
* * *
Suite au rapport remis le 22 mai 2008 au Premier ministre par le senateur
Pierre HERISSON, President de la Commission nationale consultative, sur ≪ le
stationnement des gens du voyage ≫, des reflexions ont ete engagees qui pourraient
conduire a :
limiter les prescriptions du schema departemental aux seules aires d'accueil et
creer un cadre juridique specifique pour les aires de grand passage, prevoyant
notamment une autorisation prefectorale de grand passage au vu d'une
declaration prealable ;
prevoir un dispositif d'aires de grand passage tournantes, toute commune
d'implantation d'une aire ne pouvant se voir a nouveau imposer son occupation
avant 3 ans ;
transferer totalement la responsabilite de l'aire a l'Etat (prefet).
Un tel projet appellerait les observations suivantes :
1. Pour les communes et EPCI qui se sont conformees aux prescriptions du
schema departemental en creant des aires de grand passage, et pour les
usagers qui les utilisent, on reviendrait en arriere si l'on imposait un dispositif ≪
aire tournante ≫ puisque les aires de grand passage qui ont ete realisees sont
actuellement ouvertes tous les ans : ne serait-il pas preferable de laisser un
droit d'option entre le systeme ≪ aire fixe ≫ et le systeme ≪ aire tournante ≫ ?
(Le risque etant d'ailleurs que les aires tournantes soient occupees illegalement
s'il n'y en a pas suffisamment d'ouvertes dans le meme perimetre
geographique).
2. L'enquete dont on a indique les conclusions supra montre qu'on dispose
maintenant d'une esquisse de referentiel d'amenagement et de gestion des
aires de grand passage. Un decret en Conseil d'Etat pourrait donc se borner a
fixer des normes a minima, comme pour les normes techniques des aires
d'accueil.
3. Il serait opportun que le dispositif arrete permette de retenir, si l'on choisit le
systeme ≪ aire tournante ≫, un nombre d'aires de grand passage correspondant
aux besoins identifies dans ce schema.
4. Le dispositif qui sera arrete sur les aires de grand passage devra prevoir non
seulement combien d'aires seront ouvertes dans le departement, mais
egalement ≪ le nombre maximum de caravanes susceptibles d'etre accueillies
par aire ≫, car le nombre total de places disponibles dans le departement
constitue un critere au moins aussi important que le nombre d'aires.
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 22/54
2. La gestion des aires doit être harmonisée et professionnalisée
davantage :
Quiconque a ete selectionne a l'issue d'une procedure d'appel d'offres engagee
par une commune ou un EPCI peut assurer la gestion d'une aire, sans aucune autre
condition que celles figurant dans le cahier des charges de la consultation et dans la
convention de gestion.
Par ailleurs, la diversite et l'heterogeneite des clauses figurant dans les
conventions de gestion et des montants des droits d'usage constituent aujourd'hui une
preoccupation de tous les acteurs locaux et, bien evidemment, des usagers des aires.
Des propositions sont ainsi faites dans la suite du rapport pour repondre aux
preoccupations ainsi exprimees.
Au surplus, la necessite de trouver un lieu partenarial de debat de ces sujets
amene a proposer de creer une nouvelle categorie de groupement d'interet public
(GIP) specialement dedie aux gens du voyage.
2.1. Les partenaires departementaux doivent etre incites a creer un GIP dedie
aux gens du voyage
La loi du 5 juillet 2000 dispose que ≪ le schema departemental est elabore par
le representant de l'Etat dans le departement et le president du conseil general ≫ (28) et
qu'il ≪ est revise selon la meme procedure au moins tous les six ans a compter de sa
publication ≫, meme si c'est aux communes et aux EPCI qu'incombe la realisation et la
charge financiere de ces aires.
Cette co-elaboration et cette co-revision entre l'Etat et le departement traduisent
le fait que, contrairement aux populations sedentaires ou la bonne echelle
geographique est le bassin d'habitat et donc l'EPCI, pour les populations nomades,
tant pour regler les problemes d'accueil que de grand passage, la bonne echelle
geographique est le departement.
28 En remplacant la clause generale de competence des departements par une disposition prevoyant que
≪ le conseil general peut, par deliberation specialement motivee, se saisir de tout objet d'interet
departemental pour lequel la loi n'a donne competence a aucune autre personne publique ≫, le projet
de loi reforme des collectivites territoriales, actuellement en discussion du parlement, n'aura pas
d'impact sur le role joue par le departement en matiere d'accueil et d'habitat de gens du voyage.
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 23/54
Au surplus, le volet social important prescrit dans les schemas departementaux
mobilise a la fois le departement et la Caisse d'allocations familiales qui, elle, distribue
l'aide a la gestion(29) aux gestionnaires des aires et qui contribue parfois au
financement de l'investissement.
Ce n'est donc pas un hasard si le premier GIP dedie aux gens du voyage, cree
en Ille-et-Vilaine, rassemble l'Etat, le departement et la CAF.
L'essentiel des mission de ce GIP porte sur l'accompagnement social, l'acces
aux services sociaux, l'accompagnement a la scolarisation et l'acces aux droits et la
mediation. Accessoirement, il se charge d'accompagner les collectivites dans la
creation et le fonctionnement des aires d'accueil.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la convention constitutive de ce GIP vise
l'article 22 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le developpement du mecenat,
selon lequel ≪ des groupements d'interet public (…) peuvent etre constitues (…) pour
exercer (…) des activites dans le domaine (…) de l'action sanitaire et sociale, ainsi que
pour creer ou gerer ensemble des equipements ou services d'interet commun
necessaires a ces activites ≫, ainsi que le decret n° 88-1034 du 7 novembre 1988
relatif au GIP constitue dans le domaine de l'action sanitaire et sociale.
La contribution financiere de l'Etat a ce GIP vient d'ailleurs du ministere charge
de la solidarite.
Une solution pourrait consister a adresser une circulaire aux prefets les incitant
a creer de tels GIP, en leur proposant de conferer a ces GIP la meme base legale que
le GIP d'Ile-et-Vilaine.
Ce n'est pas la solution preconisee dans ce rapport pour les raisons suivantes :
le GIP doit pouvoir exercer d'autres missions que l'accompagnement social, et
notamment l'assistance a la creation des aires, le rapprochement de l'offre et
de la demande de places, tant en aires d'accueil qu'en aires de grand
passage(30), l'harmonisation de la gestion des aires, ou la creation d'un
observatoire departemental des gens du voyage ;
une aire d'accueil ou de grand passage ne constitue pas un equipement
sanitaire et social ;
la creation d'une disposition legislative constituera a coup sur un effet
d'annonce bien plus important qu'une simple circulaire ;
Il est ainsi propose de creer une nouvelle categorie de GIP dediee aux gens du
voyage, sans prevoir de missions obligatoires, laissant ainsi aux partenaires locaux le
soin de negocier le champ d'intervention de chaque GIP.
29 L'aide a la gestion des aires d'accueil est prevue aux articles L.851-1 et R.851-5 du code de la securite
sociale. L'aide mensuelle par place de caravane est actuellement fixee a 130,11 € (Arrete du
20/12/2002).
30 Surtout si la proposition de loi sur les aires de grand passage est votee.
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2.2. Les gestionnaires devraient etre agrees par l'Etat
La loi du 5 juillet 2000 dispose que ≪ les communes et les etablissements
publics de cooperation intercommunale interesses assurent la gestion de ces aires ou
la confient par convention a une personne publique ou privee ≫.
Si la commune ou l'EPCI gere directement l'aire, ce mode de gestion s'appelle
une regie soumise aux dispositions des articles L.1412-1 et suivants du code general
des collectives locales (CGCL).
Si la commune ou l'EPCI confie la gestion a un tiers, c'est sous forme d'une
delegation de service public soumise aux dispositions des articles L.1411-1 et suivants
du CGCL.
Ainsi qu'on l'a dit, il n'existe aucune disposition legislative ou reglementaire qui
determine les conditions d'eligibilite requises pour etre designe comme gestionnaire
d'une aire d'accueil de gens du voyage. Seul un critere de garanties professionnelles
figure a l'article L.1411-1 du CGCL.
Aujourd'hui, plus de la moitie des aires d'accueil sont gerees par deux
gestionnaires a statut prive : Hacienda, qui gere environ 50 % des aires d'accueil, et
ADOMA (ex-SONACOTRA)(31), qui gere environ 15 % des aires d'accueil. Les
gestionnaires prives nationaux sont donc majoritaires. Cependant, certaines
associations d'usagers formulent une preference a l'egard d'une gestion directe par la
commune ou l'EPCI car, dans ce cas, l'acces a l'elu local pour regler un different leur
apparait plus aise.
Ceci renvoie a un besoin a la fois d'avoir un elu local referent, et a la necessite
de renforcer la professionnalisation de la gestion des aires.
D'ou l'idee d'etendre a la gestion des aires la procedure introduite par la loi du
25 mars 2009(32) et visant a l'agrement des organismes agissant en faveur du
logement et du l'hebergement des personnes defavorisees d'une part pour leur activite
(…) de gestion locative, d'autre part pour leur activite d'ingenierie sociale, financiere et
technique.
La mesure ainsi proposee s'appliquerait a tous les gestionnaires de droit prive.
Elle justifierait une legere adaptation du decret du 30 decembre 2009. Les organismes
de logement social, ainsi qu'il a ete supra, se verraient confier la competence de
gestion des aires, en meme temps que la competence de maitrise d'ouvrage, par un
dispositif legislatif specifique .
La mesure ne s'appliquerait pas aux regies creees par les communes et les
EPCI, suivant en cela la position adoptee lorsqu'il s'agit d'agreer les organismes qui
gerent du logement tres social.
31 ADOMA, est une societe d'economie mixte d'Etat dont l'activite est majoritairement consacree aux
foyers de travailleurs migrants.
32 Articles L.635-1 a L.365-5 du CCH introduits par l'article 2 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de
mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, et articles R.365-1 a R.365-8 du CCH
introduits par le decret n° 2009-1684 du 30 decembre 2009.
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Un tel dispositif permettrait au surplus de conserver la competence acquise par
ADOMA a ce titre si, dans le cadre de la restructuration de son capital social en cours,
ADOMA etait conduit a cesser son activite de gestion des aires. Dans cette hypothese,
ADOMA ne repondrait plus a aucun appel d'offres et cesserait progressivement cette
activite a mesure que les conventions de gestion (en general de courte duree : 1 a 3
ans) viendraient a expiration. Son service de gestion des aires et sa competence
propre en la matiere et appreciee disparaitraient.
Plutot qu'une telle solution, il est propose qu' ADOMA cede alors la totalite de
son activite de gestion d'aires a un tiers dans le cadre d'un processus de devolution
controle par les pouvoirs publics. Si la devolution etait accordee a un organisme de
logement social, ce pourrait etre l'occasion de concretiser les nouvelles competences
qui leur seraient accordees par la loi.
2.3. Les conventions de gestion devraient etre harmonisees
Aucune disposition legislative ou reglementaire n'est venue encadrer les
conventions par lesquelles les communes ou les EPCI confient la gestion des aires
d'accueil de gens du voyage a des tiers. Or, a la lumiere des observations des elus
locaux, des gestionnaires et des usagers, un encadrement minimum s'impose.
L'objectif donc est de fixer un corpus de regles communes a toutes les
conventions de gestion, auxquelles pourraient s'ajouter des regles specifiques a
chaque convention et qui n'y derogeraient pas. Ces regles pourraient figurer dans des
clauses-type qui seraient formellement approuvees par un decret en Conseil d'Etat.
A la lumiere des contacts pris dans le cadre de cette mission, les clauses-type
pourraient traiter des points suivants :
a) definir les clauses interdites (confiscation des papiers d'identite des usagers par
le gestionnaire, interdiction faite aux usagers de sortir de l'aire a certaines
heures, refus d'accueillir un usager en impaye sur une autre aire sans lui avoir
propose un plan d'apurement de sa dette, detention de fichiers informatiques
d'usagers non autorise par la CNIL, obligation faite a un usager de quitter l'aire
si ses enfants se sont pas scolarises(33) ;
b) laisser aux communes et aux EPCI le soin de fixer la duree maximale de sejour
autorise sur une aire(34); en effet, si un voyageur paye son droit d'usage de
l'aire et les fluides qu'il consomme et ne trouble pas l'ordre public, il n'y a
aucune autre raison de lui demander de quitter l'aire que parce qu'il s'agit d'une
aire de passage ; cela traduit en realite le fait que le voyageur est en voie de
sedentarisation et n'a pas trouve d'autres lieux fixes ou habiter ; la solution
adequate ne consiste pas alors a le deloger car il risque d'aller sur une autre
33 C'est a l'inspecteur d'academie de denoncer cette situation, conformement a l'article L.131-9 du code
de l'education.
34 Cette duree maximale, fixee a 9 mois par la circulaire du 5/07/2001, a ete ramenee a 5 mois (sauf s'il y
a des enfants scolarises) par le circulaire du 3/08/2006.
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 26/54
aire de passage, mais de realiser les terrains familiaux et les habitats adaptes a
meme de repondre a cette demande non satisfaite ; tant que cette offre
nouvelle n'existe pas, on ne devrait pas pouvoir deloger les usagers des aires
au seul motif que sa duree de presence a excede la duree maximale fixe pour
l'aire en question ; un mecanisme s'inspirant par exemple de l'article L.442-3-1
ou de l'article L.442-5-1 du CCH(35), pourrait etre prevu en l'espece ;
c) realiser systematiquement un etat des lieux ecrit a l'entree et a la sortie de
l'aire, etabli contradictoirement entre le gestionnaire et l'usager, et fixer des
regles de remboursement de la caution ;
d) prevoir des durees et des periodes minimum de garde, avec une astreinte en
dehors de ces periodes ; il s'agit de trouver le meilleur equilibre entre le service
rendu aux usagers et les necessites de maitrise des couts pour le gestionnaire ;
ceci est rendu possible si les communes ou les ECPI decident de retenir un
seul gestionnaire pour plusieurs aires, ce qui devrait etre encourage ;
e) elaborer et tenir a jour un reglement interieur de chaque aire ;
f) remettre a chaque usager un contrat de sejour.
Si la decision de fixer des clauses-type aux conventions de gestion etait prise,
elle devrait donner lieu a une large concertation des communes et des EPCI,
des departements, des gestionnaires et des usagers. Ce devrait etre l'occasion
de realiser un bilan du fonctionnement des aires d'accueil realisees depuis la loi
de 2000.
2.4. Les droits d'usage devraient etre harmonises
L'article L.851-1 du code de la securite sociale dispose ≪ qu' une convention
passee (entre le gestionnaire de l'aire et l'Etat) fixe, compte tenu de la capacite
effective des aires d'accueil, le montant previsionnel de l'aide (forfaitaire a la gestion
des aires d'accueil) versee annuellement a ces gestionnaires. Cette convention
determine les modalites de calcul du droit d'usage percu par les gestionnaires des
aires d'accueil (...) ≫(36).
Actuellement, cette aide a la gestion est versee par les Caisses d'allocation
familiale.
Autrement dit, le montant des droits d'usage n'est borne par aucun texte.
35 Articles L.442-3-1 et L.442-5-1 introduits par l'article 61 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 : le
dernier article prevoit que le bailleur procede avec le locataire a un examen de sa situation et des
possibilites d'evolution de son parcours residentiel ; le premier prevoit que le bailleur propose un
nouveau logement.
36 La circulaire conjointe des ministres charges de la solidarite et du logement, en date du 24 juillet 2001,
adressee a la CNAF et aux prefets, ne leur donne aucune information complementaire sur le droit
d'usage.
Rapport n°007449-01 Les aires d'accueil des gens du voyage Page 27/54
Il serait en effet normal qu'en contrepartie de l'aide versee aux gestionnaires,
l'Etat fixe les bornes a ses montants.
Une enquete conduite par le reseau IDEAL en janvier 2006 sur la tarification
des aires d'accueil des gens de voyage, aupres de 119 aires, conduit aux
constatations suivantes :
18 % des aires pratiquent un tarif inferieur a 2 € par jour et par emplacement ;
(tarif minimum : 5 € par mois) ;
71 % des aires pratiquent un tarif compris entre 2 et 3 € ;
12 % des aires pratiquent un tarif superieur a 3 € (tarif maximum : 4 € par jour) ;
Depuis cette enquete, l'eventail des montants s'est elargie puisque dans
certains departements, les aires sont gratuites, ce qui ne devrait pas etre permis, alors
que, sur certaines aires, les tarifs sont tres superieurs a 4 € par jour. De plus, ils
peuvent etre progressifs en fonction de la duree pour amener les gens du voyage a ne
pas depasser la duree maximum de sejour. Cette progressivite ne devrait pas etre
permise, au regard de ce qui a ete dit supra, en §2.3.
Par ailleurs, 92 % des aires exigent un depot de garantie afin de s'assurer de
bon entretien des equipements.
dans 22 % des aires, il etait inferieur a 40 € ;
dans 67 % des aires, il etait compris entre 40 et 100 € ;
dans 11 % des aires, il etait superieur a 100 €.
En plus du souci d'equite et de juste contrepartie de l'aide publique, il apparait
souhaitable de veiller a une certaine uniformisation des tarifs par type d'aire d'accueil
et niveau de prestation offerte et a l'interieur d'une meme zone geographique.
C'est pourquoi il est propose de fixer, par decret en Conseil d'Etat :
le minimum et le maximum des droits d'usage par jour et par emplacement, en
prevoyant un mecanisme d'indexation qui dispense d'avoir a actualiser ces
montants et un dispositif progressif de mise en conformite si les tarifs actuels
ne sont pas situes a l'interieur de la fourchette(37) ; un minimum de 2 € et un
maximum de 3 € pourraient etre envisages ;
le principe que les montants des cautions sont harmonises a l'interieur d'un
meme departement.
37 Une analyse juridique s'impose cependant avant de prescrire la baisse de tarifs autorises par
convention.
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Enfin meme si la mission n'a pu pousser ses investigations sur ce point, il lui est
apparu utile d'afficher le principe que les tarifs de consommation des fluides pour les
gens du voyage ne doivent pas etre superieurs a ceux factures aux sedentaires situes
dans le meme perimetre geographique, sauf a prendre en compte, selon une formule a
determiner, les couts d'abonnement.
Patrick LAPORTE
Inspecteur general de
l'administration du developpement durable
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