lundi 1 novembre 2010

Philippe Masure : l'amour du risque

Portrait d'acteur

 

L'amour du risque

Par Olivier Berthelin
Gazette des communes 25/01/2010
Ancien constructeur de barrages, technicien pour l'aménagement de grandes villes sud-américaines, impliqué dans la réflexion sur l'enfouissement des déchets atomiques. le maire d'Albertville aime côtoyer les risques naturels et humains.
«Un décideur à l'esprit ouvert capable de reconnaître qu'il ne sait pas tout et de tenir compte de ce qu'il voit », déclare Fernand Delage à propos de Philippe Masure. Arrivant à Albertville (Savoie) avec une soixantaine de familles de commerçants itinérants, le responsable tsigane ne s'attendait pas à voir le nouveau maire (SE) s'emparer aussi sérieusement du dossier des gens du voyage. Répondant par ses réflexes d'ingénieur et d'universitaire, Philippe Masure, fraîchement élu, s'est intéressé à ces administrés temporaires, tout en s'informant sur le cadre législatif et les questions techniques liées au stationnement.

Tête froide.

L'intéressé qui, dans les coulisses des instances européennes, a participé à l'élaboration des règles d'enfouissement des déchets nucléaires, sait garder la tête froide et jouer la carte du dialogue. Les passions déclenchées par les sujets sensibles ne l'impressionnent pas. « Concernant le nucléaire, je devais rester serein face aux pressions venant de tous côtés. » Qu'il s'agisse de gérer des crises avec les voyageurs ou d'engager des procédures de concertation avec les communautés turques et maghrébines, dans un climat de polémique intense, le scientifique ne craint pas de monter au créneau : « Il faut améliorer le vivre-ensemble, développer les espaces de débat. » Et de s'interroger sur le « vieillissement » du milieu associatif qui pousse les collectivités à s'impliquer davantage.
Bien qu'ayant passé toute sa carrière à construire des barrages, des tunnels et à étudier des mesures de prévention des catastrophes naturelles, Philippe Masure, qui se dit être devenu « maire par hasard », reconnaît qu'il ne découvre pas la politique. « La gestion publique est un domaine qui me passionne depuis longtemps. J'ai toujours été en contact avec des techniciens de collectivités et des élus. C'est la raison pour laquelle j'envisageais la politique comme une activité possible pour la retraite », explique-t-il, en souriant.
Sa participation aux projets de planification urbaine de La Paz, capitale de Bolivie, l'a sensibilisé à la dimension humaine des opérations urbaines. « Je dirigeais une équipe de 80 ingénieurs et spécialistes des sciences humaines, français et boliviens. Le plus difficile n'était pas de s'entendre entre Sud-Américains et Français, mais entre ingénieurs et sociologues. Nous étions aux prémices de la collaboration interdisciplinaire et devions trouver un langage commun dans un contexte difficile. En 1978, un coup d'Etat nous a contraints à abandonner les projets de lutte contre les glissements de terrains et de développement de la ville. Ce fût pour moi un échec en termes de planification, mais une réussite du point de vue des leçons que nous en avons tiré. » En 1985, la situation politique s'étant stabilisée, des travaux ont pu être engagés.

Globe-trotteur.

Originaire de Marseille, Philippe Masure a débuté sa carrière au Maroc. C'est en épousant une native d'Albertville qu'il s'est passionné pour la montagne. Afin de garder un pied en Savoie, ce globe-trotteur dans l'âme a organisé son parcours, en alternant missions à l'étranger et postes à proximité des Alpes. Si son souci de la vie familiale et son ouverture aux autres cultures facilitent sa capacité de dialogue, l'élu constate, non sans humour, l'ampleur des tâches d'un maire : « En mission à l'étranger sur des problèmes environnementaux difficiles ou à la direction de l'Institut de la montagne, j'étais plus disponible qu'aujourd'hui, à la retraite et définitivement installé à Albertville. »
BIO-EXPRESS
1979-1980 : expert pour le premier programme d'enfouissement des déchets radioactifs, Bruxelles.
1980-1993 : expert « environnement et risques » du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) ; directeur du BRGM pour les pays du Pacte andin.
1990-1999 : membre du comité scientifique de l'ONU pour la prévention des risques naturels.
2000-2008 : professeur associé de l'université de Savoie, directeur de l'Institut de la montagne, Chambéry.
Printemps 2008 : retraite ; est élu maire d'Albertville.

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