Après la fin de la trêve hivernale et la reprise des expulsions locatives, le 15 mars, c’est au tour des personnes sans abris d’être à leur tour mises en en danger. Le 1er avril signe, en effet, la fin du plan Grand froid et donc la fermeture des centres temporaires d’hébergement d’urgence ouverts pour la période hivernale. Ce sont près de 15 000 personnes qui se retrouvent sans solution pour dormir.
Si les associations et les professionnels vivent chaque année avec douleur la remise à la rue des personnes, le contexte est encore plus difficile cette année et les professionnels dénoncent une violence institutionnelle encore plus forte cette année.
« D’une part, la crise économique et sociale a conduit un nombre plus important de ménages vers les centres d’hébergement. Il y au eu beaucoup de travailleurs qui ne parviennent pas à avoir accès au logement. D’autre part, le grand chantier de la refondation du secteur de l’hébergement, conduit par l’Etat et soutenue par les associations est en panne : il a suscité beaucoup d’espoir, les services intégré d’accueil et d’ »orientation (SIAO) sont des excellent outils, mais il risquent de devenir des coquilles vides si on ne leur accorde pas des moyens supplémentaires. Enfin, les logiques budgétaires prennent l’ascendant sur la logique de la réforme qui est censée privilégier le logement d’abord et un accompagnement social sur la durée. Les associations ne demandent pas forcément plus de moyens car nous avons conscience des moyens contraints de l’Etat. La priorité est bien celle de la gouvernance » souligne Matthieu Angotti, le délégué général de la Fnars.
Injonctions contradictoires
Face à ces injonctions contradictoires de la part de l’Etat central, les services déconcentrés tentent de concilier l’inconciliable. Ainsi pour faire des économies et rendre plus acceptable les fermetures, « la DRIHL nous a-t-elle imposé des départs échelonnés : du coup, le centre s’est vidé progressivement à partir du 24 mars. Tous les deux ou trois jours, trente personnes ne revenaient plus le soir alors que nous avions de la place », raconte un travailleur social à Paris. A Lyon, « le centre Saint Irénée qui hébergeait 200 familles a fermé le 28 mars A Lyon, les personnes se voyant proposer trois nuitées d’hôtel pour couvrir jusqu’au 1er avril, date de la fin du plan hivernal. », dénonce Baptiste Meneghin, membre du réseau des professionnels de l’urgence sociale.
« Cette année encore, l’Etat bafoue la loi. Il ne respecte pas l’article 73 de la loi du 25 mars 2009 qui précise « que toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée », reprend Baptiste Meneghin.
Bataille de communication et de chiffres :
A partir du 1er avril, ce sont donc près de 800 personnes qui seront sans hébergement à Paris, 900 en Seine-Saint-Denis, 500 à Lyon, 160 à Bordeaux. Des chiffres issus des associations, le Ministère se refusant à communiquer. Par ailleurs, jusque là les familles étaient épargnées par les remises à la rue, étant relogées dans des hôtels. Cette année, les crédits dédiés aux nuitées ont été restreints et à Paris, quatre hôtels sont plus homologués pour accueillir des familles. A Lyon, le préfet a annoncé qu’il s’engeait à loger à l’hôtel tous les enfants de moins de 10 ans avec leur mère à l’hôtel, soit une trentaine de personnes, en attendant d’ouvrir un centre qui leur sera dédié.
Des recours multiples
Dans ce contexte, les recours au titre du droit à l’hébergement opposable se multiplient. « à la fois pour obtenir une solution individuelle pour les ménages, mais aussi pour montrer aux pouvoirs publics le manque de places en hébergement », reprend Matthieu Angotti.
Mais certains travailleurs sociaux veulent aller plus loin et s’apprêtent dans plusieurs villes à accompagner les ménages pour qu’ils déposent des référés-suspension devant les tribunaux administratifs de leur ressort. Pour cela, ils s’appuient sur une ordonnance rendue par celui de Lyon en mai 2010 : suite au recours de trois ménages, le tribunal administratif de Lyon avait annulé, pour deux des ménages, la décision du Préfet de mettre fin au dispositif d’hébergement et enjoignait celui-ci à trouver une solution d’hébergement dans les 48 heures (lire une des décisions en pdf).
Agnès Thouvenot
Version enrichie pour les Dépêches tsiganes d’un article publié sur le site de la Gazette des Communes
Encadré : les fermetures de centres
Lyon : 500 personnes
Paris : 800 personnes
Seine-Saint-Denis : 900
Val-de-Marne : 650
Bordeaux : 160 personnes
Dijon : 240 personnes
Lille : 400 personnes
Nantes : 180 personnes
Rennes : 80 à 100 personnes
Strasbourg : 90 personnes
Metz : 150 personnes
Toulouse : 40 personnes
Sources : les collectifs d’association (le Secrétariat d’Etat au logement refuse de communiquer).
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